La police observe des manifestants qui campent près des rails à Hamilton, en Ontario, mardi 25 février 2020 en solidarité aux chefs wet’suwet’en qui s’opposent à la construction du gazoduc Coastal GasLink sur leur territoire en Colombie-Britannique. Crédit : La Presse canadienne/Frank Gunn

Crise ferroviaire au Canada : Amnistie internationale appelle au respect des droits des Autochtones

Dans une lettre au premier ministre du Canada, la directrice générale d’Amnistie internationale pour le Canada francophone, France-Isabelle Langlois, s’appuie sur les conventions internationales au sujet des droits de l’homme pour en appeler à la fin des exactions contre les peuples autochtones.

Poursuivre le processus de réconciliation

France-Isabelle Langlois Crédit : Amnistie internationale

Dans sa lettre, la DG estime que le recours à la force pour tenter de trouver une solution aux blocages ferroviaires au pays représente une atteinte aux droits des Autochtones. C’est la conséquence d’un mal plus profond et non résolu qui oppose les communautés autochtones aux différents paliers gouvernementaux depuis plusieurs décennies, soutient Mme Langlois.

« Les dernières semaines ont mis en évidence l’état profondément décevant de la réconciliation et du respect des droits des peuples autochtones au Canada, avec un degré d’urgence rarement atteint », déclare-t-elle d’entrée de jeu dans sa lettre.

Depuis le début de l’intervention policière dans cette crise au Québec, à la suggestion du premier ministre François Legault, la situation semble avoir dégénéré. Des barricades se sont multipliées à plusieurs endroits au Québec et ailleurs au Canada, en solidarité à l’opposition des chefs héréditaires wet’suwet’en au projet de gazoduc Coastal GasLink sur leur territoire ancestral en Colombie-Britannique.

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Logo d’Amnistie internationale Crédit : Amnistie internationale

L’approche du premier ministre Trudeau, qui a consisté dans un premier temps à prôner la négociation avec les chefs héréditaires et les communautés qui les soutiennent, a été vivement critiquée par l’opposition officielle à Ottawa. Andrew Scheer, le chef du Parti conservateur, a répété que M. Trudeau a fait preuve d’un « manque de leadership » depuis le déclenchement de la crise qui dure depuis 20 jours. C’est ainsi qu’il a préconisé, comme M. Legault, une démarche plus musclée pour démanteler les barricades qui plombent l’économie partout au Canada.

Cette même critique est réitérée dans la lettre de la DG d’Amnistie internationale pour le Canada francophone. Loin d’inciter à user de la contrainte, il est suggéré au premier ministre Trudeau de travailler main dans la main avec les Premières Nations.

« Nous vous écrivons pour demander instamment à votre gouvernement de faire preuve de leadership dont nous avons grandement besoin en ce moment critique et potentiellement décisif. Ce leadership implique de travailler en étroite collaboration avec les dirigeantes et dirigeants et les organisations des peuples autochtones, ainsi qu’avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, afin d’apporter des changements fondamentaux nécessaires pour que la réconciliation soit réelle et que les droits des peuples autochtones au Canada soient pleinement respectés », affirme Mme Langlois dans sa lettre.

Des protestataires réunis à Kahnawake, au Québec, le mardi 25 février, en appui aux chefs héréditaires wet’suwet’en. Crédit : La Presse canadienne/Ryan Remiorz

Libération immédiate et inconditionnelle des manifestants

La DG recommande au gouvernement fédéral de répondre de façon globale, et non au cas par cas, à cette crise.

Elle dénonce les arrestations survenues à Tyendinaga, en Ontario, où la police provinciale a réussi à disperser les manifestants qui barraient les rails. Ce sont une dizaine de personnes qui ont été interpellées dans cette localité, près de Belleville, où les manifestants semblent avoir constitué de nouvelles barricades sur un autre site. Amnistie internationale demande la libération immédiate et inconditionnelle de tous ceux qui ont été si « injustement interpellés ».

Mme Langlois invite le Canada à abandonner la voie de la « coercition » pour revenir à sa première option de « négociation » et de main tendue aux communautés autochtones. C’est ce qui permettra de garantir avant toute chose le respect des droits de ces peuples « longtemps martyrisés» et maintes fois « spoliés de leurs terres », a-t-elle indiqué, tout en soulignant que le Canada doit agir conformément à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.

« Nous avons déjà écrit pour vous demander que le Canada se conforme instamment, au minimum, à la décision du Comité des Nations unies pour l’élimination de la discrimination raciale en ce qui concerne le gazoduc Coastal GasLink, l’extension du gazoduc Trans Mountain et le barrage du site C. L’importance pour les gouvernements du Canada de respecter les obligations internationales du pays en matière de droits humains dans ces trois situations (et dans bien d’autres) a été fréquemment réitérée par les peuples autochtones au Canada, mais votre gouvernement n’a pas manifesté l’intention de le faire », a ajouté Mme Langlois.

L’organisme fait appel aux conventions internationales pour appuyer la cause des communautés autochtones qualifiées pour la circonstance de « défenseurs de la terre » qui ne devraient pas être « criminalisés » sans motifs.

Il exige la suspension du projet de gazoduc à l’origine de la crise, le temps pour les autorités de s’accorder avec les membres des Wet’suwet’en. Par ailleurs, le fédéral est invité à réviser le cadre législatif pour le rendre plus favorable à la mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.

Avec des informations d’Amnistie internationale
Catégories : Autochtones, Économie, Politique
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