Les sénateurs viennent d'approuver plusieurs amendements substantiels au projet de loi, dont un qui permettrait aux personnes qui craignent de perdre leur capacité mentale de faire une demande anticipée pour l’aide médicale à mourir. PHOTO BLAIR GABLE, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Les Canadiens qui ne sont pas près de mourir obtiennent l’accès à l’aide à mourir

Le Sénat a adopté une version longuement débattue et mainte fois révisée du projet de loi C-7 qui place le Canada à l’avant-garde à bien des niveaux en ce qui a trait à l’aide médicale à mourir.

Le projet de loi a reçu la sanction royale en fin de journée, mercredi, quelques heures après le vote des sénateurs, soit un peu plus d’une semaine avant la date limite du 26 mars imposée par un tribunal. Un jugement de la Cour supérieure du Québec de 2019 avait accordé quatre prolongations pour rendre la loi sur l’aide médicale à mourir adoptée en 2106 conforme.

Maintenant que cette sanction royale est accordée, cela signifie que les Canadiens qui souffrent de manière intolérable, mais qui ne sont pas près de mourir, ont d’ores et déjà le droit de demander l’aide médicale à mourir.

Depuis la promulgation de la loi canadienne sur l’aide médicale à mourir le 17 juillet 2016, il y a eu une forte hausse de la demande. Ce sont plus de 7000 Canadiens qui avaient eu recours à ce service en date d’avril 2019.

Une exception temporaire en cas de maladie mentale

(Photo : iStock)

Cet élargissement du régime canadien d’aide à mourir sera éventuellement accordé aux personnes souffrant de maladies mentales graves et irrémédiables.

Le gouvernement a cependant rejeté un amendement du Sénat visant à permettre aux personnes qui craignent de perdre leurs facultés mentales de faire des demandes anticipées de mort assistée. Ces personnes souffrant uniquement de maladies mentales devront attendre encore deux ans, soit en 2023, pour obtenir le même droit.

Durant cette période, le gouvernement s’est engagé à mettre sur pied un groupe d’experts chargé de le conseiller sur les garanties et les protocoles qui devraient s’appliquer aux personnes atteintes de maladies mentales.

Le gouvernement s’est également engagé à mettre sur pied, dans les 30 jours, un comité parlementaire pour examiner notamment la question de savoir si les mineurs devraient avoir accès à l’aide médicale à mourir.

Ce projet de loi s’est avéré l’un de ceux qui ont été les plus fortement débattus et contestés ces dernières années au pays.

Protéger les personnes racialisées

Pendant leur analyse de l’extension du régime canadien d’aide médicale à mourir, les sénateurs ont ajouté au projet de loi un amendement en raison des craintes exprimées par les personnes handicapées noires, radicalisées et autochtones.

Marginalisées et subissant souvent une discrimination systémique dans le système de santé, ces personnes craignaient que l’aide médicale à mourir puisse dans certaines conditions mettre fin prématurément à leur vie en raison de la pauvreté et du manque d’aide.

Un amendement garantira que le gouvernement et les responsables de la santé pourront à l’avenir fournir des réponses sur qui exactement a recours à l’aide médicale à mourir et dans quelles circonstances.

Un long débat qui a ses origines au Québec

Nicole Gladu, 73 ans, et Jean Truchon, 51 ans en 2019 (CBC)

Le projet de loi C-7 est la réponse législative à la décision de la juge Christine Baudouin, de la Cour supérieure du Québec, dans le dossier Truchon et Gladu.

À ce moment-là, la Loi québécoise concernant les soins de fin de vie réservait l’aide médicale à mourir aux seules personnes « en fin de vie », alors que la loi canadienne affirmait que l’aide médicale à mourir ne pouvait être offerte qu’aux personnes faisant face à « une mort naturelle raisonnablement prévisible ».

Tout cela a été remis en question devant la Cour supérieure afin que l’aide médicale à mourir soit offerte aux patients qui ne sont pas exclusivement en fin de vie. La Cour a entendu les témoignages de deux Québécois atteints de maladies dégénératives incurables, mais dont la science ne saurait prédire ou garantir la mort à court terme.

Nicole Gladu, qui souffre d’un syndrome post-poliomyélite, et Jean Truchon, atteint de paralysie cérébrale, contestaient le fait qu’on leur ait refusé l’aide médicale à mourir en 2016, sous prétexte que leur mort n’était pas imminente.

Leur avocat plaidait que le critère de mort « raisonnablement prévisible » était contraire aux articles 7 et 15 de la Charte canadienne des droits et libertés, qui garantissent respectivement le droit à la vie et à la sécurité et le droit à l’égalité.

Nicole Gladu est dans un déambulateur. Jean Truchon est en fauteuil roulant. Photo : Radio-Canada / Geneviève Garon

RCI avec La Presse canadienne et CBC News

Catégories : Politique, Santé, Société
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