Autochtones : Justin Trudeau a fait plus « que n’importe quel autre premier ministre »

Justin Trudeau a annoncé lundi qu’il quittera ses fonctions de chef du Parti libéral du Canada et de premier ministre une fois qu’une personne sera choisie pour lui succéder.
(La Presse canadienne / Jonathan Hayward)

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La démission de Justin Trudeau, lundi, a fait des vagues auprès des politiciens, des organisations et des communautés autochtones. Si ces dernières ont souligné les progrès réalisés en matière de réconciliation au cours des 10 dernières années, elles ont également exprimé leurs inquiétudes face à l’incertitude politique qui s’annonce et un possible gouvernement conservateur.

« Le premier ministre a été un allié pour une réconciliation significative et a établi une nouvelle norme que les futurs premiers ministres devront dépasser ». Dans une publication sur Facebook, la cheffe de l’Assemblée des Premières Nations (APN), Cindy Woodhouse Nepinak, n’a pas tardé à saluer le travail de Justin Trudeau depuis son entrée au pouvoir en 2015 vis-à-vis des questions autochtones.

Au cours de sa décennie au pouvoir, Justin Trudeau a fait plus pour améliorer la qualité de vie des Premières Nations que n’importe quel autre premier ministre dans l’histoire de ce pays.

Cindy Woodhouse Nepinak, cheffe de l’Assemblée des Premières Nations, sur Facebook

Dans un communiqué, la cheffe s’est montrée toutefois plus critique et a déclaré avoir constaté « des retards importants dans l’avancement de dossiers clés » au cours des derniers mois. Elle a notamment déploré l’absence d’engagement du gouvernement à renégocier une réforme à long terme des services à l’enfance et les délais dans l’adoption du projet de loi C-61 sur l’eau potable des Premières Nations.

« Cette loi est en préparation depuis longtemps et nous demandons à nouveau qu’elle soit soumise au processus d’approbation le plus rapidement possible », a-t-elle dit.

La cheffe de l’APN a également ajouté que d’ici le 24 mars 2025 – date jusqu’à laquelle le Parlement a été prorogé – le gouvernement « doit veiller à ce que les questions essentielles qui touchent les Premières Nations restent une priorité. »

De son côté, l’Assemblée des Premières Nations du Québec-Labrador (APNQL) a tenu à souligner la « volonté » de Justin Trudeau de travailler en partenariat avec les Autochtones durant son mandat, le félicitant au passage pour l’adoption par son gouvernement de la Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. « Il s’agissait d’un premier pas vers une relation renouvelée avec les peuples autochtones », a écrit l’Assemblée sur les réseaux sociaux.

L’APNQL souligne toutefois que, après le départ de M. Trudeau, « cette transition politique marquera un moment charnière et les relations avec les Premières Nations doivent rester une priorité pour les années à venir, peu importe le parti. »

La réconciliation, « pas juste une affaire du gouvernement libéral »

En entrevue avec Espaces autochtones, la sénatrice indépendante Michèle Audette dresse pour sa part un bilan mitigé du mandat de Justin Trudeau. « Je reste quand même un peu amère. Le mouvement autochtone a tellement de luttes et peu de ressources », a-t-elle dit, tout en déplorant que toutes les promesses du gouvernement depuis 2015 n’aient pas été honorées.

Cette dernière a notamment énuméré les blocages au Parlement en matière d’eau potable, de petite enfance, d’éducation et par rapport à l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées (ENFADA), dont elle a été la commissaire de 2016 à 2019.

« La fonction publique a ralenti des choses et les élus n’en ont pas fait des priorités », regrette celle qui a toutefois tenu à saluer l’ancien ministre des Relations Couronne-Autochtones Marc Miller, « le meilleur ministre qu’on a eu. »

Par ailleurs, Mme Audette, qui a été candidate libérale dans la circonscription de Terrebonne en 2015, se dit « inquiète » de la possible entrée au pouvoir des conservateurs, craignant d’éventuels reculs dans les luttes autochtones.

La sénatrice indépendante Michèle Audette (Photo d’archives)
(Radio-Canada / Ivanoh Demers)

« Je vais travailler avec tous les premiers ministres, mais les gens qui animent la violence, moi, ça me fait peur », affirme celle qui est originaire de la communauté innue de Uashat mak Mani-Utenam, au Québec.

Il va falloir se mobiliser. La réconciliation, ce n’est pas juste une affaire du gouvernement libéral. Ça m’appartient, et ça appartient [à un] gouvernement conservateur aussi.

Michèle Audette, sénatrice indépendante

Au Québec, et plus précisément dans la région de la Côte-Nord, des chefs innus ont salué le travail de M. Trudeau au fil des ans, mais ont également fait part de leurs inquiétudes pour la suite des choses.

Le chef de la communauté de Matimekush-Lac John, Réal McKenzie, a notamment dit « regretter » la démission du premier ministre. « Les libéraux ont toujours quand même eu une écoute particulière à nos dossiers et ça a avancé quand même beaucoup avec eux », a-t-il résumé.

Pour sa part, le chef de la communauté d’Ekuanitshit, Jean-Charles Pietacho, s’est dit « très préoccupé », tant par le « départ de Trudeau » que par « la potentielle arrivée » du chef conservateur Pierre Poilievre au pouvoir.

M. Pietacho a notamment précisé qu’il s’inquiétait pour la sauvegarde de certains acquis obtenus sous les libéraux en faveur de la réconciliation, notamment l’entente de 47,8 milliards $ visant à réformer le système de protection de l’enfance des Premières Nations.

Avec les informations de Raphaëlle Laverdière et de Charles-Étienne Drouin

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