Une équipe de chercheurs de l'Université de Montréal a été capable de percer certains secrets des neurones et a découvert les mécanismes dont ils se servent pour stocker ou effacer des informations. (Photo : iStock/ismagilov)

Comment notre cerveau arrive-t-il à créer ou à supprimer des souvenirs?

Le cerveau est composé de milliards de cellules nerveuses mieux connues sous le nom de neurones. Ces neurones se spécialisent dans la communication et le traitement d’informations, mais ils se comportent de manière assez mystérieuse. Une équipe de chercheurs de l’Université de Montréal a été capable de percer certains secrets des neurones et a découvert les mécanismes dont ils se servent pour stocker ou effacer des informations.

Il s’agit d’un processus de formation ou de suppression de souvenirs appelé STDP (spike-timing-dependent plasticity) à l’échelle de leur unité fonctionnelle minimale, nous dit Roberto Araya, chercheur et auteur principal de l’étude « A spike-timing-dependent plasticity rule for dendritic spines », publié dans Nature Communications.

Les neurones reçoivent des informations provenant d’autres neurones via leurs branches appelées dendrites, qui les transmettent aux cellules, d’où il est décidé si les informations sont transmises à d’autres neurones.

D’après ce que le Dr Araya nous a dit, les dendrites sont recouvertes de petites structures ressemblant à des épines et celles-ci sont le lieu de contact entre les neurones, nommé « synapse ».

Ces épines, qui mesurent un peu moins d’un millième de millimètre de diamètre, sont le lieu physique où se produit la synapse neuronale, c’est-à-dire le port d’entrée d’informations vers le neurone.

(Photo : iStock/koto_feja)

« Imaginez l’analogie suivante : les neurones sont des arbres; les dendrites du neurone sont les branches de l’arbre; les épines dendritiques qui recouvrent les dendrites sont les feuilles de l’arbre; le corps cellulaire est le tronc de l’arbre qui décide si les informations reçues par les épines seront transmises ou non à d’autres; et enfin la racine est l’axone, une longue projection qui contacte d’autres neurones.

En utilisant cette analogie, nous avons découvert que lorsque les feuilles de cet arbre sont activées, cela produit la formation ou la destruction des souvenirs. Nous avons également découvert que stocker des souvenirs dans les feuilles de l’arbre nécessite que les feuilles changent de forme, ce qui augmente l’activité des branches et, par conséquent, celle du tronc de l’arbre. » Roberto Araya, chercheur principal

Ces résultats suggèrent que les entrées synaptiques, distribuées ou formant des microgroupes dans les épines dendritiques (les feuilles de l’arbre), sont fondamentales pour guider le stockage des informations sensorielles, affectant directement l’apprentissage qu’est le processus de formation ou de suppression de souvenirs. 

« Nous avons utilisé un microscope de pointe équipé d’un puissant faisceau laser qui nous a permis d’activer des épines dendritiques unitaires, regroupées ou réparties dans les dendrites des neurones corticaux. De cette façon, nous simulons l’arrivée d’informations qui se produit naturellement dans notre cerveau au niveau de ces minuscules structures qui recouvrent les dendrites de nos neurones. Nos résultats ont démontré que dans des conditions dans lesquelles les épines dendritiques stockent des informations pendant une longue période (potentialisation à long terme), des changements morphologiques se produisent en elles qui augmentent la force synaptique ou le « volume » de l’information qu’ils reçoivent. Ce processus de potentialisation correspond à la mémorisation ou à l’apprentissage d’une information. »Roberto Araya

Avant cette recherche, personne ne savait comment l’information s’organise dans notre cerveau ni les raisons pour lesquelles les neurones augmentent ou diminuent le volume d’information qu’ils stockent. L’équipe de Roberto Araya a été capable de comprendre les comportements des neurones et les raisons qui incitent ces comportements. (Photo : iStock / Eduard Muzhevskyi)

« Avant cette étude, il y avait des preuves d’activation des épines dendritiques regroupées en petits groupes. Cependant, personne n’avait pas encore compris la raison de cet arrangement particulier. En décodant ces regroupements, nous avons pu comprendre l’activation conjointe des épines dendritiques dans les dendrites des neurones corticaux. Cela est probablement le moyen le plus efficace par lequel le cerveau stocke les souvenirs. »Roberto Araya

Selon le Dr Araya, ces résultats pourraient inspirer de nouvelles stratégies d’apprentissage profond (deep learning). De plus, les épines dendritiques sont le substrat de nombreuses maladies neurodégénératives. Des défauts dans ces unités neuronales changeront sans aucun doute les règles d’apprentissage et de formation de la mémoire, croit Roberto Araya.

Par conséquent, quand l’automne de la vie arrive et que les feuilles tombent, les souvenirs sont perdus et avec eux notre identité, conclut le chercheur.

L’équipe de recherche responsable de cette étude sur les secrets des neurones. Sur la photo, de gauche à droite : la Dre Sabrina Tazerart, le Dr Roberto Araya, la Dre Soledad Miranda-Rottmann et la Dre Diana E. Mitchell. Ils font tous partie de l’équipe des scientifiques du Centre de recherche du Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine associé à l’Université de Montréal. (Crédit : Dr Pierre Drapeau / Université de Montréal)


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