Évacuations médicales sans parents dans le Nord-du-Québec : « Il faut demeurer vigilant »

Valerie-Lynn Gull et Pelle Loon. (Radio-Canada)
Le cofondateur de la campagne « Tiens ma main », le docteur Samir Sahaeen-Hussain, a témoigné jeudi à la Commission sur les relations entre les Autochtones et certains services publics (CERP). Il a expliqué avoir observé une diminution du nombre d’enfants du Nord-du-Québec évacués par voie aérienne sans leurs parents, mais estime qu’il est trop tôt pour baisser la garde face à cette problématique.

Rappelons que l’évacuation en solitaire avait été fortement dénoncée par plusieurs organismes, ce qui avait mené à l’adoption d’une politique pour encadrer l’accompagnement parental en juin dernier, par l’organisme gouvernemental Évacuations aéromédicales du Québec (EVAQ).

Une politique adoptée des mois après l’annonce de l’ancien ministre de la Santé, Gaétan Barrette, de revoir cette pratique.

Comme l’avait révélé Radio-Canada, la situation ne s’était toutefois pas réglée dans les mois qui ont suivi son adoption.

C’est ce qu’a pu constater le Dr Sahaeen-Hussain. « 40 à 50 % [des enfants du Nord-du-Québec] étaient encore envoyés seuls. La raison évoquée, c’était le manque d’espace ou toute la question de la non-disponibilité d’un agent de bord. Dans certains cas, s’il n’y avait pas d’agent de bord disponible, les parents ne pouvaient pas venir. »

Le docteur Samir Sahaeen Hussain témoignait à la Commission Viens, jeudi. (Radio-Canada)

Le Dr Sahaeen-Hussain a toutefois constaté une amélioration dans les dernières semaines. « J’espère que ça va continuer, parce que je le rappelle, dans les autres provinces, c’est vraiment une exception lorsque l’enfant est envoyé seul », explique-t-il.

« Il faut demeurer vigilant encore plusieurs mois, jusqu’à ce qu’on ait la certitude que tous les enfants sont accompagnés. »

Dr Sahaeen-Hussain
Des impacts majeurs sur l’enfant et les parents

Valerie-Lynn Gull et Pelle Loon, des parents de Waswanipi, ont raconté leur histoire à la commission Viens.

Ils avaient été forcés de laisser leur enfant être évacué sans leur présence, par l’EVAQ, en août dernier.

Valerie-Lynn Gull a expliqué que Pelle Jr a depuis dû recevoir un soutien psychologique en raison du choc qu’il a subi la nuit de son évacuation.

« Il n’arrêtait pas de pleurer, j’ai dû lui expliquer que je ne pouvais pas monter dans l’avion et il disait « j’ai seulement 6 ans, je ne peux pas faire cela seul, pourquoi ils font cela? » », a-t-elle raconté à la commission.

Pelle Jr a toujours, à ce jour, des problèmes de santé majeurs, et ses parents vivent dans la crainte d’être forcés de passer au travers d’une autre expérience traumatisante de la sorte. « Je m’inquiète constamment que mon fils doive être évacué médicalement, tout seul, j’ai toujours un sac préparé pour lui, avec ses médicaments. C’est une inquiétude constante », a raconté Mme Loon.

« J’espère que des changements seront apportés, non seulement pour mon fils, mais pour les autres enfants. »

Valerie-Lynn Gull

« Je me suis aperçu que ma femme et moi, nous sommes très affectés physiquement et mentalement; ça nous affecte tous les deux », a déclaré le père, Pelle Loon.

Le Dr Sahaeen-Hussain a rappelé lors de son témoignage qu’en plus de l’impact psychologique et émotionnel, une telle pratique est nuisible d’un point de vue clinique.

« On parle de soins médicaux qui ne sont pas adéquats, puisque le parent n’est pas présent pour parler des allergies, de l’historique médical de l’enfant. Le parent ne peut pas non plus donner le consentement pour une chirurgie », a-t-il expliqué.

Ces événements sont symptomatiques du racisme systémique, croit le Dr Sahaeen-Hussain. « Ça révèle toute l’histoire du colonialisme médical. Si on veut que les choses changent, les pratiques comme cela, il faut absolument les changer », a-t-il soutenu.

Thomas Deshaies, Radio-Canada

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