Le port de Montréal au printemps. Photo: Radio-Canada / Jean-François Villeneuve

Le crime organisé s’arrime à la croissance rapide du trafic portuaire canadien

La croissance rapide du trafic que connaissent les principaux ports canadiens profiterait aussi au crime organisé, selon une série de données obtenues par La Presse canadienne, car ils sont moins surveillés que les aéroports et l’expédition de la marchandise par bateau est beaucoup moins que par avion.

Le terminal à conteneurs South End à Halifax (Pam Berman/CBC)

L’augmentation très rapide depuis 5 ans du trafic par conteneurs offrirait aussi aux criminels l’occasion de dissimuler davantage de produits de contrebande et de tirer profit des ressources limitées dont disposent les forces de l’ordre dans les zones portuaires.

Selon Bud Garrick, un ancien directeur général adjoint des services de renseignements criminels de la GRC, la drogue importée et les véhicules volés exportés sont les principaux produits qui passent en contrebande.

Les autorités ne parviendraient à en récupérer qu’une infime partie.

Hausse du trafic portuaire au Canada d'un océan à l'autre
En 2018, le trafic dans le port de Montréal, le second en importance au Canada, a augmenté de 9 % pour atteindre l’équivalent de plus de 1,6 million de conteneurs de 20 pieds. C’est la cinquième année consécutive que le port de Montréal atteint un nouveau sommet au chapitre du volume.
Les ports de Vancouver et de Halifax, respectivement premier et troisième au pays, ont aussi enregistré un sommet dans le nombre de conteneurs traités, l’année dernière.

Port de Vancouver (David Horemans / CBC)

Quand la croissance rime avec crime

Peter Hall, Université Simon Fraser. Photo: La Presse canadienne

Selon Peter Hall, professeur agrégé d’études urbaines à l’Université Simon Fraser, essayer d’intercepter la cargaison de contrebande dans un port en pleine effervescence coûte cher et perturbe les activités.

« On n’aura jamais assez de ressources pour détecter la plupart des produits par un filtrage aléatoire. La plupart du temps, l’Agence des services frontaliers se concentre sur le dépistage du terrorisme et des risques biologiques.»

Un nombre croissant de navires quitteraient ainsi le Canada en apportant notamment des véhicules volés. Ces vols à grande échelle, souvent liés à des organisations criminelles en Afrique de l’Ouest, en Europe du Nord, au Moyen-Orient et en Chine, reposent sur des faiblesses humaines et technologiques.

On démantelait il y a quelques années un réseau de vols de véhicules de luxe qui sévissait au Québec et en Ontario et dont le butin était destiné vers l’Afrique par conteneurs via le Port de Montréal.

Henry Tso, Bureau d’assurance du Canada

Selon Henry Tso, vice-président du Service d’enquête au Bureau d’assurance du Canada , « certains quais, il y en a, vous savez, sont gérés par le crime organisé. Même au Québec, comme dans les ports de Montréal, un terminal est propre, l’autre ne l’est pas. »

« Le problème majeur est la corruption », souligne Anthony Nicaso, auteur de plus de deux dizaines de livres sur le crime organisé. « Il n’y a pas de volonté politique de lutter contre le crime organisé, probablement parce que l’argent ne pue pas, alors qui s’en soucie. L’argent, c’est de l’argent. »

Le vice-président de l’administration portuaire de Montréal (APM), Tony Boemi, estime que l’Agence des services frontaliers du Canada inspecte minutieusement seulement environ 3 % des conteneurs qui transitent par le port de Montréal. L’agence fédérale refuse de confirmer ces données statistiques, mais affirme que des appareils de dépistage, comme des détecteurs de rayons gamma, analysent chaque conteneur.

Un bateau accosté au port de Montréal. La croissance dans nos ports fait l’affaire des contrebandiers. Photo Radio-Canada.ca

Un problème identifié depuis longtemps

Un rapport de Sécurité publique Canada de janvier 2011 concluait que les trois plus grands ports du Canada – Vancouver, Montréal et Halifax – étaient les plus vulnérables à la contrebande entrante et sortante.

Le rapport cite le volume du trafic de conteneurs comme l’une des principales raisons pour lesquelles les trois ports attirent les contrebandiers. Un autre facteur dans leur valeur en tant qu’intermédiaires de contrebande, selon le rapport : « des groupes criminels sophistiqués se sont bien implantés dans les villes hôtes (dans le cas de Montréal et de Vancouver) et ont rendu les ports essentiels à leurs activités de contrebande. »

Les représentants du gouvernement et des forces de l’ordre ont fourni peu d’éléments probants indiquant que beaucoup de choses ont changé au cours des sept années qui se sont écoulées depuis la publication du rapport.

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La Voie maritime du Saint-Laurent Photo Credit: Radio-Canada

RCI avec La Presse canadienne et la contribution de Radio-Canada

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