Le ministre canadien de l’Immigration, Marco Mendicino, a annoncé vendredi que le pays désirait attirer 1,2 million d’immigrants d’ici 2023 afin de relancer l’économie et combler le manque de main-d’œuvre. La pandémie de COVID-19 a obligé le pays à fermer ses frontières en mars, résultant en une chute drastique du nombre de nouvelles arrivées.
Le plan d’immigration sur trois ans est « ambitieux » selon le ministre. Il a pour objectif d’attirer davantage de travailleurs qualifiés, de proches de citoyens et de résidents permanents et de réfugiés.
« Le plan d’aujourd’hui nous aide à compenser les perturbations causées par la COVID-19 », a déclaré Marco Mendicino à Reuters.
Le Canada envisage d’ajouter 401 000 nouveaux résidents permanents l’année prochaine, 411 000 en 2022 et 421 000 en 2023. Cela correspond à une augmentation de 50 000 personnes par an comparé au plan précédent.
La seule fois où le Canada a accueilli plus de 400 000 immigrants en un an remonte à 1913, lorsque le pays a admis 401 000 nouveaux arrivants. Il n’a plus jamais atteint ce chiffre par la suite.
En comparaison, avant la pandémie, le gouvernement libéral espérait attirer 341 000 personnes en 2020. Cependant, en août, seules 128 425 personnes avaient été accueillies, selon les données de Reuters.
Avec son plan, le Canada s’engage également « à admettre jusqu’à 500 réfugiés au cours des deux prochaines années dans le cadre du Projet sur la voie d’accès à la mobilité économique ». Ce projet aide les réfugiés qualifiés à demander la résidence permanente grâce au processus d’immigration économique.
Depuis son arrivée au pouvoir en 2015, le gouvernement de Justin Trudeau souhaite faire de l’immigration un véritable moteur pour l’économie du pays en cherchant à attirer chaque année près de 1 % de la population canadienne qui s’élève à près de 38 millions.
Accent sur la façon dont l’immigration peut aider notre économie, puisqu’environ 60 % des immigrants seront choisis dans le cadre des programmes d’immigration économique. pic.twitter.com/UkF8QbjT5j
— IRCC (@CitImmCanFR) October 30, 2020
Attirer une majorité de migrants « économiques »
La pandémie de COVID-19 « a mis en évidence la contribution des immigrants au bien-être de nos communautés et dans tous les secteurs de l’économie », explique le gouvernement dans son communiqué.
Ainsi, Ottawa souhaite attirer des migrants dans les secteurs où le Canada en a le plus besoin : la santé, les technologies de l’information, la production alimentaire et l’agriculture.
Pour ce faire, le plan met l’accent sur la croissance économique, avec environ 60 % des admissions qui se situeront dans la catégorie économique.
« Les Canadiens ont vu à quel point les nouveaux arrivants jouent un rôle démesuré dans nos hôpitaux et nos maisons de soins et nous aident à mettre du pain sur la table, » a avancé M. Mendicino dans un communiqué.
Dans le système d’immigration canadien, les immigrants entrent dans les catégories suivantes : économie, famille, réfugiés et motifs humanitaires.
La répartition prévue pour l’année prochaine comprend :
- 232 000 immigrants dans la catégorie économique;
- 103 500 dans la catégorie de la famille;
- 59 500 réfugiés et personnes protégées;
- 5500 pour des raisons humanitaires.
Pour ce qui est du secteur de la santé, le gouvernement s’engage à offrir une « voie vers la résidence permanente pour les demandeurs d’asile admissibles qui ont travaillé en première ligne pour lutter contre la pandémie entre le 13 mars et le 14 août 2020, en fournissant des soins directs aux patients dans les établissements de soins de santé. »
Pour Leah Nord, directrice principale des stratégies de main-d’œuvre et de la croissance inclusive pour la Chambre de commerce du Canada, ces nouvelles cibles d’immigration peuvent aider à relancer l’économie si le gouvernement place ces migrants consciencieusement.
Il devra ainsi veiller à faire correspondre les migrants économiques aux pénuries de travailleurs dans les différents secteurs et régions du pays, a-t-elle expliqué à CBC News.
Mme Nord a d’ailleurs ajouté que malgré le taux de chômage élevé depuis le début de la pandémie, l’immigration continuera à jouer un rôle important pour combler les pénuries de main-d’œuvre persistantes.
« Nous sommes dans cette situation plutôt étrange où nous avons des taux de chômage plus élevés que ce que nous avons connu depuis plusieurs années. Avant la crise, les taux de chômage étaient historiquement bas. Aujourd’hui, ils penchent vers l’autre extrémité », précise-t-elle.
Des initiatives pour relancer l’immigration
M. Mendicino s’est dit convaincu que le gouvernement peut atteindre les objectifs malgré la crise sanitaire mondiale, en contournant les restrictions de voyage tout en respectant les mesures de sécurité telles que les quarantaines obligatoires.
Plusieurs projets pilotes sont déjà à l’essai dans divers aéroports et postes frontaliers du pays afin de réduire la durée de la quarantaine obligatoire à l’arrivée ou encore tester les gens plus rapidement. Cela permettrait d’accueillir plus de voyageurs si les projets s’avèrent concluants.
Plus tôt cette semaine, Ottawa a annoncé que, dans le cadre du programme Entrée express, des points additionnels seront accordés aux dossiers de candidats francophones afin de favoriser la croissance des communautés francophones hors Québec.
Le gouvernement a aussi rouvert en octobre le programme de parrainage des parents et grands-parents afin d’attirer plus d’immigrants. La nouveauté de cette année réside dans l’abaissement du seuil de revenu requis pour les parrains potentiels. Les libéraux reconnaissent que les revenus des gens ont peut-être diminué à cause de la pandémie.
Dans l’annonce de son plan, le ministre de l’Immigration a renouvelé l’engagement du gouvernement pour améliorer le traitement des demandes de résidences permanentes. Le ministère a ainsi envoyé un appel d’offres pour être moins dépendants des dossiers papier et des entretiens en personne avec les candidats.
Aussi, Marco Mendicino a affirmé qu’il envisagerait d’élargir et d’accélérer le processus d’obtention de la résidence permanente pour les immigrants qui vivent déjà dans le pays. Cela est en partie dû à l’incertitude relative à la date de réouverture des frontières, a-t-il ajouté.
Plus de 63 000 personnes avec un permis de travail temporaire ont obtenu la résidence permanente en 2019, a déclaré le ministère dans son rapport annuel au Parlement.
L’opposition n’est pas convaincue
Face à ces annonces du gouvernement, la porte-parole conservatrice en matière d’immigration, Raquel Dancho, a dépeint ces chiffres comme une « pure fantaisie ». Elle se demande notamment comment les libéraux vont s’y prendre pour faire venir tous ces immigrants de façon sécuritaire et les intégrer dans la société canadienne.
« Il n’y a aucune chance que cela arrive. Et j’espérais vraiment entendre un plan réel de la manière dont ces questions allaient être résolues aujourd’hui. Et il n’en a pratiquement pas été question », a-t-elle déclaré.
La députée a notamment critiqué le retard des autorités quant à la mise en place de tests rapides pour la COVID-19.
De son côté, la critique du Nouveau Parti démocratique (NPD) en matière d’immigration, Jenny Kwan, se questionne sur le traitement des demandes de résidence permanente déjà en cours.
« Avec plus de six mois de demandes dont le traitement a été complètement arrêté, il n’y aura pas de pénurie de demandes à traiter l’année prochaine », a-t-elle dit, ajoutant que le département de l’immigration doit disposer d’une augmentation significative de ses ressources pour faire face à l’arriéré.
Mme Kwan a ajouté que le Canada devrait également accorder le statut de résident permanent aux personnes qui le souhaitent et qui se trouvent déjà dans le pays, comme les travailleurs étrangers temporaires et les étudiants internationaux ayant des offres d’emploi.
Avec les informations de CBC News et Reuters.
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