L'un des blocages autour de la communauté mohawk de Kanesatake, 65 kilomètres à l'ouest de Montréal. (Photo : Mohawk Council of Kanesatake)

Déconfinement : les Autochtones du Canada veulent prendre part aux décisions

La grande majorité des Premières Nations du Canada a pris des mesures exceptionnelles, comme le confinement, des points de contrôle et des couvre-feux pour freiner la propagation de la pandémie. La plupart d’entre elles disent qu’il reviendra à elles seules de revoir leurs décisions pour une levée partielle ou complète de ces mesures.

En réaction aux annonces rendues publiques mercredi par la vice-première ministre du Québec, Geneviève Guilbault, sur la levée du confinement régional, l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador (APNQL) demande au gouvernement du Québec d’inclure les autorités des Premières Nations qui sont directement touchées par la décision.

« Mettre fin au contrôle de la circulation en région n’est pas sans inquiéter nos dirigeants, qui n’ont rien ménagé depuis le début de la crise pour limiter la propagation de la COVID-19 au sein de leurs populations. Au-delà d’un plan de relance économique, nous demandons que les autorités en santé publique et le gouvernement associent étroitement nos autorités afin que les actions soient conformes à leur réalité et à leurs attentes »Ghislain Picard, chef de l’APNQL.

Ghislain Picard, chef de l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador (Photo : Radio-Canada)

Les annonces faites mercredi par le gouvernement du Québec ne peuvent pas et ne doivent pas signifier un retour à la normale, a dit le chef Picard.

« Les mesures que mettent en place nos communautés pour protéger leurs populations doivent être appuyées à la hauteur des facteurs de risque qui rendent celles-ci les plus vulnérables face à la pandémie » Ghislain Picard, chef de l’APNQL.

Pour sa part, la cheffe Adrienne Jérôme de la Première Nation de Lac Simon, une communauté anichinabée située dans le centre-ouest du Québec, près de la frontière avec l’Ontario, a déclaré que l’accès aux régions « est un danger de recontamination, les gens des grandes régions pourraient se réfugier là où il y a moins de COVID-19. Le danger est trop grand », a-t-elle dit.

Les Premières Nations canadiennes en temps de COVID-19 

Image tirée d’un document produit par la Commission de la santé et des services sociaux des Premières Nations du Québec et du Labrador / Graphisme et illustrations : Patricia Carignan

La courbe du coronavirus au Canada est plate, mais certaines tendances inquiétantes se dessinent, notamment les foyers d’épidémie dans les communautés autochtones vulnérables, a déclaré jeudi la médecin en chef du Canada, Theresa Tam.

« Cette semaine, les choses ont été un peu calmes. La courbe de la COVID-19 est plate, mais nous devons être très prudents en allant de l’autre côté de la courbe épidémique. Déjà sur cette trajectoire nous avons vu des tendances inquiétantes de transmission », a-t-elle déclaré, en citant l’augmentation du nombre de cas dans les communautés autochtones éloignées dans plusieurs des 10 provinces du Canada.

Le nombre de décès quotidiens au Canada a augmenté de 10 % ou plus seulement une fois au cours des 11 derniers jours. Le nombre total de personnes tuées par le coronavirus a augmenté de 6 % à 3082 en un jour, selon les données officielles présentées jeudi.

Selon les responsables canadiens de la santé, le virus se propage rapidement dans des environnements où sont souvent rassemblées des personnes vulnérables, notamment dans les résidences pour personnes âgées, les prisons et les régions éloignées du pays où les soins de santé sont déjà inégaux.

Informations sur la pandémie par région canadienne

Il n’y a actuellement aucun cas positif de coronavirus dans les Premières Nations du Manitoba, mais le nombre de cas dans les réserves de Colombie-Britannique, de la Saskatchewan, de l’Ontario et du Québec est passé à 52 en date du 19 avril selon Indigenous Services Canada. Un décès a également été signalé la semaine dernière dans les Six Nations de la rivière Grand, dans le sud de l’Ontario.

La majorité des cas sont au Québec. C’est pourquoi Serge Simon, le grand chef du Conseil des Mohawks de Kanesatake, envisage d’engager une trentaine de membres de la communauté pour occuper les postes de contrôle dans la communauté mohawk au nord-ouest de Montréal.

Il n’y a pas de cas positif à Kanesatake, mais la communauté a fermé ses dispensaires de cannabis et ses bureaux de tabac le mois dernier pour limiter le trafic non local. L’application de la loi a été un problème, a déclaré M. Simon, car Kanesatake n’a pas sa propre force de police.

Grand Chef de Kanesatake Serge Simon (Photo d’archives : THE CANADIAN PRESS/Ryan Remiorz)

« Nous essayons d’empêcher les agences extérieures de nous imposer leur juridiction, donc si nous ne le faisons pas pour nous, cela laisse un vide et une opportunité pour la province de prendre le relais », a déclaré le chef Simon à CBC News.

« Nous voulons dire aux clients qui viennent ici de s’arrêter, de faire demi-tour et de rentrer chez eux. Quand tout cela sera terminé, nous ne voulons pas que nos entreprises en souffrent. Nous voulons nous assurer que lorsqu’ils font demi-tour, ils le font poliment et selon des directives strictes ».Serge Simon

Akwesasne, une communauté mohawk qui chevauche les frontières du Québec, de l’Ontario et de l’État de New York, a également promulgué cette semaine une loi d’urgence sur le couvre-feu, qui oblige les membres à rester à l’intérieur entre 22 h et 6 h.

« Nous nous attendons à ce que les gouvernements provincial et fédéral demeurent au rendez-vous pour soutenir les actions qui seront prises par nos autorités qui priorisent la santé et la sécurité de leurs membres et leurs familles », a conclu le chef de l’APNQL.

La nation crie d’Opaskwayak, près de The Pas, au Manitoba, a adopté une motion visant à expulser les locataires qui continuent de désobéir aux règles d’éloignement physique en organisant de grands rassemblements, des fêtes à domicile ou en vendant des drogues illicites.

La communauté a également instauré un couvre-feu de 22 h à 6 h et a engagé plus d’une douzaine de membres pour assurer la sécurité. M. Sinclair a déclaré qu’en fonction de la situation, des avertissements verbaux, des avertissements écrits ou une amende de 100 $ pouvaient être délivrés.

Pour en savoir plus : 

RCI avec l'Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador, Reuters et CBC News. 
Catégories : Autochtones
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