Tristen Durocher 24 ans, a marché 639 kilomètres depuis Air Ronge, dans le nord du Saskatchewan, jusqu'à Regina, la capitale provinciale, où il a entamé une grève de la faim de 44 jours pour protester contre le rejet par le gouvernement provincial d'un projet de loi sur la prévention du suicide. (The Canadian Press/Michael Bell)

Suicide chez les Autochtones : fin d’un long jeûne pour un activiste canadien

C’est après 44 jours de grève de la faim et 639 kilomètres parcourus à pied que Tristen Durocher a mis fin à sa campagne de sensibilisation au suicide chez les Autochtones qui sévit dans la province de la Saskatchewan.

Dimanche, le jeune autochtone a démantelé le tipi qu’il avait installé le 31 juillet devant le parlement de la capitale provinciale, Regina, après son pèlerinage depuis sa communauté d’Air Ronge.

La campagne qu’il a appelée « Walking with our Angels » a été lancée en réponse à un projet de loi sur la prévention du suicide présenté par le Nouveau Parti démocratique et rejeté par 44 députés du gouvernement provincial.

En novembre dernier, la Première Nation Makwa Sahgaiehcan a déclaré l’état d’urgence après que trois enfants, dont le plus jeune avait 10 ans, se sont suicidés sur une période de 3 semaines.

Des événements similaires se sont produits dans la nation Ochapowace, où trois personnes se sont également enlevées la vie en un mois l’année dernière, et dans d’autres villages du nord de la Saskatchewan.

Selon Statistique Canada, le taux de suicide chez les Autochtones est nettement plus élevé que celui des populations non autochtones.

Entre 2011 et 2016, le taux de suicide chez les Premières Nations était trois fois plus élevé que dans la population non autochtone.

Du côté des Métis, il était presque deux fois plus élevé, et il était neuf fois plus élevé chez les Inuit du Grand Nord canadien.

Au Canada, les taux de suicide chez les Premières Nations, les Métis et les Inuits sont toujours plus élevés que celui observé au sein de la population non autochtone. Toutefois, les taux de suicide varient selon la communauté, le groupe autochtone, le groupe d’âge et le sexe. (Source : Statistique Canada)

La province a besoin d’un nouveau gouvernement qui ne soit pas « indifférent » ou « insensible »

Dans une interview accordée à CBC News, Tristen Durocher a dit qu’il espérait qu’un jour, une loi significative sur la prévention du suicide soit adoptée en Saskatchewan. Il souhaiterait que le ministère de la Santé ou l’Autorité sanitaire de la province s’engagent à lutter contre ce fléau.

« Lorsque je suis arrivé à Regina, aucun politicien n’est venu me souhaiter la bienvenue, j’ai été accueilli par un officier armé de la Commission de la capitale provinciale qui avait une copie surlignée des réglementations, me disant que je ne pouvais pas monter mon tipi. Je l’ai fait quand même et maintenant ils doivent rédiger de nouveaux statuts parce qu’ils ont été déclarés inconstitutionnels. »Tristen Durocher

Le gouvernement a poursuivi Durocher en justice après que le jeune de 24 ans eut commencé à camper dans un tipi dans le parc devant le parlement.

Les avocats du gouvernement ont fait valoir que Durocher violait les lois du parc qui interdisent le camping de nuit et ont déclaré que sa présence représentait un risque pour la sécurité.

Le juge Graeme Mitchell a rejeté la demande du gouvernement pour une ordonnance d’expulsion de Durocher, en disant que les statuts du parc et le mandat de perquisition contre lui étaient inconstitutionnels.

Par ailleurs, Tristen Durocher estime que son séjour devant le bâtiment de la législature de la Saskatchewan a été formateur.

« J’ai beaucoup appris sur l’état d’esprit actuel du public canadien à l’égard des Autochtones. Et j’ai beaucoup appris sur la réticence du gouvernement à reconnaître les nombreux problèmes qui affligent la partie nord de notre province. »

Cela m’a permis non seulement d’en savoir plus sur tous les gens qui se battent pour les mêmes choses que moi, mais aussi de découvrir ce pour quoi les peuples autochtones se battent dans le cadre de notre chemin vers la réconciliation. » Tristen Durocher

Il a ajouté que de nombreux citoyens ne sont pas prêts à « faire ne serait-ce qu’un petit pas » vers l’objectif de la réconciliation.

C’est dans ce tipi que Tristen a passé les 44 jours de protestation et de grève de la faim devant l’Assemblée législative de la Saskatchewan. Autour du tipi se trouvaient des photos de plusieurs jeunes autochtones qui se sont récemment enlevé la vie dans la province. (Photo : Sheryl Kimbley, amie de Tristen Durocher)

Cette année, la Saskatchewan a lancé son plan de prévention du suicide

En mai 2020, Warren Kaeding, ministre de la Santé des régions rurales et éloignées de la Saskatchewan, a publié « Pillars for Life », le plan de prévention du suicide de la province qui, selon lui, représente une approche collaborative pour « promouvoir la vie et réduire les facteurs de risque ».

« La santé mentale reste une priorité pour notre gouvernement, notre système de soins de santé et nos communautés. Ce plan guidera des activités spécifiques de prévention du suicide en fonction du contexte de la Saskatchewan. Il est le fruit d’un examen attentif des approches nationales et des meilleures pratiques internationales. »Warren Kaeding

Les actions décrites dans le plan comprennent l’extension de l’utilisation et du suivi des protocoles de suicide, et l’amélioration de la recherche, des données et de la surveillance pour la prévention du suicide au niveau local.

La Saskatchewan est l’une des six provinces qui ont mis en œuvre le programme Roots of Hope de la Commission canadienne de la santé mentale. Roots of Hope a été établi dans trois communautés de la Saskatchewan : La Ronge, Meadow Lake et Buffalo Narrows.

« En tant que psychiatres, nous sommes bien sûr très préoccupés par le taux de suicide élevé en Saskatchewan », a déclaré le Dr Malin Clark, président par intérim du département provincial de psychiatrie de l’Université de Saskatchewan.

Selon lui, il est nécessaire d’élaborer un plan global qui ne se limite pas à la fourniture de services de santé mentale améliorés, mais qui s’attaque également aux facteurs sociaux qui contribuent au désespoir et à l’augmentation du risque de suicide, à mesure que nous progressons dans nos efforts pour modifier cette statistique.

Avec des informations de la page Facebook de Tristen Durocher, de Statistique Canada, du gouvernement de la Saskatchewan et de CBC News. 


En complément :

Catégories : Autochtones, Santé, Société
Mots-clés : , , , , , , , ,

Vous avez remarqué une erreur ou une faute ? Cliquez ici !

Pour des raisons indépendantes de notre volonté et, pour une période indéterminée, l'espace des commentaires est fermé. Cependant, nos réseaux sociaux restent ouverts à vos contributions.