Le nouveau gouvernement conservateur albertain de Jason Kenny a décidé de s’attaquer à ce qu’il estime être de la censure, de l’intolérance et de la discrimination à l’endroit de certains individus ou croyances politiques et entend exiger une plus grande liberté d’expression sur les campus universitaires de cette province de l’Ouest canadien.
Dans une série d’incidents ces dernières années en Alberta et ailleurs au pays on a vu des établissements d’enseignement postsecondaires refuser des demandes d’individus ou de groupes qui voulaient venir s’exprimer devant des étudiants.
Selon le gouvernement Kenny, ces refus ou révocations remettent en question la liberté d’expression sur les campus concernent directement des idées proches de la droite conservatrice. Le gouvernement Kenney donne aux universités jusqu’au 15 décembre pour établir des politiques claires qui suivent les principes de Chicago.
Les principes de Chicago ont été rédigés en 2014 par le Comité sur la liberté d’expression de l’Université de Chicago et ils réitèrent l’importance d’une plus grande liberté d’expression possible sur les campus. Selon ses promoteurs, les universités, par nature, doivent s’abstenir de limiter la propagation d’idées mêmes blessantes ou désagréables.
Or, dans le passé en Alberta, des groupes antiavortement notamment se sont plaints que leurs propos étaient muselés. Avec les changements annoncés, plusieurs des restrictions qui leur étaient imposées par les universités pourraient tomber.
Les université doivent-elles chercher à exclure des idées car elles déplaisent?
S’opposer à ce que des étudiants soient exposés aux idées extrémistes est-ce une bonne politique?
La rectrice de l’Université de Calgary, Dru Marshall, explique qu’elle a choisi de rédiger une nouvelle déclaration sur la liberté d’expression qui fait référence aux différentes politiques en place plutôt que d’élaborer une nouvelle politique à part entière.
« Je ne pense pas que cela fera un grand changement », dit-elle. « Les Universités sont un endroit où on se heurte parfois à des idées qui ne sont pas les siennes et qui mettent mal à l’aise de temps en temps, c’est normal », ajoute Dru Marshall.
Elle ajoute : « la beauté des universités, c’est que ce sont des endroits où l’on peut élargir ses horizons, sa pensée, et admettre que tout le monde ne pense pas de la même façon et que, si on a une opinion, elle doit pouvoir être énoncée et exprimée clairement pour pouvoir être discutée respectueusement.»
Faut-il revoir et corriger la liberté d’expression dans nos universités?
Le gouvernement conservateur en Ontario fait lui aussi pression au nom de la liberté d’expression
Rappelons que l’an dernier, alors qu’il était fraîchement élu lui aussi, le Parti conservateur de l’Ontario avait aussi indiqué aux collèges et universités de l’Ontario qu’ils devaient procéder à révision de leur politique sur la liberté d’expression. Le gouvernement de Doug Ford précisait, en août 2018, que le financement des institutions pourrait même diminuer si cette nouvelle exigence n’est pas satisfaite.
En Alberta et Ontario, certains s’inquiètent cependant de voir les partisans de théories racistes ou d’idées choquantes tirer profit des pressions réformatrices de ces deux gouvernements conservateurs provinciaux.
Selon Shama Rangwala, chargée de cours à l’Université de l’Alberta, les idées intolérantes sont souvent renforcées ou « légitimés par la crédibilité des établissements qui les accueillent ». Or, elle estime que l’objectif des conservateurs n’est pas de promouvoir la liberté d’expression, mais de créer des espaces de paroles très conservateurs pour promouvoir des théories comme le génocide blanc ou des théories nationalistes blanches, très anti-immigrantes.
Les Ontariens craignent que le décret de Doug Ford concernant les règles sur la liberté d’expression dans les campus ouvre la porte à des groupes qui tiennent des propos haineux, estime Chris Glover, le porte-parole néo-démocrate pour les collèges et les universités.
RCI avec La Presse canadienne et la contribution avec les informations de Jean-Sébastien Bernachez, Michel Désaultels, Laurent Pirot et Simon-Pierre Poulin de Radio-Canada
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