Le Conseil scolaire public anglais de Toronto, en Ontario, envisage de supprimer dès la rentrée prochaine les programmes d’immersion française au primaire, faute d’enseignants. Une décision dénoncée par plusieurs organismes franco-ontariens.
La pandémie de COVID-19 a forcé la réorganisation des cours. Alors que la province compte engager davantage de professeurs pour répondre aux coûts liés à la diminution de la taille des classes, on craint que ce soit la langue française qui écope pour faire des économies.
En conférence de presse mercredi, le premier ministre ontarien Doug Ford a confirmé que le Conseil scolaire du district de Toronto (TDSB), qui gèrent près de 600 écoles et plus de 250 000 élèves, recevra cette année 55 millions de dollars de plus que l’année précédente, dont 23 millions spécifiquement consacré à l’embauche de personnel.
Une somme insuffisante pour le TDSB qui envisage à la fois des réductions de services et des besoins financiers beaucoup plus importants. « Si le Conseil scolaire du district de Toronto devait intégrer des cohortes de 15 élèves ou moins, ça voudrait signifier un montant de 250 millions de dollars », a déclaré en entrevue à Radio-Canada Ryan Bird, directeur des communications au conseil.
Un plan controversé
Dans un plan qui détaille les différents scénarios à l’étude pour la rentrée scolaire de septembre, le TDSB prévoit la possibilité de ne pas offrir l’enseignement de la langue de Vigneault dans ses classes.
Avant d’être accepté, ce plan doit d’abord passer plusieurs étapes préliminaires. Après avoir été approuvé par les conseillers du TDSB – le plus grand conseil scolaire au Canada – il doit être soumis début août au ministère de l’Éducation qui est seul habilité à valider ou non le plan.
Même si le Commissaire aux langues officielles, Raymond Théberge, admet que « le contexte exceptionnel causé par la pandémie de COVID-19 peut entraîner des coûts opérationnels supplémentaires pour beaucoup d’organisations », il espère que tous les conseils scolaires trouveront des solutions leur permettant de continuer « d’offrir des cours de français et d’immersion française aux élèves fréquentant leurs écoles ».
Le commissaire a ajouté sur son compte Twitter que de donner aux élèves la chance d’apprendre une des deux langues officielles du Canada, cela leur permet de s’ouvrir l’esprit sur d’autres manières de penser le monde.
« C’est un élément fondamental pour favoriser la dualité linguistique, un des piliers sur lequel repose la société canadienne », a-t-il écrit.
3/4 « Offrir l’accès à l’éducation dans sa deuxième langue officielle permet aux enfants d’apprendre et de grandir en s’exposant à une autre langue et à une autre manière de penser. » – RTh
— CLO du Canada (@CLOduCanada) July 15, 2020
Selon l’organisme Canadian Parents for French, qui fait la promotion de l’apprentissage du français comme langue seconde pour les jeunes du Canada, la suppression des programmes d’immersion française est une mauvaise idée pour répondre au défi de la rentrée scolaire.
La directrice de l’organisme, Nicole Thibault, a déclaré qu’il est toujours possible d’enseigner les programmes d’immersion française s’il existe une réelle volonté politique. « On sait qu’il y a des fonds disponibles, alors je suis très inquiète encore une fois de voir qu’il est devenu soudainement trop difficile d’enseigner le français », a-t-elle dit.
Mme Thibault précise que la difficulté d’engager des enseignants francophones était déjà une réalité, et bien avant la pandémie. Elle souligne que des stratégies ont été mises en place pour favoriser et faciliter le recrutement, notamment grâce à des fonds fédéraux débloqués par le ministère du Patrimoine.
En attendant, l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) qualifie ce plan d’« inacceptable ». Le président Carol Jolin a mentionné que le fait de proposer l’élimination de l’enseignement d’une des deux langues officielles au Canada est impensable.
« Nous faisons confiance au ministre de l’Éducation pour prendre la bonne décision dans ce dossier, que nous suivrons de très près. Et nous demandons au Toronto District School Board d’arrêter d’utiliser les langues officielles comme moyen de pression pour atteindre ses objectifs. »
Même son de cloche du côté de l’Association canadienne des professionnels de l’immersion (ACPI) qui se dit « outrée ». Il prévient que les conséquences d’une telle proposition « peuvent être catastrophiques pour la pérennité des programmes d’immersion et de l’apprentissage des élèves de la seconde langue officielle du pays ».
1/5 Le plan proposé par le @tdsb est totalement inacceptable. Au sein d’un pays bilingue, proposer l’élimination de l’enseignement de l’une des deux langues officielles est impensable. https://t.co/Z2eETWPWdj
— L’Assemblée (@MonAssemblee) July 15, 2020
Avec Radio-Canada
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