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Aide médicale à mourir : contre tout report de l’adoption du projet de loi C-7

L’Association québécoise pour le droit de mourir dans la dignité (AQDMD) s’oppose au report de l’adoption du projet de loi C-7 qui étend l’accès de l’aide médicale à mourir au Québec et au Canada. Par la voix de son président Georges L’Espérance, cette Association a adressé une lettre ouverte à Christine Baudouin.

Se basant sur un jugement historique de la Cour suprême du Canada, le 6 février 2015, dans l’affaire C-Carter, Mme Baudouin, de la Cour supérieure du Québec, a rendu une décision l’année dernière concernant l’accès à l’aide médicale à mourir, avec une incidence importante au Québec et au Canada. Elle s’est notamment penchée sur le cas d’un couple montréalais, Nicole Gladu et Jean Truchon (Jean Truchon a finalement bénéficié de l’aide à mourir récemment). Tous deux sont frappés par des maladies dégénératives incurables et souhaitaient pouvoir en bénéficier, mais les textes de loi au Québec et au Canada ne le permettaient pas. Le jugement de Mme Baudouin leur a finalement accordé une exemption constitutionnelle.

La juge Baudouin avait statué que le critère de « problème de santé grave et irrémédiable causant des souffrances persistantes et intolérables, physiques ou psychiques », dans le jugement de la Cour suprême du Canada, n’était pas limitatif dans le temps, contrairement au critère de « fin de vie » dans la Loi québécoise en vigueur au moment du jugement.

Par ailleurs, en ce qui concerne la Loi canadienne en vigueur depuis le 16 juin 2016, le critère de « mort naturelle raisonnablement prévisible » relevait d’une contradiction, a souligné la juge Baudouin, qui a dénoncé le caractère inconstitutionnel des deux critères et appelé à une révision des deux lois dans un délai de six mois.

Dans la foulée de cette décision, au fédéral, le ministre de la Justice a procédé au dépôt du projet de loi C-67 qui propose des modifications au Code criminel sur l’aide médicale à mourir, à la suite de consultations auprès des Canadiens, d’experts, de praticiens, de groupes autochtones et d’autres intervenants dans les provinces et territoires.

« Selon ces modifications, le critère de mort naturelle raisonnablement prévisible est retiré, et l’admissibilité de personnes souffrant uniquement d’une maladie mentale est exclue »

Le président de l’AQDMD estime qu’au moment où il faut passer à la vitesse supérieure, en adoptant le projet de loi C-7 qui viendra rectifier le tir et permettre en définitive aux personnes de bénéficier librement de l’aide médicale à mourir, le gouvernement fédéral ne devrait pas reporter l’échéance parce que la pandémie de la COVID-19 aurait empêché les discussions.

Il faut mentionner qu’après le jugement du 11 septembre 2019 et le délai de six mois arrêté par la juge Baudouin, Ottawa s’est vu accorder une prolongation additionnelle de 4 mois, en raison des élections de novembre 2019, à la demande du procureur général du Canada. Cela signifierait en clair que les critères abrogés ne devraient plus en principe s’appliquer au Québec à compter du 12 juillet.Selon le président de l’AQDMD, le gouvernement chercherait à obtenir un autre prolongement jusqu’en fin de 2020, ce qui ne serait pas de nature à satisfaire les intervenants qui ont contribué aux consultations en vue de l’élaboration d’un projet de loi C-7 dépourvu de barrières, mais avec des protections nécessaires pour les personnes admissibles, contrairement à l’actuelle Loi, en vigueur depuis quatre ans.
« Sachant très bien que vous décidez seulement en respectant les règles juridiques, nous vous demandons cependant d’écouter aussi votre cœur comme vous avez si bien su le faire avec Mme Gladu et feu monsieur Truchon et considérer un délai très court, voire aucun », a affirmé le président de l’AQDMD, qui interpelle ainsi la juge Chritine Baudouin afin qu’elle s’oppose au report.

À noter qu’au Québec, le critère de « fin de vie » ne s’applique plus depuis le 12 mars 2020, mais que la province doit attendre jusqu’au 12 juillet pour cesser d’appliquer le critère de « mort naturelle raisonnablement prévisible » comme prévu dans le Code criminel du Canada.

« En refusant cette nouvelle prolongation inutile, vous donnez à tous les patients qui souffrent, en particulier de pathologies dégénératives, l’espoir qu’ils sont entendus et accompagnés par des soignants compatissants et à l’écoute de leur réalité tel que la Cour suprême et vous l’aviez bien compris », a conclu Georges L’Espérance, dans le communiqué.

Avec des informations de l’AQDMD, du ministère de la Justice du Canada

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Catégories : Santé
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