La conseillère scientifique en chef du Canada Mona Nemer soutient qu’il est important d’avoir une approche pancanadienne, des tests suivant un échantillonnage aléatoire pour être capable d’élaborer un portrait plus juste de la situation susceptible de guider les choix futurs en ce qui concerne le déconfinement et la relance des activités économiques. Crédit : Istock.

COVID-19 : échantillonnage aléatoire, dépistage massif, portrait plus clair?

Mona Nemer, conseillère scientifique en chef du Canada, dans une entrevue à Radio-Canada, soutient que les capacités actuelles des laboratoires sont sous-exploitées et que le pays devrait accroître le nombre de tests, faits selon les mêmes normes, pour avoir un portrait plus juste de la situation.

Chaque province est libre de mettre les critères qu’elle veut bien mettre pour le dépistage. Ça, c’est aussi un peu dommage parce que ça nous empêche de faire des comparaisons vraiment fidèles entre les différentes parties du pays, parce que si certains ont des critères différents, le nombre de cas qu’on rapporte est biaisé au départ. Donc, c’est difficile de savoir est-ce qu’on a une situation qui est pire au Québec par exemple qu’en Ontario si on ne fait pas le même nombre de tests avec les mêmes critères par 1000 personnes par exemple?Mona Nemer

Elle recommande ainsi le dépistage aléatoire qui permettrait de tester un plus grand nombre de personnes et d’avoir un portrait plus conforme à la réalité.

« Ce qui continue à me préoccuper, c’est notre niveau de dépistage du virus. Selon ce que je vois dans les comparatifs internationaux dans les pays où ça va bien, nous sommes toujours en train d’avoir un nombre insuffisant de tests qui sont faits. Ça limite notre capacité de détecter rapidement les personnes qui sont atteintes, de les isoler et de s’en occuper bien évidemment, ce qui permet d’éviter de nouvelles éclosions. On ne teste pas assez au Québec, on ne teste pas assez en Ontario. À mon humble avis, on ne teste pas suffisamment dans plusieurs parties du pays et ça peut nous jouer de mauvais tours en termes de déconfinement, de réouverture de l’économie et de retour progressif à une vie normale », constate la conseillère scientifique en chef.

« On le sait maintenant, on le sait depuis un mois, que des personnes qui ne présentent pas de symptômes peuvent être contaminées et transmettre le virus deux jours avant qu’ils aient un quelconque symptôme », affirme Mona Nemer.

Elle estime que le plus tôt on dépiste ces personnes et on les isole, le moins on a de chances de revoir une nouvelle éclosion.

« Au Québec, on continue à tester uniquement les personnes qui présentent des symptômes, alors que dans d’autres pays (Allemagne, Corée du Sud, Singapour), ils ont fait des dépistages beaucoup plus grands, beaucoup plus importants dans les communautés, un dépistage communautaire de façon aléatoire beaucoup plus représentatif de la population, des femmes, des hommes, des enfants, pour comprendre vraiment le taux d’infection dans la population. 

Des pairs sur la même longueur d’onde

Cette observation de Mona Nemer rejoint celle d’un autre chercheur avec qui nous avons discuté récemment. Il s’agit de Roger Pedieu, ancien étudiant-chercheur postdoctoral au Centre de recherche en matériaux renouvelables de l’Université Laval. M. Pedieu soutient que la façon dont les tests sont actuellement menés dans certaines régions du pays ne permet pas d’avoir un portrait réel de la situation.

C’est ainsi qu’il recommande que, dans des régions comme Montréal-Nord considéré comme l’un des points les plus touchés de la grande région, il faut accentuer le dépistage et procéder par un échantillonnage aléatoire. C’est ce qui permettra de tester un plus grand nombre de personnes sans distinction d’âge et de sexe, et d’avoir une meilleure représentation.

Dans des zones moins peuplées comme sur la Côte-Nord par exemple, on n’a pas besoin d’échantillonnage. Par contre, dans les grandes villes comme Montréal, pour avoir une bonne idée de la transmission communautaire, il faut procéder à un échantillonnage aléatoire par arrondissement. C’est ce qui permettra d’avoir une idée globale du portrait dans chaque arrondissement. Il faut cet échantillonnage aléatoire pour avoir un portrait juste et ne pas simplement tenir compte des personnes qui présentent des symptômes pour procéder au test, a-t-il affirmé.

« Ceux qui ont été testés à Montréal-Nord présentaient des symptômes, mais on ne sait rien de ceux qui sont asymptomatiques et qui pourraient transmettre le virus », soutient le chercheur qui estime que l’échantillonnage aléatoire permettrait d’aller également voir les cas de ces personnes asymptomatiques et savoir comment les gérer. Sachant qu’on est dans un endroit où le taux de prévalence est élevé, cela peut permettre aux personnes de mieux respecter les consignes et les mesures barrières », observe M. Pedieu.

Dans l’émission d’ICI Première Tout un matin, Mona Nemer a mentionné que la situation est préoccupante au Québec, même si la capacité de tester a pourtant été renforcée. Par contre, le nombre des tests est loin de s’accroître de manière assez importante. « Manque-t-il de réactifs, de personnels », lance la conseillère scientifique en chef du Canada.

Au Québec […], on pensait qu’on commençait à voir la lumière au bout du tunnel, puis le train nous est arrivé en pleine face avec l’éclosion à Montréal-Nord […] J’aimerais que les autorités chargées des tests de dépistage nous expliquent clairement la situation. D’un côté, on nous dit qu’on a augmenté la capacité de faire les tests. D’autre part, ça ne se fait pas. Est-ce que c’est une décision de stratégie, de critère de qui on dépiste? […] On nous dit que la capacité maximale n’est pas atteinte. Je connais des laboratoires à Montréal qui sont homologués pour recevoir des tests, mais qui n’en reçoivent pas assez. La question c’est pourquoi? dit Mona Nemer
Avec une entrevue de Patrick Masbourian, Radio-Canada

Lire aussi :

Tests rapides Spartan: inefficace pour l’instant selon Santé Canada

Coronavirus : la stratégie de gestion sud-coréenne peut-elle inspirer le Canada ?

COVID-19 : mortalité au Canada maintenant presque la même qu’aux États-Unis

Catégories : Non classé
Mots-clés : , , , , ,

Vous avez remarqué une erreur ou une faute ? Cliquez ici !

Pour des raisons indépendantes de notre volonté et, pour une période indéterminée, l'espace des commentaires est fermé. Cependant, nos réseaux sociaux restent ouverts à vos contributions.