Perquisition policière et saisie d’ordinateur au Journal de Montréal dénoncée en bloc par les journalistes
Par Stéphane Parent | francais@rcinet.ca Publié le vendredi 23 septembre 2016 à 07:42
Mis à jour le vendredi 23 septembre 2016 à 08:57
La communauté journalistique du Québec dénonce avec vigueur la perquisition menée par la Sûreté du Québec, mercredi soir, au Journal de Montréal et la saisie de l’ordinateur de son reporter judiciaire, Michaël Nguyen.
Michaël Nguyen
La Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) exige que les policiers rendre l’ordinateur au journaliste Michaël Nguyen et qu’ils renoncent à en analyser le contenu.
L’avocat du Journal de Montréal, Me Bernard Pageau, qualifié d’inacceptable pour sa part la démarche policière.
Il affirme que toute perquisition dans un média d’information constitue une entorse à la liberté de la presse et à la démocratie.
Les dessous de la descente policière au Journal de Montréal
La juge Suzanne Vadboncoeur
Les policiers sont intervenus à la suite d’une plainte du Conseil de la magistrature, selon lequel le journaliste aurait eu accès illégalement à des documents confidentiels.
Ce dernier cherche apparemment à connaître la source des informations qui ont permis à M. Nguyen de rapporter que la juge Suzanne Vadboncoeur aurait eu un comportement disgracieux à l’endroit de constables spéciaux au Palais de justice de Montréal, à la suite d’un souper de Noël, en décembre 2015.
La magistrate fait d’ailleurs l’objet d’une plainte au Conseil de la magistrature pour son comportement.
Un journaliste qui a fait son devoir en toute légalité
George Kalogerakis
Le journaliste Michaël Nguyen, qui lui ne fait l’objet d’aucune accusation, est blanchi par sa direction. Le directeur de l’information du Journal de Montréal, George Kalogerakis, affirme catégoriquement que le reporter judiciaire n’a posé aucun geste illégal pour obtenir ses informations.
Il fait valoir que Michaël Nguyen a simplement fait son travail en traitant d’un sujet qui est bel et bien d’intérêt public, la population étant en droit de savoir comment ses représentants se comportent.
Il a par ailleurs déclaré que le quotidien ne permettrait jamais que des démarches puissent en venir à démasquer ou punir des sources de ses journalistes et que le mandat de perquisition sera contesté.
L’ordinateur du journaliste a d’ailleurs été mis sous scellé et ne pourra être consulté avant que cette contestation ne soit entendue.
La Fédération des journalistes québécois parle d’intimidation judiciaire
Jean-Thomas Léveillé
Dans les heures suivantes, la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) a fait écho à ces propos et pressé la Sûreté du Québec de rendre l’ordinateur au journaliste Michaël Nguyen et de renoncer à toutes tentations d’en analyser le contenu.
Son président par intérim, Jean-Thomas Léveillé, a qualifié d’inadmissibles la perquisition et la saisie, estimant que cette volonté de démasquer une source d’information représente une tentative d’intimidation envers les journalistes et les sources elles-mêmes et que de chercher à faire taire les lanceurs d’alerte risque d’empêcher le public d’être bien informé.
La FPJQ rappelle au passage que la Cour suprême a elle-même reconnu l’intérêt de protéger les sources des journalistes, notamment dans l’affaire « Ma Chouette », du nom de l’informateur qui a permis au reporter Daniel Leblanc d’exposer au grand jour le scandale des commandites au gouvernement fédéral, au début des années 2000.
La Fédération souligne que les journalistes ne sont pas des informateurs de la police et que les corps policiers ne doivent pas se servir des journalistes pour accomplir leurs enquêtes.
Aide-mémoire… Que vaut la liberté de presse au Canada? – En tête de l’édition 2015 du Classement mondial de la liberté de la presse publiée par Reporter sans frontière figurent trois pays nordiques : la Finlande, première depuis cinq ans, la Norvège et le Danemark. – Le Canada figure aussi dans le peloton des dix premiers avec une 8e position sur 180 pays. – Pour le Canada, il s’agit en fait d’un redressement de situation par rapport à il y a trois ans. – Reporters sans frontières avait alors attribué une note de D- au gouvernement fédéral conservateur canadien de Stephen Harper pour son manque de transparence.
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