Espionnage : doit-on se méfier des étrangers dans les universités canadiennes?

Deux cas d’espionnage présumés impliquant un enseignant et une étudiante de deux universités au pays suscitent la réflexion.

D’entrée de jeu, il convient d’éviter la généralisation que tous les étudiants et enseignants étrangers pourraient être des espions.

Les exceptions de ces derniers mois, notamment les cas les plus récents d’une étudiante d’origine rwandaise et d’un enseignant de l’Université McGill, seraient-elles révélatrices d’un phénomène plus répandu qui mérite d’être scruté en profondeur?

Lorsqu’il est question d’espionnage, ce sont des enjeux aussi bien humains, de sécurité publique et de sécurité nationale, que des enjeux économiques, politiques et diplomatiques, entre autres, qui sont soulevés. Ce sont des enjeux qui préoccupent les gouvernements soucieux d’assurer leur souveraineté et le respect de leurs valeurs.

Radio-Canada, qui a conduit l’enquête au sujet de l’étudiante rwandaise, nommée Nadège pour la circonstance, rapporte que cette dernière a bénéficié d’une bourse de la francophonie pour poursuivre ses études au Canada. En réalité, ce qui était présenté comme un séjour d’étude sur le territoire canadien n’aura été qu’un prétexte, car l’étudiante aurait découvert qu’elle devait aussi arborer une casquette d’espionne, à la solde du gouvernement de son pays. Celui-ci lui aurait confié un autre mandat : retrouver les traces d’un Canadien d’origine rwandaise pour ensuite localiser ses parents qui seraient recherchés par le régime du président Paul Kagame.

Ayant renoncé à transmettre les informations aux autorités de son pays, après avoir réussi à retrouver la famille en question, Nadège a sollicité l’asile politique au Canada. Sa demande a été rejetée parce que sa mission d’espionnage contrevient aux valeurs canadiennes.

Enquête – Des espions parmi nous – 31 octobre

L'espionnage, on l'associe souvent à grands pays comme la Chine ou la Russie, pas à un pays comme le Rwanda. Mais alors que le monde admire le miracle rwandais, le régime de Paul Kagame aurait mis en place des moyens sophistiqués pour surveiller et traquer ses critiques à l’étranger, même jusqu’ici, au Canada. Une espionne rwandaise se confie ce jeudi, à Enquête.

Posted by Radio-Canada on Wednesday, October 30, 2019

Espionnage réalisé par des universitaires étrangers pour le compte de gouvernements internationaux : un phénomène récurrent ?

Certains régimes dictatoriaux sont reconnus pour leur propension à traquer et à éliminer leurs opposants, où qu’ils se trouvent. C’est pourquoi des meurtres de ressortissants étrangers dans certains pays peuvent souvent avoir des ramifications jusque dans leurs pays d’origine, et avoir des liens avec le pouvoir en place. Il n’est pas rare que des gouvernements sollicitent les services des étudiants et d’autres membres du milieu universitaire pour les accompagner dans la réalisation de leurs objectifs nécessitant un travail d’espionnage à l’international.

Pour ce qui est du cas de l’enseignant de l’Université McGill, La Presse rapporte que ce dernier agissait pour le compte du gouvernement chinois, et que c’est le FBI qui avait sonné l’alerte auprès des autorités canadiennes.

Le journal mentionne que cet enseignant recevait pourtant des millions de dollars du gouvernement fédéral pour mener des recherches dans l’intérêt du Canada. Mais il œuvrait en cachette pour les intérêts de la Chine, notamment pour ce qui est du développement de son armement et de ses ambitions spatiales. Il aurait scruté et copié ce qui se fait sur le plan technologique au Canada et chez ses principaux alliés.

L’espionnage reste après tout une question complexe qu’il convient d’aborder avec circonspection, surtout lorsqu’il est en lien avec des jeunes et les universités. Étant donné qu’elles peuvent être des terreaux fertiles pour des personnes qui s’y dissimuleraient, sous divers statuts, dans le but de servir les intérêts masqués de pays tiers, il est certain que les perceptions ne sauraient demeurer les mêmes, en ce qui a trait aux étrangers qui y étudient ou qui y travaillent.

Les universités canadiennes brillent à l’échelle internationale pour la réputation qu’elles ont à offrir un cadre attrayant, des contenus structurés et des diplômes parmi les plus prisés. Traiter de l’espionnage au sein de ces institutions, en évitant de tomber dans le piège de la généralisation, consistera bien plus qu’à rehausser de vigilance et à savoir distinguer les vrais étudiants des faux, les vrais enseignants des serviteurs d’intérêts étrangers.

C’est une tâche titanesque qui incombe aux services spécialisés qui à eux seuls détiennent les clés des meilleures pratiques et façons de procéder, sans toutefois créer un climat de peur, de suspicion et porter atteintes aux droits et libertés individuelles, avec pour risque de faire perdre aux institutions universitaires du pays leur réputation si bien établie.

Avec Radio-Canada et La Presse.
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Catégories : International, Politique, Société
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