Marche suivie d’une manifestation de membres de la diaspora algérienne au Canada en face du ‎Consulat d'Algérie à Montréal, en soutien au mouvement populaire en Algérie et pour ‎commémorer le 65e anniversaire du déclenchement de la révolution algérienne (1er novembre ‎‎1954) – Montréal 2 novembre 2019. Photo : Amel Bouazza

Marche suivie d’une manifestation de membres de la diaspora algérienne au Canada en face du ‎Consulat d'Algérie à Montréal, en soutien au mouvement populaire en Algérie et pour ‎commémorer le 65e anniversaire du déclenchement de la révolution algérienne (1er novembre ‎‎1954) – Montréal 2 novembre 2019. Photo : Amel Bouazza

La diaspora algérienne au Canada et le référendum constitutionnel en Algérie

Les membres de la communauté algérienne vivant au Canada sont appelés à se prononcer par référendum sur un projet de nouvelle constitution dans leur pays d’origine.

Ils auront à le faire les samedi et dimanche prochains, 31 octobre et 1er novembre. Au Consulat d’Algérie à Montréal, pour ceux qui vivent dans l’Est canadien ou à celui d’Ottawa pour le reste du Canada.

La quasi-totalité de la communauté algérienne du Canada vit dans la grande région de Montréal.

Lors des précédents scrutins, la diaspora avait la possibilité de voter pendant une semaine à l’avance, ce que permet encore la loi. Mais cette année, ce délai a été réduit à deux jours.

Selon Noureddine Meriem, Consul général d’Algérie à Montréal, l’expérience indique que les gens choisissent de voter en fin de semaine.

Près de 110.000 Algériens sont immatriculés au niveau de son institution, selon le diplomate. Parmi eux, près de 12.000 sont inscrits sur les listes électorales.

Mohamed El Hadi Bennadji, le délégué à Montréal de l’Autorité nationale indépendante des élections (ANIE) indique que le nombre d’inscrits a connu une hausse de 75 électeurs depuis la dernière élection puisqu’il y a eu des radiations et de nouvelles inscriptions. Ces dernières se font à titre volontaire, car l’immatriculation au consulat ne constitue pas une inscription automatique sur la liste électorale.

Iront-ils tous voter ? Habituellement, la participation de la diaspora aux échéances électorales est faible. Lors de l’élection présidentielle algérienne du 12 décembre 2019, ce taux a été de 3,4%.

Une opération «zéro vote» avait été organisée à l’entrée du consulat pendant le scrutin par des militants et activistes pro-hirak, ce mouvement populaire qui a commencé le 22 février 2019 et qui a fait tomber l’ancien président Bouteflika après 20 ans de règne et une tentative de briguer un cinquième mandat.

Pour booster la participation au référendum et le camp du oui, le ministre algérien des Affaires étrangères, Sabri Boukadoum, qui est en charge de la communauté à l’étranger a publié une vidéo sur Youtube où il appelait la diaspora à voter massivement pour le projet de la nouvelle constitution.

Bureau de vote prêt au niveau du consulat d'Algérie à Montréal - Photo : CGAM

Bureau de vote prêt au niveau du consulat d’Algérie à Montréal – Photo : CGAM

Au même titre que leurs concitoyens en Algérie, les opinions des membres de la diaspora vont du boycott pur et ‎simple au oui inconditionnel en passant par ceux qui participent mais ont décidé de voter non.‎

Pour Fatiha Ghazi, une militante montréalaise pro-hirak, ‎« nous sommes en pleine révolution d’un genre nouveau. Si l’objectif [de la nouvelle constitution, NDLR] est l’instauration d’un État de droit et des institutions, cela ne peut se faire avec un régime totalitaire ‎qui use et abuse de semblant  d’élections pour se maintenir. Ces élections servent principalement pour ‎asseoir une fausse légitimité sur le plan international notamment avec le Canada, un des partenaires ‎commerciaux.»‎

Et comme au dernier scrutin, des membres de la diaspora préparent la riposte et comptent organiser une vigie devant le consulat pour dissuader «pacifiquement‎» ‎ les électeurs de voter.

‎«Nous comprenons parfaitement qu’il y ait des gens qui ne veulent pas voter. Mais ils ne devraient pas recourir à la violence qu’elle soit physique ou verbale. Malheureusement, nous l’avons constaté au dernier scrutin.»‎, affirme le consul d’Algérie qui rappelle aussi que ‎«le maintien de l’ordre sur la voie publique ne relève pas du consulat mais des services de police»‎

Il a émis le voeu que les manifestations de violence ne se répètent pas. Car ‎«d’une part, ce n’est pas digne de notre communauté et d’autre part, ça donne une mauvaise image de notre communauté vis-à-vis du pays d’accueil et de la population locale»‎, a-t-il ajouté.

De l’autre côté, à l’intérieur des bureaux de vote du consulat de Montréal, d’autres citoyens algériens vivant au Canada assureront le rôle d’observateurs, chose que permet la loi, indique le délégué de l’ANIE. Ce dernier affirme que ces citoyens se sont proposés de leur propre chef.

Le jour du référendum, une marche est prévue dans les rues de Montréal. Elle se mettra en branle de la place du Canada pour finir en rassemblement devant le consulat.

Marche et manifestation des membres de la communauté algérienne devant le Consulat d'Algérie à Montréal à l'occasion de la fête d'indépendance de l'Algérie - 05.07.2020 - Photo : The Canadian Press / Graham Hughes

Marche et manifestation des membres de la communauté algérienne devant le Consulat d’Algérie à Montréal à l’occasion de la fête d’indépendance de l’Algérie – 05.07.2020 – Photo : The Canadian Press / Graham Hughes

Amine, un jeune Algérien vivant à Montréal ne prendra pas part à cette marche. Sur les réseaux sociaux, il affiche clairement son appui au projet de constitution.

S’il a été emballé par les articles sur la promotion de la société civile ou la décentralisation de l’État qui pourraient laisser entrevoir la création de provinces dotées de leurs propres assemblées, certains autres aspects le dérangent. Comme l’article sur la religion de l’État.

‎« Je ne pense pas qu’un État puisse avoir une religion. La religion est une affaire personnelle‎»‎, explique-t-il.

Et comme il ne peut pas voter article par article, il votera quand même oui.  ‎« Même si je ne fais pas tellement confiance à ces politiques, qui malheureusement, utilisent la date historique du 1er novembre ‎ [66e anniversaire du déclenchement de la révolution et de la guerre d’indépendance de l’Algérie, NDLR] ‎pour faire passer une Constitution, mais je ne pense pas que le boycott soit une solution. Adoptons cette Constitution et exigeons-leur de la respecter»‎, ‎tranche-t-il.

De l’autre côté du spectre politique algérien, les partis islamistes ont appelé au vote mais s’opposent au projet de la nouvelle constitution à cause du statut conféré à la langue berbère dans la nouvelle loi fondamentale ainsi que la neutralité de l’école, les libertés religieuses ou la source de la législation, selon ce que rapportent les médias algériens.

Mohamed Kamal, un Algérois vivant dans la périphérie ouest de Montréal, ne dit pas s’il vote pour ou contre le projet de constitution. Sa participation est une manière de se réapproprier son droit de vote.

Il estime que, dorénavant, le mouvement populaire doit utiliser d’autres moyens dans son combat pour le changement.  «Les manifestations de rue ont dépassé leur apogée et perdu leur faisabilité et efficacité. Le vote conscient, populaire et massif redevient l’unique moyen pacifiste de reprendre l’initiative et peser sur le présent, d’autant plus que le pouvoir ne s’y attend pas. Je récupère ce droit, je réponds à ce devoir aussi par souci pédagogique», affirme-t-il, avant de conclure sur une note de sagesse par un ‎«‎‎puisse la sérénité et la compréhension mutuelle régner.»‎.  ‎

En complément :

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Catégories : Immigration et Réfugiés, International
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