Le chef du Parti conservateur du Canada Andrew Scheer a démissionné le 12 décembre 2019, en invoquant des raisons familiales. Archives : (Michael Bell/The Canadian Press)

Manque de transparence : la tuile de trop qui a poussé Scheer vers la sortie?

Le chef du Parti conservateur du Canada Andrew Scheer a annoncé sa démission depuis Regina, la capitale de la Saskatchewan, ce qui a suscité de nombreuses réactions au sein de la classe politique et des analystes de partout au Canada.

Après la défaite aux dernières élections fédérales, Andrew Scheer, qui était en poste depuis 2017, a anticipé son départ, avant le vote de confiance annoncé pour le mois d’avril, à l’issue du caucus du parti.

Plusieurs analystes voient en cette démission la suite logique de la vague de mécontentements qui était perceptible dans le parti, y compris parmi les personnalités les plus influentes, dont certaines avaient exprimé tout haut leur désir de voir le chef quitter ses fonctions.

Sur la base des informations qui devraient encore être corroborées, citant le Globe and Mail, Radio-Canada rapporte que le chef conservateur aurait utilisé un fonds de réserve du parti pour payer les frais de scolarité de ses enfants.

Les experts soutiennent qu’il est difficile de dire si c’est pour cette raison que le père de cinq enfants, qui vit à Ottawa, a déjà démissionné. Ses enfants fréquenteraient des écoles privées en Ontario et en Saskatchewan.

Au sein des conservateurs, ceux qui ont été informés de ce fait auraient manifesté leur mécontentement, rapporte Radio-Canada. Ainsi, à la lumière de ces révélations, il n’est pas exclu que ces membres aient enfoncé le clou et insisté pour que M. Scheer s’en aille.

Radio-Canada rapporte aussi que durant la dernière campagne électorale, les membres du Parti conservateur avaient été déçus d’apprendre que leur chef n’avait pas achevé ses cours pour devenir courtier d’assurance. Ils avaient été tout aussi surpris d’apprendre que ce dernier avait une double nationalité canadienne et américaine. Autant de faits qui seraient venus jeter du discrédit sur le chef conservateur, soutiennent les analystes de Radio-Canada qui concluent que la pression était forte sur M. Scheer, dont les appuis se sont amenuisés au fil des jours au sein de son parti

Plusieurs de ses membres considèrent qu’il n’aura été qu’un chef de transition et ils espèrent à présent trouver un remplaçant susceptible de conduire le Parti conservateur à la victoire aux prochaines élections.

Alain Rayes, lieutenant politique pour le Québec du Parti conservateur, a tenu à remercier M. Scheer pour les services rendus au parti et aux Canadiens. Durant la dernière campagne électorale, M. Rayes avait manifesté son désaccord avec le chef démissionnaire, soutenant que sa campagne était trop centralisée.

L’échec du Parti conservateur à ces élections avait poussé ses membres à mandater John Baird, ancien ministre des Affaires étrangères du Canada sous Stephen Harper, de 2011 à 2015, pour analyser les raisons de cette défaite. Comme il est parti avant la divulgation des résultats de cette enquête, certains considèrent que M. Scheer part de façon honorable et évite le vote de confiance qui aurait suivi sa publication.

Dans ce message sur Twitter, John Baird remercie M. Scheer pour ses services à la tête du Parti conservateur et indique que son rapport n’a pas encore été publié, contrairement à ce que certains pensent.

Au lendemain de la campagne et jusqu’à la semaine dernière, M. Scheer continuait à s’accrocher à son poste, malgré le fait que certains hauts dignitaires du parti avaient commencé à exprimer leur malaise.

À l’annonce de sa démission, Andrew Scheer a mentionné qu’il restera à la Chambre des communes pour continuer à défendre son parti, en tant que député de Regina-Qu’Appelle, en attendant la désignation d’un nouveau chef.

Ce départ réglera-t-il tous les problèmes du Parti conservateur?

C’est difficile à dire, car les analystes soutiennent que l’échec du Parti conservateur à la dernière élection est attribuable à plusieurs autres causes, dont la désertion de Maxime Bernier qui a quitté le parti pour créer sa propre formation politique, le Parti populaire du Canada, et se positionner en adversaire du Parti conservateur, tout en déplorant son virage vers la « gauche ».

Mélanie Joly, du Parti libéral, pense que certaines positions jugées rétrogrades de M. Scheer sur l’avortement, entre autres, appuyées par la droite religieuse au Canada, aura été pour beaucoup dans cette défaite électorale.

« La politique c’est difficile, il y a un côté humain derrière. J’ai du respect pour M. Scheer, mais il y a plusieurs de ses positions que je ne partageais pas : avortement, mariage gai. Son conservatisme moral et social ne passe pas au Québec et au pays », a affirmé Mme Joly.

Jason Kenney, pressenti par plusieurs comme remplaçant de M. Scheer, a remercié ce dernier pour ses loyaux services aux Canadiens et lui a souhaité la meilleure des chances dans ses futures aventures.

Interrogé sur son intérêt pour la chefferie du Parti conservateur, le premier ministre de l’Alberta, qui était récemment en mission à Ottawa, a répondu qu’il était davantage préoccupé par les innombrables problèmes économiques et sociaux de sa province et réitéré sa détermination à la remettre sur les rails.

Gérard Deltell, député de Louis-Saint-Laurent, au Québec, a salué le courage, l’humilité et les qualités de chef à l’écoute qu’a été Andrew Scheer pendant les deux années passées à la tête du Parti conservateur.

« Depuis trois mois, je n’ai pas vu un homme aussi courageux et humble. En politique, ce n’est pas toujours celui qui parle le plus, mais c’est celui qui écoute le plus qui est le plus proche de la population », a observé M. Deltell.

Dans le même sens, le député néo-démocrate Peter Julian est revenu sur les raisons familiales mentionnées par M. Scheer pour justifier son départ. Il a souligné le mérite et les valeurs fondamentales de la démocratie canadienne qui met l’accent sur la liberté : celle d’un chef de démissionner et celle des membres d’un parti de déterminer qui sera leur chef.

Le chef du Bloc québécois a aussi mis de l’avant les qualités personnelles de l’ancien chef conservateur.

« Tout ce qui a été fait l’a été pour le bien des gens, avec une sincérité absolue », a reconnu Yves-François Blanchet.

Inspiré par son expérience de cinq ans à la tête du Parti libéral, le premier ministre du Canada a souligné les difficultés reliées aux fonctions de chef et a rendu un hommage particulier à celui qui a été son principal adversaire aux dernières élections.

« Il y a peu de gens qui savent les défis et les barrières qui existent quand on est leader national d’un parti comme le Parti conservateur ou le Parti libéral du Canada », a soutenu M. Trudeau.

Avec CBC, Radio-Canada et YouTube et Twitter
Catégories : Politique
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