Les Casques bleus ne doivent pas servir de monnaie d’échange en vue de la reconquête par le Canada d’un siège au Conseil de sécurité des Nations unies (ONU). C’est le message que lance un ex-commandant des forces canadiennes de maintien de la paix déployées en Bosnie dans les années 1990.
Le major général à la retraite Lewis MacKenzie a pris la plume pour faire ce plaidoyer, au moment où le ministre de la Défense, Harjit Sajjan, se trouvait, ces jours derniers, au début d’un « voyage d’enquête » de plusieurs jours en Afrique et qu’il était accompagné de deux grandes personnalités canadiennes, le lieutenant-général à la retraite Roméo Dallaire et la juge à la retraite Louise Arbour.
Dans une lettre ouverte publiée dans les pages du quotidien torontois The Globe and Mail, le major général à la retraite exhorte le gouvernement libéral à abandonner son « obsession de remporter un coûteux siège temporaire au Conseil de sécurité ».
Il y plaide que le déploiement de Casques bleus n’est plus pertinent dans le contexte post-guerre froide et il fait valoir que le Canada devrait plutôt contribuer à d’autres agences onusiennes plus efficientes, comme l’UNICEF ou l’Agence des Nations unies pour les réfugiés.
Le. porte-parole adjoint du Parti conservateur en matière de défense, Pierre Paul-Hus, reproche pour sa part au gouvernement libéral de Justin Trudeau de « se chercher une mission qui n’existe pas, tout simplement pour se donner une bonne image face aux Nations unies, pour essayer de regagner un siège au Conseil de sécurité ».
Il est vrai que, « pour pouvoir jouer dans cette compétition-là, les pays doivent montrer qu’ils sont impliqués dans le maintien de la paix à travers l’ONU », expose Marie-Joëlle Zahar, directrice scientifique au Réseau de recherche sur les opérations de paix (ROP).
Mais il est aussi vrai que certaines missions de maintien de la paix pourraient desservir les intérêts économiques et géopolitiques canadiens, a fait remarquer la chercheuse en entrevue téléphonique avec Radio-Canada.
« Le Canada a un intérêt à ce que certains pays africains soient stables, notamment parce que nous y avons des intérêts commerciaux très importants. C’est en Afrique qu’une grande partie de nos compagnies minières travaillent » a soulevé Mme Zahar.
Aide-mémoire Il s’agissait de la première rebuffade du Canada depuis la création de l’ONU – En 2010, le Canada dirigé par le gouvernement conservateur de Stephen Harper avait échoué dans sa tentative d’intégrer le cercle restreint du Conseil de sécurité, battu au vote par le Portugal. – Un échec qui avait été largement perçu comme une répudiation de la politique étrangère du gouvernement conservateur, très pro-israélienne et indifférente à l’Afrique. – L’année suivante, le premier ministre Stephen Harper avait déclaré que le Canada n’accepterait plus de suivre tout bonnement l’ordre du jour des autres pays. « Le Canada ne tentera plus de plaire à tous les dictateurs qui détiennent un vote aux Nations unies », avait-il scandé.
Rappelons que le premier ministre canadien, Justin Trudeau, a déclaré peu de temps après son arrivée au pouvoir l’automne dernier qu’un réengagement du Canada au sein des organisations internationales était le fer-de-lance dans sa politique étrangère.
En février, le premier ministre avait déclaré qu’il souhaitait notamment que le Canada « reprenne une place » au Conseil de sécurité. M. Trudeau avait indiqué que le gouvernement libéral était « en train de regarder les différentes occasions de se réengager dans l’élection pour le Conseil de sécurité dans les années à venir ».
Le premier ministre Justin Trudeau confiait au même moment au ministre de la Défense, Harjit Sajjan, et à son collègue aux Affaires étrangères, Stéphane Dion, le mandat d’accroître le soutien du Canada aux opérations de maintien de la paix notamment en Afrique.
Ottawa doit cependant composer avec deux rivaux pour un siège en 2020 : la Norvège et l’Irlande, deux pays alliés dont les valeurs sont semblables à celles du Canada.
Marc-André Blanchard, l’ambassadeur du Canada à l’ONU, affirmait au début de l’été que le Canada a amorcé son offensive diplomatique en vue d’un vote en 2020, ayant déjà eu plus de 50 rencontres bilatérales avec des collègues ambassadeurs aux Nations unies depuis son entrée en fonction plus tôt cette année. Mais pour l’instant, il a surtout écouté les commentaires de ses interlocuteurs sur le Canada.
« Nous sommes à l’étape de s’entretenir avec les États membres, pour demander leur soutien, mais aussi pour les écouter concernant leurs opinions sur le Canada, a dit M. Blanchard. Nous croyons qu’il est important d’écouter les autres pays, d’être attentifs, avant d’en arriver à notre propre programme ».
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