« Non à la compagnie minière canadienne qui tue des gens. Un danger pour TOUS » pouvait-on lire sur une banderole lors d'une manifestation à Xochitepec, au Mexique, le jeudi 21 mars 2013. Les organisateurs de la manifestation affirment que ce type d'exploitation d'or à ciel ouvert va gravement contaminer l'approvisionnement en eau de la région. (AP Photo/Tony Rivera)

Responsabiliser les entreprises canadiennes à l’étranger, l’affaire de tous

Les investissements canadiens à l’étranger représentaient 1289 milliards de dollars en 2018, selon le bilan le plus récent de Statistique Canada. Cette année-là, les entreprises canadiennes dans le monde ont augmenté leur présence de 10,4 % par rapport à l’année précédente.

Cependant, en ce qui concerne les effets de leur présence sur les communautés où elles s’installent, le bilan n’est pas si limpide.

Le rapport « La marque Canada », publié en 2017 par la Faculté de droit Osgoode Hall Law School de l’Université York, faisait état de menaces de mort, d’incendies volontaires de récoltes, de destruction de biens ou de propriétés, de déplacements forcés, de tentatives d’assassinat, de cas de maladie pour cause de contamination environnementale dont sont victimes les communautés autour de divers projets miniers canadiens à l’étranger. Il fournit des détails sur des allégations et des sources des incidents de violence.

« Nous savons que ce rapport n’est que la pointe de l’iceberg », avait déclaré à l’époque Shin Imai, professeur à cette Faculté de droit et responsable du projet Justice et Responsabilité des entreprises.

Le rapport avait recommandé au gouvernement canadien de mettre en place un nouveau mécanisme pour enquêter sur les cas spécifiques de violence impliquant des compagnies minières canadiennes opérant à l’étranger, ce que le gouvernement avait fait, du moins en partie, en créant le bureau de l’ombudsman

En effet, le 8 avril 2019, le gouvernement du Canada a annoncé la nomination de Sheri Meyerhoffer au poste d’ombudsman canadienne de l’entreprise responsable, le premier du genre dans le monde.

Cependant, la campagne Se mêler de nos affaires : s’assurer que les entreprises canadiennes respectent les droits humains à l’étranger », lancée par un réseau d’organismes civils au Canada, croit que les citoyens canadiens doivent aussi s’impliquer pour faire preuve de plus de fermeté à l’endroit des entreprises canadiennes oeuvrant à l’étranger.

Emily Dywer est la coordonnatrice du Réseau canadien sur la reddition de compte des entreprises et nous lui avons parlé de la campagne. 

Déjà en 2017, le rapport « La marque Canada » avait suggéré que la violence généralisée faisait partie du cours normal des activités de nombreuses compagnies minières canadiennes en Amérique latine. Le document en donnait quelques exemples.

Au Salvador, cinq membres de la communauté opposée à la compagnie minière Pacific Rim ont été tués entre 2008 et 2011. L’une était enceinte de huit mois au moment de son assassinat.

Au Guatemala, 11 femmes allèguent qu’elles ont été violées par les forces de sécurité lors de leur déplacement forcé pour faire place à la mine Fenix de Skye Resources.

Au Mexique, en 2008, deux employés en uniforme de la compagnie Blackfire ont prétendument battu Mariano Abarca, un militant bien connu opposé à une mine. Un an plus tard, le militant a été assassiné. 

Mariano Abarca Roblero est montré à Chicomuselo, au Chiapas. Le gouvernement canadien avait dit à l’époque qu’il s’engageait à coopérer pleinement à une éventuelle enquête sur le rôle de diplomates canadiens et d’une ancienne société minière de Calgary dans la mort par balle du militant mexicain. (Photo : THE CANADIAN PRESS/Dominique Jarry-Shore)

Emily Dywer croit qu’en situation de pandémie, les dangers auxquels sont exposés les opposants aux projets miniers canadiens, entre autres, sont encore plus criants. 

L’approche du Canada en matière de conduite responsable des entreprises à l’étranger

Selon les documents officiels du gouvernement du Canada, le pays fournit de l’orientation sur la conduite responsable des entreprises (CRE) aux entreprises canadiennes, notamment, par l’intermédiaire de ses ambassades et missions à l’étranger.

Conscient cependant que le comportement des entreprises ne peut être garant, à lui seul, de réussite commerciale ou de retombées locales durables, le gouvernement dit collaborer aussi avec différents interlocuteurs en vue de promouvoir la CRE à l’étranger.

Le réseau des missions diplomatiques du Canada veille à promouvoir des pratiques commerciales responsables. Il permet aussi aux différents acteurs de nouer des relations dans le cadre de conférences, d’ateliers et d’autres activités, auxquels participent des entreprises ainsi que des représentants des gouvernements hôtes, de la société civile et des communautés locales.Affaires mondiales Canada

Les mécanismes volontaires de règlement des différends

DOSSIER – Dans cette photo d’archive du mercredi 1er novembre 2006, des mineurs creusent pour trouver des diamants à Marange, au Zimbabwe. Selon les médias officiels du Zimbabwe, le gouvernement a promis de retirer les troupes des champs de diamants de Marange et s’est engagé à respecter les normes minières internationales. Certaines entreprises canadiennes exploitent ou prévoient d’exploiter des mines de diamants dans divers pays d’Afrique. (AP Photo/Tsvangirayi Mukwazhi-File)

Le gouvernement canadien explique aussi que plusieurs efforts en matière de conduite responsable des entreprises ont été entrepris récemment afin de « favoriser l’établissement de bonnes relations entre les entreprises et les parties prenantes ».

Toutefois, explique Affaires mondiales Canada, lorsque nécessaire, le pays dispose de deux mécanismes afin de faciliter le dialogue entre une entreprise et une communauté, de même que pour le règlement des différends :

  • Le processus d’examen du Point de contact national (PCN) du Canada pour les Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales, pour tous les secteurs, et
  • l’ombudsman canadienne pour la responsabilité des entreprises, récemment nommée.

Plusieurs chercheurs, dont Emmanuelle Sauriol du Groupe de recherche sur les activités minières en Afrique, s’entendent pour dire que les approches « volontaires » du gouvernement canadien ont essuyé des échecs retentissants, en plus de présenter de nombreux pièges.

L’association Solidarité agricole et alimentaire (Solagral), citée par Mme Sauriol, a développé pour sa part, une liste des effets potentiels associés à ces approches et à leurs limites.

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