En Ontario, les conseils scolaires francophones sont sous le choc après que le gouvernement provincial a décidé de confier presque incognito la gestion de l’apprentissage en ligne en français à son diffuseur public TFO. Un véritable affront pour les conseils scolaires qui coordonnent ces services depuis plus de 10 ans.
Sans avertissement ni consultation, le gouvernement de Doug Ford a pris une décision qui suscite la grogne dans le milieu scolaire franco-ontarien. C’est à travers l’annexe 15 du controversé projet de loi omnibus 197 que la province compte confier à son diffuseur public TFO, « la création, l’administration et la coordination » des programmes francophones d’enseignement à distance.
Les conseils scolaires francophones n’ont jamais été mis au courant de cette décision gouvernementale, même s’ils détiennent le mandat de l’enseignement à distance par l’entremise du Consortium d’apprentissage virtuel de langue française de l’Ontario (CAVLFO).
« Ce qui est surtout triste, c’est de perdre une expertise déjà en place », a déclaré en entrevue à Radio-Canada Yves Lévesque, directeur général de l’Association franco-ontarienne des conseils scolaires catholiques.
M. Lévesque s’interroge également sur la raison d’une telle décision, alors qu’il existe selon lui des solutions. « C’est une décision qui n’a peut-être pas été prise en réfléchissant à tous les aboutissants. Des solutions existent déjà et fonctionnent, pourquoi transférer ça à un troisième partenaire », a-t-il confié.
Cours de français en ligne confiés à TFO
« Je doute qu’ils aient toute l’expertise. Lorsqu’on parle de matériel pédagogique, ce n’est pas la même chose. »@MichelBherer en discute avec Johanne Lacombe, présidente, Association franco-ontarienne des conseils scolaires catholiques pic.twitter.com/UBqZPndSmi
— Radio-Canada Info (@RadioCanadaInfo) July 28, 2020
Le groupe média TFO, qui produit déjà du contenu éducatif francophone en ligne, est selon le gouvernement mieux outillé pour moderniser le service. La ministre des Affaires francophones de l’Ontario, Caroline Mulroney, veut ainsi améliorer l’apprentissage pour les étudiants francophones de la province. « En vue de l’expérience de la pandémie, c’est essentiel que la qualité de l’apprentissage en ligne soit la plus haute possible », a-t-elle dit mardi en conférence de presse.
De plus, les cours en ligne sont donnés par des professeurs franco-ontariens syndiqués. La chaîne TFO ne peut garantir que ce modèle sera conservé à long terme. « C’est un peu tôt pour s’engager, a rétorqué Éric Minoli, directeur général des opérations pour le Groupe Média TFO. Ce qui est important, c’est que tous les partenaires s’assoient pour se consulter, aussi bien les conseils scolaires que les syndicats. »
TFO est une chaîne de télévision éducative et culturelle de langue française de la province canadienne de l’Ontario, diffusant principalement des émissions pour enfants, des documentaires et du cinéma de répertoire. Le Groupe Média TFO, qui exploite TFO, produit et diffuse aussi du contenu numérique complémentaire à ses émissions, disponible sur le web et sur des appareils mobiles.
(Source : Encyclopédie)
Pour l’opposition officielle, cette affaire représente un nouvel affront aux droits de détermination des francophones de l’Ontario. « Les conseils scolaires ont été élus pour développer nos droits et notre éducation en français », a lancé sur les ondes de Radio-Canada Guy Bourgouin, porte-parole du NPD de l’Ontario en matière d’affaires francophones.
Certains affirment même que la décision du gouvernement pourrait contrevenir à la Charte canadienne des droits et libertés. L’avocat en droit constitutionnel et linguistique, Gabriel Poliquin, rappelle d’ailleurs qu’en 1990 avec l’arrêt Mahé, la Cour suprême du Canada a clairement stipulé que les communautés de langues officielles minoritaires du pays ont droit à la gestion et au contrôle des établissements scolaires.
Sans fournir d’échéancier précis, le gouvernement promet toutefois de consulter les conseils scolaires. Ces derniers espèrent toujours conserver leur droit de regard sur les contenus pédagogiques.
Le nouveau mandat de TFO, qui va gérer les cours en ligne en français, pourrait enfreindre l’arrêt Mahé (1990), qui donne le droit aux francophones de gérer leurs écoles. « Les conseillers scolaires sont élus. TFO n’est pas contrôlé par la minorité franco »-@GabrielPoliquin #onfr pic.twitter.com/0pS2COvoLy
— Natasha MacDonald-Dupuis (@NatashaCBC_RC) July 28, 2020
Avec Radio-Canada et RDI
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