L’expertise de la compagnie canadienne BlackBerry dans la sécurité, la confidentialité et l’interconnectivité fait dire à son dirigeant que même si elle est prête à devenir l’un des acteurs mondiaux majeurs du marché émergent des véhicules autonomes et connectés, il pourrait s’écouler encore une décennie avant que ceux-ci deviennent courants.
Selon le président et chef de la direction, John Chen, l’entreprise ontarienne travaille pourtant activement avec plusieurs fabricants de pièces d’automobiles, développeurs de semiconducteurs et grands noms de l’industrie automobile, dont Ford Motors et Jaguar Land Rover pour favoriser une commercialisation plus rapide des véhicules autonomes.
« Disons qu’en 2021, nous n’en verrons pas beaucoup, si nous en voyons même une, a dit mercredi M. Chen lors de l’assemblée des actionnaires de BlackBerry. Ma prévision : une période d’encore 10 ans est probablement plus près de la vérité qu’une période de trois ans. »
Rappelons que BlackBerry QNX a lancé en octobre dernier une série d’essais routiers lors d’un événement décrit à l’époque comme le premier essai sur route d’un véhicule autonome au Canada.
Selon John Chen, ce n’est pas au niveau de la conduite automatique assistée que se situe le frein. Il croit que c’est la présence sur nos routes des véhicules complètement autonomes, contrôlés par réseaux sans fil, qui posent problème. Parmi les enjeux se trouvent ceux des politiques publiques, a-t-il précisé. Le problème en fait est autant international que national.
L’absence de politiques publiques et de normes internationales
M. Chen espère que des normes mondiales verront le jour, contrairement à celles qui font en sorte que certains pays conduisent du côté gauche et d’autres du côté droit de la route. Sans oublier que certains réseaux électriques utilisent 110 volts et d’autres, 220 volts.
BlackBerry est engagé dans les discussions entourant les normes de sécurité pour le Canada et les États-Unis. Mais la Chine, le Japon et l’Union européenne développent aussi leurs propres règles.
« Cela est entre les mains des politiciens, et non des fournisseurs de technologie. Mais nous allons assurément donner notre opinion. »
Dans un article en ligne récent, John Chen précisait sa pensée : « La réglementation et les normes de sécurité du gouvernement fédéral sont essentielles pour mettre l’accent sur la sécurité et mettre en œuvre les avantages prévus des véhicules autonomes. Sans eux, la technologie risque d’être disponible avant que nous soyons préparés. »
REPORTAGE
ÉcoutezBeaucoup de travail encore en travers de notre route au Canada
Rappelons d’abord, que l’hiver dernier, des sénateurs membres du Comité permanent des transports et des communications jugeaient dans un rapport que les véhicules autonomes risquent de prendre les gouvernements de court comme l’a fait Uber s’ils ne se préparent pas dès maintenant à légiférer.
L’affaire exigera selon eux de grands efforts de coordination, ne serait-ce qu’entre le gouvernement central et les provinces et territoires. Si le gouvernement fédéral est responsable d’assurer la sécurité de cette nouvelle technologie, les provinces sont quant à elles responsables de l’application du Code de la route.
Le comité du Sénat canadien a averti dans son rapport que les divers ministères et paliers de gouvernement adoptaient déjà des approches contradictoires dans le dossier des véhicules autonomes. Il a fait valoir que le gouvernement fédéral devait effectuer une meilleure coordination.
Aux États-Unis, le gouvernement fédéral a émis des lignes directrices volontaires pour les entreprises qui veulent effectuer des essais sur des véhicules autonomes, ce qui transfère une grande partie de la réglementation aux États.
L’humain ou la machine? Qui est responsable de la mort d’un piéton?
Tout l’aspect de la responsabilité lors d’un accident reste bien souvent une zone grise d’un bout à l’autre du pays.
Le conducteur pour le moment serait le seul et unique coupable au Canada. Le plus important cabinet d’avocats du pays, Borden Ladner Gervais, estime en effet que tant que les véhicules dits autonomes seront munis d’un volant, les Canadiens devront assumer toute la responsabilité d’un accident, sans pouvoir accuser l’informatique à bord.
Puisque le conducteur a toujours la possibilité de « reprendre le contrôle » du véhicule, sa responsabilité juridique semble inchangée dans les cas de négligence criminelle ou de responsabilité civile, conclut le rapport.
RCI avec La Presse canadienne, l’Agence France-Presse et la contribution d’Alain Gravel, Philippe Marcoux, Olivier Bachand, André Bernard, Gérald Fillion, Catherine Perrin et Florence Gaineau de Radio-Canada
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