La Cour d’appel du Québec vient de rendre un jugement en faveur d’une automobiliste qui donne un grand pouvoir enfin à ceux qui voudront contester leur contravention. C’est une affaire qui risque de coûter des millions aux municipalités au Québec et même au-delà!

Photo : Radio-Canada
Dans un jugement de 27 pages rendu le 14 février, la Cour d’appel affirme que les infractions aux règlements de stationnement sont de responsabilité « stricte » et non pas « absolue ».
En langage plus familier : vous avez le droit à l’erreur que ce soit une mauvaise lecture des enseignes qui balisent les interdictions de stationner ou de vous tromper de parcomètre lorsque vous devez le nourrir.
C’est justement, l’erreur commise par une résidente de Saint-Jérôme, une petite ville au nord de Montréal, un jour de décembre 2014. Elle paye son stationnement, mais s’est trompée de parcomètre, et a reçu une contravention. Elle l’a contestée, mais elle a été condamnée par sa ville en Cour municipale, la Ville n’ayant jusqu’à aujourd’hui qu’à démontrer la présence du véhicule dans un espace interdit ou devant un parcomètre expiré.
Des juges sont pourtant parfois eux-mêmes mal à l’aise avec cette approche qui ne permettait au citoyen aucune marge d’erreur ni la possibilité de présenter une défense. La Cour d’appel du Québec a tranché. « Il faut éviter que le système de justice pénale soit source d’injustice ou soit perçu comme tel », écrit la Cour.
Éviter que le système de justice pénale soit source d’injustice… (la suite)

Le syndicat des policiers de Montréal proposait une campagne satirique de sécurité routière qui mettait en garde les automobilistes contre les quotas de contraventions imposés à ses membres. Une pratique qu’elle désignait sous l’appellation « Boni$ Deni$ » d’après le nom du maire d’alors, Denis Coderre. Photo : Simon-Marc Charron / Radio-Canada
Cette décision de la cour ainsi que l’affaire, l’an dernier, de la contestation des radars photo mal calibrés et non supervisés du ministère québécois des Transports, semblent donner des ailes aux automobilistes québécois qui ont parfois le sentiment d’être la proie des politiques fiscales de leurs divers paliers de gouvernement.
Certains s’attendent à ce que cette décision de la Cour d’appel fasse l’objet d’une contestation jusqu’en Cour suprême du Canada, car elle pourrait au final nuire aux revenus de milliers villes au pays.
Sur la base des arguments retenus par la Cour d’appel du Québec, une autre tactique qui pourrait faire l’objet d’une contestation judiciaire concerne les lucratifs quotas de contraventions.
Rappelons qu’un tel système de quotas a été éliminé, le mois dernier, par la nouvelle administration montréalaise de la mairesse Valérie Plante, tout comme les importants bonis au rendement pour les cadres, qui étaient liés à l’atteinte des objectifs par leurs policiers.
Les administrations municipales précédentes, particulièrement celle de l’ex-maire Denis Coderre, avaient officiellement nié l’existence d’un tel système, lequel faisait surtout l’objet de rumeurs de la part d’automobilistes qui soupçonnaient les policiers de prendre au piège des gens principalement pour engranger des revenus pour la Ville.

Une note de service destinée aux policiers de la Régie intermunicipale de police Richelieu Saint-Laurent, au sud-est de Montréal, dont Radio-Canada a obtenu copie, énonce clairement un objectif de 12 constats d’infraction par quart de travail, en prévision de l’été et de l’automne 2014.
Vous y comprenez quelque chose?

Photo : Radio-Canada
On pourrait pratiquement parler d’un constat d’échec quand la clarté est le critère d’évaluation de base de la signalisation en ce qui a trait au stationnement dans la seconde ville en importance au Canada.
La ville a fait son analyse l’an dernier et elle conclut en effet que chaque poteau affiche en moyenne 1,3 panneau. Certains peuvent en compter jusqu’à six!
Cela est propice à semer la confusion chez les visiteurs étrangers et chez les Montréalais qui doivent décrypter souvent à la noirceur ces ensembles de panneaux avant de déterminer si oui ou non ils peuvent se stationner à un endroit et pendant combien de temps. Les autorités de la ville le reconnaissent.
L’ex-maire Coderre affirmait en 2015 que la révision de la politique de stationnement permettrait d’améliorer la signalisation. « Si les enseignes sont mal faites, on va prendre le blâme et les changer. Je suis sensible à cette question d’assurer une meilleure signalisation. Il y a tellement [de panneaux] qu’une chatte perd ses petits là-dedans », avait-il dit.
RCI avec La Presse canadienne et la contribution d’Annie Desrochers, Karine Bastien, Alain Gravel, Bahador Zabihiyan et Danny Braün de Radio-Canada
En complément
Où distribue-t-on le plus de contraventions de stationnement à Montréal? – Radio-Canada
Montréal abolit le système de quotas de contraventions – Radio-Canada
Pour des raisons indépendantes de notre volonté et, pour une période indéterminée, l'espace des commentaires est fermé. Cependant, nos réseaux sociaux restent ouverts à vos contributions.