Représentation artistique de l'exoplanète WASP-107b et de son étoile, WASP-107. On voit la lumière de l'étoile qui passe en partie à travers la couche de gaz étendue de la planète. (Source : ESA/Hubble, NASA, M. Kornmesser.)

Mieux comprendre la formation des planètes gazeuses géantes

L’analyse détaillée d’une exoplanète gazeuse géante a permis à une équipe d’astronomes canadiens de mieux comprendre la formation de ce type de planètes. 

Les équipes de l’Université de Montréal et McGill ont découvert que la masse du cœur solide de l’exoplanète géante WASP-107b est nettement inférieure à ce qu’ils pensaient.

Cela change la perception des scientifiques selon laquelle il y aurait une masse de noyau minimum requise pour constituer l’épaisse enveloppe de gaz entourant des planètes géantes comme Jupiter et Saturne.

Ainsi, la découverte de Caroline Piaulet, doctorante à l’Institut de recherche sur les exoplanètes (iREx) de l’Université de Montréal, indiquerait que « les planètes géantes gazeuses se forment beaucoup plus facilement qu’on croyait », peut-on lire dans l’étude publiée dans l’Astronomical Journal.

Ce n’est pas la première découverte majeure réalisée à l’université montréalaise. En 2019, l’équipe de recherche du professeur d’astrophysique Björn Benneke, dont Mme Piaulet fait partie, avait annoncé la première détection d’eau sur une exoplanète située dans la zone habitable de son étoile.

Le professeur Benneke a d’ailleurs déclaré que cette analyse, réalisée par les astronomes canadiens en collaboration avec des collègues des États-Unis, de l’Allemagne et du Japon, avait « de grandes implications ».

« Ce travail porte sur les fondements mêmes de la façon dont les planètes géantes peuvent se former et croître », a-t-il ajouté.

« Il fournit la preuve concrète que l’accrétion massive [le processus d’agglomération, NDLR] d’une enveloppe de gaz peut être déclenchée pour des cœurs solides qui sont beaucoup moins massifs qu’on le pensait jusqu’à maintenant.»

Björn Benneke

L’exoplanète WASP-107b, c’est quoi? 

  • L’exoplanète a été découverte en 2017. Elle orbite autour de l’étoile WASP-107, située à environ 212 années-lumière de la Terre dans la constellation de la Vierge.
  • Elle est très rapprochée de son étoile, plus de 16 fois plus près que la Terre l’est du Soleil.
  • Sa spécificité réside dans sa masse. Elle a une taille semblable à celle de Jupiter, la plus grosse planète de notre système solaire, mais une masse environ 10 fois plus légère. WASP-107b est d’ailleurs l’une des exoplanètes les moins denses que l’on connaît.
  • Sa masse la classe dans la catégorie des planètes «barbe à papa» ou super-puff en anglais.
Un petit cœur pour une épaisse couche de gaz

Afin d’en arriver là, Caroline Piaulet et son équipe sont revenues sur des données de WASP-107b obtenues à l’observatoire W. M. Keck à Hawaï.

En évaluant la masse avec plus de précisions, ils ont remarqué que WASP-107b est environ 10 fois moins massive que Jupiter, soit à peu près 30 fois plus que la Terre.

Étonnée de ces résultats, l’équipe a cherché à déterminer la structure interne la plus probable de la planète. Elle a alors découvert un « petit » cœur solide en comparaison avec l’épaisse couche de gaz autour qui représente à elle seule 85 % de la masse totale.

Par comparaison, cette proportion n’est que de 5 à 15 % pour Neptune, qui a une masse analogue à celle de WASP-107b.

« Nous avions beaucoup de questions sur l’exoplanète WASP-107b », explique Caroline Piaulet.

« Comment une planète de si faible densité a-t-elle pu se former? Et comment a-t-elle empêché son énorme couche de gaz de s’échapper, surtout si l’on considère la proximité de son étoile? Cela nous a motivés à faire une analyse approfondie pour connaître l’histoire de sa formation.»

Comment se forme une planète?

  • Les planètes voient le jour dans le disque de poussière et de gaz qui entoure une jeune étoile, le disque protoplanétaire.
  • Pour ce qui est des planètes géantes gazeuses, les experts se sont toujours basés sur celles que nous connaissons le mieux : Jupiter et Saturne.
  • Ainsi, on pensait que ce type de planète nécessitait un noyau solide au moins 10 fois plus massif que la Terre pour pouvoir accumuler une grande quantité de gaz.
  • À l’inverse, sans cœur massif, les astronomes pensaient que les planètes géantes gazeuses ne pouvaient pas accumuler et conserver de grandes enveloppes de gaz.

Les astronomes canadiens ont alors émis plusieurs hypothèses pour tenter d’expliquer l’existence de WASP-107b, qui a un noyau beaucoup moins massif.

« Pour WASP-107b le scénario le plus plausible est que la planète s’est formée loin de l’étoile, où le gaz du disque est suffisamment froid pour que l’accrétion se produise très rapidement », explique Eve Lee, professeure à l’Université McGill et membre de l’iREx.

« La planète a ensuite pu migrer vers sa position actuelle par des interactions soit avec le disque, soit avec d’autres planètes du système.»

Cette théorie a notamment été appuyée par la découverte d’une nouvelle planète dans le même système, WASP-107c.

La spécificité de cette planète réside dans son excentricité élevée, soit une orbite plus ovale que circulaire, qui « laisse entrevoir un passé assez chaotique, avec des interactions entre les planètes qui auraient pu conduire à des déplacements importants, comme celui qu’on soupçonne pour WASP-107b », explique Caroline Piaulet.

Afin de faire cette découverte, Caroline Piaulet et son équipe sont revenus sur des données de WASP-107b obtenues à l’observatoire W. M. Keck à Hawaï. (Photo : Mcgill University)

Une planète pleine de mystères

Outre sa masse particulière, l’exoplanète géante WASP-107b possède d’autres spécificités inédites.

Son atmosphère contiendrait très peu de méthane, ce qui va à l’encontre de ce que pensaient les astronomes.

«C’est étrange, car dans ce type de planète, le méthane devrait être abondant », note la jeune chercheuse.

« Nous sommes en train de réanalyser les [précédentes] observations de Hubble avec la nouvelle masse de la planète pour voir comment cela va influencer les résultats et pour examiner quels mécanismes pourraient expliquer la destruction du méthane.»

Afin d’en savoir plus sur cette intrigante planète, Mme Piaulet table désormais sur le télescope spatial James-Webb, dont le lancement est prévu en 2021. Plus puissant que ces prédécesseurs, il devrait permettre « d’avoir une idée beaucoup plus précise de la composition de l’atmosphère de la planète », indique l’étude.

« Des exoplanètes comme WASP-107b qui n’ont pas d’équivalent dans notre système solaire nous permettent de mieux comprendre les mécanismes de formation des planètes en général et la variété d’exoplanètes qui en résulte. Cela nous motive à les étudier en détail», conclut Caroline Piaulet.

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