Le chemin sera long avant de gagner la bataille de l’eau à Puvirnituq

À Puvirnituq, une communauté inuit du Nord-du-Québec, tous les efforts sont déployés pour venir à bout de la pénurie d’eau qui touche le village depuis des semaines. Si une lueur d’espoir est permise, la situation peine à se résorber rapidement.
Cela fait maintenant plus de 20 jours que Nellie Iqiquq, son conjoint et leurs quatre enfants sont privés d’eau. Pour celle qui a grandi dans ce village de 2000 habitants, si les coupures d’eau sont monnaie courante après un blizzard, c’est la première fois que la situation est aussi grave.

Je ne peux pas donner un bain ou une douche aux enfants, je ne peux pas tirer la chasse ni faire la vaisselle ou nettoyer la maison et faire du lavage, énumère-t-elle sans cacher sa frustration.
Je suis vraiment frustrée et en colère que nous n’ayons pas de service et que nous ne puissions rien y faire. Comment cela peut-il se produire?
La famille a dû acheter de la vaisselle en plastique et installer un système de sac pour la toilette. Malgré ces précautions, certains membres sont tombés malades.

L’arrivée du camion-citerne, lundi matin, a été accueillie par une grande joie. C’était comme un camion à 1 million de dollars. Nous étions tellement heureux
, raconte Nellie Iqiquq, en riant.
La famille a pu prendre une douche et faire un peu de lavage, mais sans service de collecte des eaux usées, perturbé aussi par le blizzard des dernières semaines, le système d’eau de la maison peut s’arrêter à tout moment pour éviter les débordements. L’utilisation de l’eau reste donc calculée.
Essayer de réparer la situation
Sur la route qui mène à la station de pompage, plus de quatre mètres de neige se sont accumulés par endroit. Seul un petit chemin à sens unique permet aux camions-citernes de faire l’aller-retour vers le village.

Avant, on remplissait nos citernes en 15 minutes avec la canalisation dans le village, mais maintenant c’est 45 minutes pour se rendre à la station aller et retour, explique le conducteur de camion-citerne et résident de Puvirnituq, Aipilie Qumaluk.
Avec ses collègues, il commence son quart à 6 h, parfois sans même prendre le temps de déjeuner
, pour essayer d’acheminer le plus d’eau possible aux résidents rapidement.
Kevin Leblanc, contremaître de génie civil avec Kativik, l’administration régionale, est venu prêter main forte avec son équipe. Ils s’efforcent d’ouvrir la route afin de permettre à deux camions de se croiser, ce qui accélérerait la livraison d’eau.

Il indique qu’à son arrivée, il y a quelques jours, les blizzards consécutifs puis la pluie qui s’était abattue sur la région avaient rendu les routes impraticables et plusieurs voitures étaient embourbées un peu partout. Avec le beau temps qui revient, la situation s’améliore.
On est en train de battre la bête […], on est en train de gagner notre bataille, affirme Kevin Leblanc, contremaître de génie civil avec Kativik.
Deux mécaniciens sont avec lui afin de s’assurer que les bris des camions soient réparés immédiatement afin d’éviter un ralentissement supplémentaire de la livraison d’eau.
Il y a beaucoup de monde, beaucoup de corps de métier qui viennent donner un coup de main rapide parce qu’on peut dire qu’on l’a échappé à cause des blizzards, donc on est ici pour essayer de réparer la situation avec eux, en soutien, dit-il.
Les équipes de l’Administration régionale Kativik comptent déployer un tuyau, cette semaine, pour contourner la conduite d’eau gelée. Ils espèrent être en mesure d’alimenter l’usine de traitement des eaux d’ici jeudi. Il s’agit de la première étape vers un retour progressif à la normale.
Du côté du gouvernement du Québec, le ministre responsable des Relations avec les Premières Nations et les Inuit, Ian Lafrenière, prévoit qu’une autre cargaison de bouteilles d’eau potable devra être envoyée dans les prochains jours.

Bien entendu, ça ne réglera pas le problème sanitaire qu’on a présentement à Puvirnituq, dit-il.
Ce n’est pas qu’il manque d’eau, juste pour mettre ça clair, il y en a de l’eau. C’est pour livrer l’eau qu’on a des problèmes, des problèmes avec les camions, des problèmes avec les canalisations qui ont gelé, des problèmes avec les chemins d’accès et de grands blizzards, résume-t-il en soulignant que la communauté a eubeaucoup de malchance.

Il prévient toutefois, la situation à Puvirnituq n’est pas un cas isolé au Nunavik.
On parle de Puvirnituq en ce moment, mais j’ai au moins trois autres villages nordiques qui ont aussi des problèmes d’accès à l’eau, assure-t-il, en indiquant qu’un suivi devra être fait une fois la situation résolue.
Le manque d’eau force la fermeture des écoles
La pénurie d’eau aura eu raison de la fin de l’année scolaire. Kativik Ilisarniliriniq, la commission scolaire du Nunavik, annonce la fermeture des classes des écoles Iguarsivik et Ikaarvik dès le 20 mai, soit 10 jours plus tôt que prévu.
Dans le contexte actuel, nous ne pouvons assurer la continuité des services éducatifs, explique la commission scolaire dans un communiqué, ajoutant que des mesures ont été prises pour assurer que les élèves ne soient pas pénalisés.
Les élèves qui devaient passer des examens nécessaires à l’obtention du diplôme d’étude secondaire pourront le faire. Pour les autres, du rattrapage scolaire pourrait être envisagé lors de la rentrée scolaire au mois d’août.
Avec les informations de Félix Lebel et de l’émission Midi info
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