Jordin Tootoo, premier joueur inuit de la LNH, se remémore sa carrière et son parcours vers la sobriété
Premier joueur inuit de la Ligue nationale de hockey (LNH), Jordin Tootoo a bouclé la boucle le 19 octobre en annonçant sa retraite à Brandon, dans la province canadienne du Manitoba. Retour sur une carrière de hockeyeur qui lui a peut-être sauvé la vie.
Il aura passé 13 saisons dans la LNH, jouant avec les Predators de Nashville, les Red Wings de Détroit, les Devils du New Jersey et les Blackhawks de Chicago, mais c’est à Brandon, chez les Wheat Kings de la Ligue de hockey junior de l’Ouest (WHL), que Jordin Tootoo a salué pour la dernière fois les partisans.
« Ça a été incroyable de constater à quel point les fans ont apprécié mon séjour à Brandon », a déclaré l’homme de 35 ans, originaire de Rankin Inlet, dans le territoire nordique du Nunavut, devenu un joueur étoile et un modèle auprès de ses coéquipiers des Wheat Kings.
Boucler la boucle veut aussi dire pour l’ailier droit avoir lutté contre les dépendances, avoir fait face à la tragédie et avoir retrouvé la sobriété.
En 1999, quitter Rankin Inlet pour aller jouer à Brandon était une évidence pour Jordin Tootoo.
« Quitter la maison dans les circonstances… avec la présence de l’alcool et des drogues … ma porte de sortie c’était le hockey, j’étais heureux au hockey », dit-il.
Mais il lui aura fallu beaucoup de volonté pour vaincre ses démons. Le suicide de Terence, son frère aîné et coéquipier au sein des Wheat Kings, ébranlera le jeune homme.
Perdre celui qui était aussi son modèle et meilleur ami constituera un obstacle à sa carrière sportive, au cours de laquelle il devient éventuellement un défenseur de la santé mentale, de la prévention du suicide et de la sobriété.
« Aller jusqu’au bout »
Ces quelques mots, écrits sur une note laissée par son frère, auront un impact majeur sur la suite de sa carrière.
« Je pouvais soit quitter le hockey et abandonner notre rêve de jouer dans la LNH ou, comme le disait mon frère, aller jusqu’au bout », ajoute Jordin Tootoo qui jouera ensuite pendant 12 ans à Nashville et à Détroit où il s’est fait un nom en tant qu’attaquant robuste et pugiliste.
Les hauts et les bas
L’alcool reviendra pourtant le hanter. La pression du jeu, la perte de son frère et ses antécédents familiaux liés à la drogue et à l’alcool auront en partie raison de lui. En 2010, il reçoit un ultimatum clair. Il décide alors d’adhérer au programme de désintoxication de la LNH. « Pour moi, c’était ma carrière de hockeyeur ou je laissais l’alcool l’emporter », dit le jeune retraité dont la sobriété lui a permis de poursuivre sa carrière dans la ligue pendant huit années supplémentaires.
Sa famille et son avenir
Jamais Jordin Tootoo n’a tourné le dos à sa vie d’avant et à sa communauté, et ce, malgré sa carrière et sa vie de famille. Il retournait régulièrement à Rankin Inlet, où quiconque entre dans l’aréna passe sous une peinture grandeur nature du joueur de hockey en action.
« Pour moi, la maison restera toujours la maison », dit-il en ajoutant que c’est aussi l’occasion de chasser, de pêcher et de passer du temps en famille.
« Ils sont à mes côtés depuis le premier jour », se réjouit-il en précisant que malgré les problèmes auxquels ils ont fait face, ils sont restés très unis.
« Je me sens bien », conclut-il. « J’ai deux petites filles en bonne santé, une femme magnifique avec laquelle je passe plus de temps et, en fin de compte, le plus gros cadeau que l’on m’a jamais offert ce sont mes deux enfants et la sobriété. »