Des travailleurs manipulent de la l'amiante Photo : Reuters

Scientifiques et médecins du Monde pressent le Québec à renoncer à l’amiante

Quarante et un scientifiques, médecins et représentants d’organismes de partout dans le monde signent une lettre adressée au premier ministre du Québec François Legault. Ils réclament que son gouvernement se dissocie de l’industrie mondiale de l’amiante, dont le Québec est encore un participant majeur.

Ils dénoncent le fait que l’Association internationale du chrysotile (AIC), le lobby mondial de l’amiante, soit enregistrée au Québec comme personne morale à but non lucratif (OBNL). Selon les signataires, « la crédibilité du Québec est utilisée de manière immorale et destructrice pour répandre des informations faussement scientifiques qui mettent en danger la vie humaine ».

Selon les signataires, l’AIC répand « une désinformation dangereuse qui cause des dommages et des décès ». En entrevue à La Presse canadienne, elle ajoute que cette organisation détruit l’éducation, détruit la science et détruit la santé.

« L’AIC promeut l’affirmation fausse que l’amiante chrysotile est un excellent produit qui peut être utilisé de manière sécuritaire par les pays en voie de développement. Un produit que le Canada a interdit parce que c’est un produit dangereux qu’il n’est pas possible d’utiliser de façon sécuritaire », peut-on lire dans la lettre dont le texte fait cinq pages.

Les signataires réclament donc que le gouvernement mette fin à la « complicité » du Québec avec « la malfaisance indéfendable de l’industrie de l’amiante » en lui retirant son statut.

Aide-mémoire
Le gouvernement québécois a récemment confié un mandat d’enquête publique au Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) visant à déterminer de manière scientifique si les 800 millions de tonnes de déchets laissés par l’industrie de l’amiante au Québec peuvent être commercialisés ou non de manière sécuritaire.

L’étau se resserre sur l’amiante au Canada, mais il n’est pas complètement interdit

Le Canada interdit maintenant l’amiante dans les nouvelles constructions et les rénovations. La fin de l’amiante était en fait presque dans les cartes dès le moment où le gouvernement de Justin Trudeau est arrivé au pouvoir en novembre 2015. Notre pays est en retard sur plusieurs autres dans ce dossier.

L’amiante, considéré comme un produit cancérigène par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), a été banni dans une cinquantaine de pays.

Le Canada a été lent pourtant à reconnaître les menaces posées par l’amiante, peut-être parce que pendant très longtemps, il se retrouvait au cœur du développement économique du Québec, en particulier. Les mines d’amiante ont fonctionné au Canada de la fin des années 1800 jusqu’en 2011.

Des générations de mineurs s’engouffraient ainsi sous terre ou travaillaient à l’air libre dans d’immenses trous, dans des mines appelées « open pit » dans les régions de Thetford Mines, d’Asbestos, de Disraeli ou de Black Lake, à la recherche de ce minerai réputé essentiel pour ses propriétés ignifuges et structurelles.

Au Canada, on estime que le tiers de tous décès liés au travail sont directement attribuables à une exposition à l’amiante.

Il y a de l’amiante du Québec partout dans le monde

L’utilisation de l’amiante a été condamné par l’OMS, qui affirme depuis des années que tous les types d’amiante, y compris le chrysotile que l’on retrouve dans le sous-sol québécois, sont cancérigènes.

Une cinquantaine de pays, dont presque la totalité des pays européens, ont depuis interdit tous les produits à base d’amiante sur leur territoire. Photo : FTQ Interdiction de l’amiante : le Canada a adopté de nouvelles règles minées par plusieurs exemptions

En 2016, le gouvernement canadien de Justin Trudeau avait initialement interdit complètement l’amiante. Ottawa affirmait en janvier dernier cependant que l’exigence de retirer tout l’amiante des immeubles et des maisons serait extrêmement coûteuse. Cela pourrait en réalité être plus dommageable pour la santé humaine.

Une nouvelle réglementation, adoptée l’automne dernier, comporte ainsi une série d’exemptions pour permettre aux militaires, aux installations nucléaires et aux usines de chlore et de soude caustique de continuer à utiliser la substance dangereuse pour la santé pulmonaire et pour plusieurs années à venir.

La réglementation canadienne interdit l’importation, la vente et l’utilisation de fibres d’amiante transformées ainsi que la fabrication, l’importation, la vente et l’utilisation de produits contenant des fibres d’amiante transformées. Cependant, le règlement n’interdira pas les activités minières et ne s’appliquera pas aux structures ni aux produits qui contiennent déjà de l’amiante.

Une des exemptions permet cependant l’exploitation de montagnes de résidus miniers qui contiennent encore jusqu’à 40 % de dangereuses fibres d’amiante. Voyez comment cette exemption au règlement sur l’interdiction de l’amiante au Canada promet cependant de relancer les économies des villes de Thetford Mines et d’Asbestos au Québec…

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RCI avec La Presse canadienne et la contribution de Radio-Canada

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Catégories : Économie, Environnement et vie animale, International, Politique, Santé
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