A priori, Christine Lagarde n’a pas d’affinités avec la gauche. L’ancienne avocate d’affaires française a eu des portefeuilles économiques sous la présidence, très à droite, de Nicolas Sarkozy. L’institution qu’elle dirige, le FMI, n’est pas non plus reconnue pour ses penchants gauchistes. Mme Lagarde a eu aussi dans le passé de bons mots pour la gestion économique des conservateurs au Canada. Mais ses compliments sur les politiques économiques de Justin Trudeau ont passablement irrité les aspirants à la direction du Parti conservateur.
De passage à Ottawa, Christine Lagarde a vanté mardi la décision du gouvernement de Justin Trudeau d’augmenter le déficit budgétaire en injectant des milliards de dollars dans les infrastructures afin de stimuler l’économie canadienne.
Elle a dit notamment espérer que « les politiques canadiennes économiques puissent devenir virales et que cette énergie et cette passion pour l’ouverture soient suffisamment contagieuses, y compris au sein de l’Union européenne».
Il n’en fallait pas plus pour faire sursauter le candidat conservateur Tony Clement, qui accuse la directrice générale du Fonds monétaire international de propager des idées gauchistes.

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Selon le député ontarien, en épousant les idées économistes de gauche, le gouvernement de Justin Trudeau a accouché d’un plan qui tuera des emplois en faisant exploser les dépenses.
Et si Christine Lagarde le soutient, elle se range derrière « une idéologie gauchiste » et « elle a tort », car ce n’est « pas la voie à suivre », a-t-il martelé avant d’entrer dans la salle de réunion du caucus conservateur.
Lorsqu’on lui a fait remarquer que le FMI et sa présidente n’étaient pas exactement des figures de proue de la gauche, Tony Clement a dit qu’il se « fichait » de qui émanaient ces félicitations.
« Si tu mets de l’avant des théories fondées sur une idéologie gauchiste qui se traduit par plus de taxes et plus de dépenses, ça ne créera pas d’emplois . Et je défendrai toujours cela », a-t-il insisté.
L’autre aspirant à la succession de Stephen Harper, Maxime Bernier, n’est pas allé aussi loin. Mais il a lui aussi minimisé les compliments formulés par celle qui a été ministre de l’Économie au sein du gouvernement de droite de Nicolas Sarkozy, en France.

« C’est une keynésienne – théorie économique inventée par John Maynard Keynes selon laquelle l’implication active des gouvernements est la meilleure façon d’assurer la vitalité économique -, elle croit que les dépenses vont créer plus de richesses, mais c’est plutôt l’épargne et l’investissement qui vont créer la richesse », a plaidé le député de Beauce
« Le FMI a une position, a poursuivi M. Bernier, et c’est une position que je ne partage pas : inciter les pays à dépenser de l’argent ».
« Vous avez vu ce que ça a fait après la crise de 2007-2008, plusieurs pays ont dépensé de l’argent qu’ils n’avaient pas et actuellement, sont dans des positions financières et économiques difficiles », a conclu M. Bernier.
La porte-parole du Parti conservateur en matière de Finances, Lisa Raitt, s’est contentée de minimiser les propos de la patronne du FMI, disant qu’elle les avait tenus simplement pour des raisons diplomatiques.

« Elle est venue, elle a félicité le gouvernement au pouvoir. Elle a dit de belles choses de notre gouvernement, elle dit de belles choses sur ce gouvernement. Elle essaie probablement d’être diplomate », a dit l’autre candidate pressentie à la succession de Stephen Harper.
« C’est très bien qu’elle soit venue ici […] Par contre, c’est une chose de venir nous dire que c’est bien de dépenser, mais c’est une autre chose de venir nous dire comment nous allons le rembourser », a insisté Mme Raitt.
En visite à Ottawa, mardi, Christine Lagarde a félicité le gouvernement Trudeau pour son approche économique, qui colle, selon elle, avec celle que préconise l’institution internationale.
Les députés et les sénateurs du Parti conservateur sont réunis à Halifax, en Nouvelle-Écosse, en réunion pré-sessionnelle. Leur rencontre se conclut mercredi après-midi.
(Avec La Presse Canadienne)
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