Mine Eagle Gold : un an après, les causes de l’accident révélées

Vue sur une mine d'or et un flanc de montagne, le 3 juillet 2024, près de Mayo, au Yukon.
La rupture de la plateforme de lixiviation en tas à la mine Eagle de Victoria Gold, le 24 juin 2024, a provoqué un glissement de terrain. Photo : Radio-Canada / Camille Vernet
Le 30 juin dernier, un rapport indépendant, commandité par le gouvernement du Yukon, a levé le voile sur les circonstances et les causes du glissement de minerai survenu à la mine Eagle Gold le 24 juin 2024.

Il y a maintenant un an, une défaillance de la plateforme de lixiviation en tas sur le site de la mine Eagle Gold appartenant à Victoria Gold Corporation (VGC) avait entrainé un déversement de minerai au-delà de la digue à la base de l’installation. 934 000 m³ de minerai et de la solution de traitement, ont franchi le barrage de confinement. Ces solutions contenaient du cyanure et d’autres métaux très toxiques pour l’environnement.

Cet accident a été décrit comme catastrophique par le ministre de l’Énergie, des Mines et des Ressources, John Streicker, qui dès juillet 2024 a reconnu l’urgence de la situation.

« Nous traitons cette situation comme une intervention d’urgence, en prenant en compte les conséquences possibles sur les personnes et l’environnement. » 

Un homme s'exprime derrière un micro. Un autre, situé à sa droite, le regarde.
Le ministre de l’Énergie, des Mines et des Ressources, John Streicker. (Photo : Radio-Canada/Jackie Hong)

Le 2 juillet 2025, M. Streicker a rappelé que la complexité de l’accident et les multiples conséquences, notamment environnementales, nécessitaient une évaluation par un groupe d’experts indépendant.

« Dès le départ, nous avions reconnu la nécessité de ce rapport avant de prendre toute décision sur une éventuelle enquête publique. Maintenant que nous disposons de cette information, nous allons l’examiner avec attention pour déterminer les prochaines étapes. » 

Pour faire la lumière sur ce qui s’est réellement passé, une enquête indépendante a été demandée par le gouvernement du Yukon en août 2024.

Le Comité d’examen indépendant, appelé Independent Review Board (IRB), a remis un rapport de 141 pages le 30 juin 2025 qui détermine les causes et les facteurs ayant contribué à l’accident, plus particulièrement par l’analyse de la conception, de la construction, de l’exploitation, de l’entretien et de la surveillance de l’infrastructure.

De multiples causes

Selon les trois membres du comité et les trois experts techniques, presque toutes les défaillances catastrophiques survenues dans le passé, comme au barrage de Mount Polley en Colombie-Britannique en 2014, sont dues à de multiples facteurs.

Et l’accident survenu à la mine Eagle Gold n’échappe pas à cette constatation.

Une gestion inadéquate de la qualité du minerai, une défaillance du système de collecte des solutions, une accumulation d’eau liée aux précipitations du printemps et de l’été 2024 sont quelques-unes des raisons avancées par le groupe d’experts mandatés.

Il est clair qu’il y a eu des actions et des inactions de la part de VGC, et les différents tiers ayant contracté Victoria Gold, qui ont directement ou indirectement contribué à l’échec. Par exemple, si la variabilité de la qualité du minerai avait été gérée de manière adéquate ou si l’intégrité du système de collecte avait été assurée, cette défaillance ne se serait probablement pas produite », indique le rapport.

Une des digues de confinement construites dans la vallée de Dublin Gulch, en amont du glissement de terrain. (Gouvernement du Yukon)

Plusieurs dommages techniques

En plus du glissement de terrain, le rapport montre que la défaillance a endommagé les systèmes de distribution et de récupération de la solution de cyanure, a détruit le système de pompage pour récupérer la solution de lixiviation et a endommagé l’alimentation électrique des pompes.

Le site disposait d’un stockage très limité au moment de la défaillance et aucune usine de traitement n’était adaptée pour traiter la solution de lessivage du tas afin qu’elle puisse être déchargée en toute sécurité.

La défaillance de l’installation résulte d’une « série d’évènements, de décisions et de problèmes au cours des différentes phases du projet. Si une série de mesures et de processus avait été mise en place, tant d’un point de vue technique qu’organisationnel, la probabilité de cet évènement aurait été considérablement réduite ». 

Vers une nouvelle industrie minière au Yukon?

Tout en assurant qu’une activité minière peut être poursuivie en toute sécurité dans des climats froids comme au Yukon, le rapport recommande cependant que des projets fassent preuve d’un niveau de rigueur approprié et constant lors de leur planification, de leur conception, de leur construction, de leur exploitation, mais aussi au moment de leur fermeture.

« Cela peut être réalisé grâce à l’amélioration des systèmes et des processus de gestion à toutes les phases du cycle de vie du projet. »

Alors que des changements dans les pratiques de l’industrie minière et dans les processus de régulations ont été clairement explicités en conclusion du rapport, John Streicker a indiqué que le gouvernement du Yukon examinait les conclusions de la commission ainsi que les recommandations.

Sans pour autant donner une échéance précise, le gouvernement a dit s’engager à prendre les mesures appropriées, au besoin.

Une vue de l’installation de lixiviation en tas à la mine Eagle de Victoria Gold, près de Mayo, au Yukon. (Radio-Canada/Camille Vernet)

Les dates à retenir

  • 24 juin 2024 : La défaillance de l’infrastructure de lixiviation en tas provoque un glissement de terrain qui déplace environ 4 millions de tonnes de minerai, dont la moitié environ n’est pas retenue par le remblai et a glissé.
  • 10 juillet 2024 : Le gouvernement du Yukon (YG) donne un ordre pour contraindre la compagnie minière Victoria Gold Corporation (VGC) à prendre des mesures immédiates pour augmenter la capacité de stockage de l’eau, stabiliser la zone accidentée, élargir la surveillance de l’eau et établir un plan complet de traitement de l’eau.
  • 19 juillet 2024 : La compagnie CoreGeo est mandatée par YG pour évaluer et surveiller la qualité de l’eau sur le site et à l’extérieur.
  • 20 juillet 2024 : YG donne des ordres supplémentaires pour contraindre VGC à mettre en place les mesures nécessaires.
  • 30 juillet 2024 : VGC n’a pas construit de digue de sécurité comme YG le lui avait demandé. Des entrepreneurs privés sont embauchés pour assurer cette construction.
  • Entre les 31 juillet et 2 août 2024 : 68 poissons morts par contamination sont retrouvés dans le ruisseau Haggart à proximité du site.
  • 13 août 2024 : YG ordonne à VGC d’installer des grilles pour éloigner les poissons de la zone contaminée.
  • 14 août 2024 : YG indique ne plus avoir confiance en VGC et ordonne la nomination d’un séquestre pour prendre le contrôle des biens de la compagnie, y compris de la mine Eagle Gold, en vertu de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité du gouvernement fédéral.
  • 3 septembre 2024 : Une commission d’examen indépendante, dont le mandat cadre avec les lignes directrices du Yukon pour les installations de gestion des résidus miniers, est mise sur pied par YG.
  • 12 juin 2025 : Le séquestre de VGC, nommé par le tribunal, informe le gouvernement du Yukon que l’or a commencé à être extrait de l’eau cyanurée entreposée à la mine Eagle Gold. Les revenus générés par la vente de cet or aideront à financer les travaux en cours sur le site et à compenser les fonds publics utilisés pour la remise en état de la mine.

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Nelly Guidici, L'Aquilon

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