Vivre ou survivre de son art?

Laurence Giroux-Do Photo : Radio-Canada/Martin Thibault

Alors que le Québec se targue d’être un laboratoire de créativité culturelle, la chanteuse du groupe Le Couleur, Laurence Giroux-Do, maintient qu’il faut avoir plusieurs cordes à son arc dans le domaine musical pour survivre. Elle a accepté ouvertement de parler de revenus à l’occasion du Mois du patrimoine asiatique.

Un reportage de Chu Anh Pham

« Cette année, pour la première fois, mes revenus de musicienne ont dépassé mes revenus de professeure de piano. Si j’avais juste un groupe de musique, je ne pourrais pas vivre juste de ça », explique Mme Giroux-Do. Elle enseigne le piano, participe à des chœurs et écrit des paroles pour d’autres artistes. « Tout ça mis ensemble me donne un revenu légèrement supérieur à la moyenne des statistiques de l’UDA [Union des artistes] », précise-t-elle.

Laurence Giroux-Do au piano Photo : Radio-Canada/Martin Thibault

Le revenu moyen des membres actifs de l’UDA a fléchi de 3,5 % en 2017 par rapport à l’année précédente, passant de 21 450 $ à 20 699 $. Le nombre de membres actifs a également chuté de 2255, pour s’établir à 6180. Signe d’une dure réalité?

Née d’une mère pianiste, Laurence baigne dans le domaine musical depuis sa tendre enfance. Ce n’est qu’à l’âge de 25 ans, après avoir abandonné le piano classique, qu’elle a formé un groupe de musique pop. Il n’en fallait pas plus pour attraper la piqûre. Pour son père, médecin d’origine vietnamienne, ce fut un choc.

« On a eu de grosses discussions. C’est sûr que pour les Vietnamiens, c’est important d’avoir des métiers qui amènent de l’argent pour entretenir la famille. » Alors que son conjoint fait aussi de la musique, elle jure que tout va bien financièrement. Même si elle ne peut se payer une copropriété comme tous ses autres amis, elle jure être heureuse avec sa fille, son appartement et son automobile.

Laurence Giroux-Do donne un cours de piano à une élève de 12 ans, Valentine Chapus, à l’École de musique enchantée. Photo : Radio-Canada/Martin Thibault

« Je ne suis pas fofolle avec l’argent. Je me lève le matin et j’ai le goût de travailler. »

À l’occasion du Mois du patrimoine asiatique, Radio-Canada présente chaque jeudi de mai un reportage pour mettre en valeur des travailleurs issus des communautés asiatiques en abordant différents enjeux de société canadiens.

Budget et redevances

Dans le dernier budget du gouvernement du Québec (2018-2019), l’enveloppe réservée au ministère de la Culture et des Communications s’élève à 778 millions de dollars, un bond de près de 20 % en 10 ans.

« Il y a un problème dans la [répartition] de la tarte. Les gros artistes ont beaucoup de subventions qui pourraient être attribuées aux plus petits. Les artistes, c’est comme une PME. Il faut les aider à démarrer; ils ont besoin de subventions. Si tu donnes tout aux gros joueurs, les petits joueurs vont mourir », indique Mme Giroux-Do.

Par ailleurs, Laurence Giroux-Do n’y va pas par quatre chemins pour écorcher les sites de musique en ligne. Elle cite en exemple le vidéoclip de sa chanson Femme, qui compte près de 4 millions de visionnements sur YouTube et pour lequel elle ne reçoit que de 2 $ à 5 $ par trimestre en redevances.

« On [est] en 2018, il faut faire avec les technologies qui arrivent, mais il faut aussi que ces technologies soient à l’écoute des artistes. »

Elle déplore également le manque de financement dans les établissements d’enseignement en évoquant la fermeture des programmes de musique au Collège Villa Maria et à l’École Madeleine-de-Verchères, à Montréal.

« Investissez [dans les] jeunes! Donnons-leur la chance de toucher à la musique. On leur laisse la flûte à bec et ça laisse vraiment un goût amer. Présentement, j’ai l’impression que la musique n’est jamais une option de carrière », déplore Laurence Giroux-Do.

Les artistes peuvent-ils vivre de leur art? Rencontre avec Laurence Giroux-Do.

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