Des équipes de secours travaillent sur les débris du site de l'accident du vol PS752 à l'extérieur de Téhéran. (AFP via Getty Images)

L’Iran offre 191 000 dollars canadiens pour chacune des victimes du vol PS752

L’Iran alloue 150 000 dollars américains aux familles de chacune des victimes de la destruction de l’avion de ligne ukrainien par les forces iraniennes dans le ciel de Téhéran. 138 des 176 victimes à bord de cet avion, détruit par des missiles le huit janvier dernier, résidaient alors au Canada.

Le Président iranien a annoncé lui-même, mercredi, la création du fonds d’indemnisation pour payer les familles des victimes sans cependant préciser l’échéancier prévu pour les versements.

Le ministre canadien des Affaires étrangères, François-Philippe Champagne, a cependant déclaré qu’aucune négociation ou réunion entre l’Iran et les autres pays affectés par la tragédie n’a eu lieu et qu' »aucune offre formelle n’a été faite par l’Iran à ces pays ».

Parmi les victimes du vol PS752 figuraient des dizaines de citoyens canadiens et de résidents permanents, ainsi que de nombreuses autres personnes ayant des liens avec des universités canadiennes. L’avion transportait 167 passagers et neuf membres d’équipage, dont 82 Iraniens, 57 Canadiens, 17 Suédois, 11 Ukrainiens, 4 Afghans et 4 Britanniques.

Les compensations ne suffisent pas

Les autorités canadiennes affirment que l’Iran n’a pas divulgué toutes les preuves pertinentes ni fourni de réponses satisfaisantes à un certain nombre de questions en suspens. Il s’agit notamment de connaître l’identité des responsables, de la chaîne exacte des événements qui ont conduit des gardiens de la révolution à ouvrir le feu sur l’appareil. Ottawa et les autres pays concernés comme la France et l’Ukraine veulent connaître qui a pris la décision de laisser l’espace aérien iranien ouvert au trafic aérien civil la nuit même où l’Iran a lancé un barrage de missiles balistiques sur les forces américaines en Irak.

Pendant des jours, l’Iran avait nié que ses militaires étaient responsables de l’abattage de l’avion. Mais avec de nombreuses preuves issues des services de renseignement occidentaux, l’Iran avait fini par reconnaître que ses militaires avaient tiré sur l’avion ukrainien à un moment où les tensions entre l’Iran et les États-Unis s’intensifiaient.

Téhéran avait blâmé « l’erreur humaine » pour la destruction du vol en plein ciel, déclarant dans un rapport publié au cours de l’été dernier que des militaires ont identifié à tort le vol civil comme une menace et ont ouvert le feu à deux reprises sans obtenir l’approbation de leurs supérieurs.

Le ministre canadien des Affaires étrangères ne croit pas à la théorie de l’erreur humaine

François-Philippe Champagne. PHOTO : LA PRESSE CANADIENNE / SEAN KILPATRICK

Le ministre des Affaires étrangères François-Philippe Champagne a déclaré, il y a une dizaine de jours, qu’il ne pense pas que la destruction du vol PS752 par l’Iran puisse être imputée comme le prétend Téhéran à une erreur humaine.

Dans une entrevue accordée à la télévision de CBC News, le ministre a cependant refusé de dire à qui revient la faute.

« Ce que je dis, c’est que nous avons vu des missiles être tirés sur l’avion et cela, pour moi, a soulevé toutes sortes de questions. »

« Je vais remettre en question tout ce qu’ils disent parce que je ne prends rien au pied de la lettre, a ajouté M. Champagne. J’ai des questions parce qu’il y a trop d’exemples que nous avons vus où […] ils n’ont pas communiqué. »

M. Champagne a expliqué que le Canada n’a toujours pas accès aux témoins, ni aux preuves, ni aux suspects.

Les familles des victimes réclament davantage

Le porte-parole d’une association de familles de victimes au Canada déclare que le gouvernement canadien devrait engager une action en justice contre l’Iran.

« Ce que fait l’Iran est humiliant et insultant pour les familles », a déclaré Hamed Esmaeilion, qui a perdu sa fille de neuf ans, Reera, et sa femme, Parisa, pendant le vol.

« Nous devons connaître la vérité et nous devons voir les criminels devant un tribunal indépendant et impartial comme la Cour internationale de justice [des Nations unies] », a-t-il déclaré. « Nous en avons fini avec les actions de l’Iran.

« Maintenant, c’est au tour de notre gouvernement d’agir et de réagir. De leur retirer l’enquête et de les traduire en justice. »

L’association des familles des victimes a publié, il  y a une dizaine de jours, une déclaration demandant une enquête indépendante et transparente sur la destruction du vol.

Le 8 janvier 2020, le Boeing 737-800 a été abattu peu après son décollage de l’aéroport international Imam Khomeiny de Téhéran. Les autorités aériennes iraniennes ont d’abord nié que l’avion ait été touché par un missile et ont déclaré qu’une erreur technique en était la cause. Voici les visages de quelques-unes des victimes qui devaient atterrir au Canada. (CBC)

L’Iran ne devrait pas enquêter sur lui-même

Un rapport indépendant canadien publié, plus tôt ce mois-ci, sur l’écrasement du Boeing ukrainien estime que l’Iran ne devrait pas être autorisé à « enquêter sur lui-même » et propose de changer les règles de l’aviation civile internationale en ce domaine.

« La partie responsable enquête sur elle-même, principalement en secret, ce qui n’inspire pas confiance », relève le rapport rédigé par l’ex-ministre libéral Ralph Goodale.

« Un grand nombre de renseignements importants sur cette horrible tragédie demeurent inconnus », note le rapport qui ajoute que « cet état de fait est imputable à l’Iran, qui n’a pas encore prouvé – jusqu’à présent, à tout le moins – que ses enquêtes (sécurité, violations au droit pénal ou autres) sont véritablement indépendantes, objectives et transparentes ».

Le rapport canadien appelle à une remise en cause des normes internationales actuelles qui confient la direction de l’enquête sur un accident d’avion au pays où survient l’écrasement.

« Dans le cas d’un avion abattu par l’armée, ça signifie que le même gouvernement associé à la survenance de la catastrophe (l’Iran en l’occurrence) a la pleine maîtrise de l’enquête sur la sécurité, malgré les conflits d’intérêts évidents, avec peu de garanties d’assurer l’indépendance, l’impartialité ou la légitimité. Cette situation mine la crédibilité de l’enquête. L’aptitude de la communauté internationale à appliquer des mesures efficaces pour empêcher des catastrophes semblables est donc compromise. »

Le premier ministre Justin Trudeau a salué les conclusions du rapport et a appelé l’Iran à « répondre de manière approfondie, avec des preuves à l’appui » aux questions qu’il soulève.

Sur cette photo d’archive du 8 janvier 2020, des secouristes portent le corps d’une victime de l’accident de l’avion d’Ukraine Airlines, à Shahedshahr, au sud-ouest de la capitale Téhéran, en Iran. (Photo : AP/Ebrahim Noroozi, fichier)

RCI avec CBC News, La Presse canadienne et RCI

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