Des éducateurs de Yellowknife craignent la réduction de personnel

Une image de l'école Mildred Hall à Yellowknife.
Mildred Hall est l’une des écoles primaires les plus anciennes de Yellowknife. Depuis huit ans, elle a bénéficié de plusieurs millions de dollars du principe de Jordan pour financer des postes d’aides-enseignants. (Photo : CBC/Sidney Cohen)

En prévision de la rentrée scolaire, des éducateurs de Yellowknife s’inquiètent des réductions de personnel causées par les récentes modifications du principe de Jordan.

L’école Mildred Hall bénéficie depuis maintenant huit ans d’un financement grâce au programme. Selon un enseignant qui a demandé à rester anonyme pour protéger l’identité de ses élèves, ce financement permet d’offrir un soutien scolaire et émotionnel, des conseils en santé mentale et une éducation culturelle aux enfants ayant des besoins complexes.

Le principe de Jordan est une initiative fédérale qui vise à assurer l’accès aux soins de santé, aux services sociaux et éducatifs pour les enfants des Premières Nations.

Cependant, en février, le gouvernement a décidé de restreindre les critères d’admissibilité, notamment en ne finançant plus les demandes émanant d’écoles situées en dehors des territoires des communautés autochtones, à moins de circonstances exceptionnelles.

Depuis, la Commission scolaire publique no 1 de Yellowknife (YK1) a annoncé la suppression de 79 postes d’aides-enseignants. En outre, 90 demandes de financement émanant des Territoires du Nord-Ouest, dont celle de YK1, attendent toujours une réponse du ministère fédéral des Services aux Autochtones.

Une image du bureau de la Commission scolaire publique no 1 de Yellowknife.
La Commission scolaire publique no 1 de Yellowknife a récemment annoncé la suppression de 79 postes d’aides-enseignants. Elle attend également une réponse du ministère des Services aux Autochtones pour sa demande de financement pour l’année scolaire à venir. (Photo : CBC/Sidney Cohen)

Au moment de la publication de cet article, Mildred Hall prévoit passer de 29 à 12 aides pédagogiques. Six postes supplémentaires de soutien aux élèves devraient également être supprimés pour l’année scolaire à venir.

Sans ce financement, nous ne serons plus en mesure de répondre aux besoins des élèves, affirme un enseignant de l’école Mildred Hall.

Des conséquences pour tous les élèves

L’école accueille un grand nombre d’élèves ayant des besoins complexes, qu’il s’agisse d’un handicap physique, de troubles sociaux ou d’apprentissage.

Selon l’enseignant, plusieurs enfants ont un niveau d’alphabétisation et de compréhension bien inférieur à leur niveau scolaire et ont besoin d’une aide qui dépasse ce que peut leur apporter un enseignant seul.

Les assistants ont pour rôle d’accompagner les élèves sur les plans scolaire, physique et émotionnel.

Une photo du bâtiment en forme de tipi, qui se trouve à l'école Mildred Hall.
L’école Mildred Hall accueille un grand nombre d’élèves issus des Premières Nations et propose une variété d’occasions d’enseignement culturel. (Photo : CBC/Sidney Cohen)

L’un des assistants ayant perdu son poste à cause des nouvelles restrictions affirme avoir dû gérer plusieurs crises chez les élèves. Il demande que son nom ne soit pas révélé, car YK1 ne lui a pas permis de parler aux médias.

Les élèves qui n’ont pas de besoins complexes et qui essaient seulement d’apprendre ne peuvent pas le faire, car les conditions ne sont pas propices à l’apprentissage, explique-t-il.

D’après Rita Mueller, présidente de l’Association des enseignants et enseignantes des Territoires du Nord-Ouest, YK1 perdra plus de la moitié de son personnel d’aide-enseignant durant cette année scolaire.

Rita Mueller
Rita Mueller est présidente de l’Association des enseignants et enseignantes des Territoires du Nord-Ouest. (Photo : Rita Mueller)

Elle qualifie cette situation de très alarmante, car elle aura des conséquences négatives sur les enfants, leur famille et le reste du personnel des écoles.

Pendant l’année fiscale 2024-2025, les écoles des T.N.-O. ont reçu 58,6 millions de dollars du programme du principe de Jordan.

Selon Mme Mueller, cette somme permet de pallier les insuffisances budgétaires du système éducatif territorial.

Réponse du fédéral

Mandy Gull-Masty, ministre fédérale des Services aux Autochtones, n’était pas disponible pour une entrevue.

Dans un courriel, Eric Head, un porte-parole du ministère, affirme que le nombre de demandes de financement au principe de Jordan a augmenté de 367 % entre 2021 et 2024.

Il ajoute que l’éducation de tous les enfants des T.N.-O., y compris ceux d’origine autochtone, incombe au gouvernement territorial. Il a aussi souligné que la formule de financement des territoires venait appuyer le Nord.

La décision d’accepter ou de rejeter une demande dépend des besoins individuels de chaque enfant des Premières Nations, et non de l’ensemble de la population autochtone, a-t-il écrit.

Les T.N.-O. à bout de moyens

Lors d’une séance d’information publique la semaine dernière, la ministre de l’Éducation des T.N.-O., Caitlin Cleveland, a déclaré que son ministère n’avait pas les fonds nécessaires pour combler le déficit de financement du fédéral.

Dans une déclaration écrite, elle indique que le principe de Jordan est essentiel pour plusieurs communautés du Grand Nord.

Caitlin Cleveland à l'Assemblée législative.
Caitlin Cleveland est la ministre de l’Éducation des Territoires du Nord-Ouest. Elle soutient que le financement du principe de Jordan contribue à garantir que les enfants de Premières Nations reçoivent les services dont ils ont besoin. (Photo : Radio-Canada/Mario De Ciccio)

Elle assure d’ailleurs qu’elle continuera de faire pression sur le gouvernement fédéral pour qu’il revienne sur sa décision et adopte une approche prenant en considération les particularités régionales.

 Faire marche arrière à ce stade menacerait les progrès accomplis, dit Caitlin Cleveland, ministre de l’Éducation des T.N.-O.

Un portrait de Naiomi Metallic.
Naiomi Metallic est une avocate autochtone. (Photo : Naiomi Metallic)

Selon Naiomi Metallic, avocate membre de la Première Nation Listuguj Mi’gmaq et enseignante à l’Université Dalhousie, il incombe aux gouvernements fédéral et territorial de fournir les services requis, faute de quoi ils pourraient faire l’objet d’une plainte auprès du commissaire aux droits de la personne ou être poursuivis en justice.

Cependant, ces procédures sont longues et ne permettraient pas d’obtenir les assistants pédagogiques manquants à Mildred Hall avant la rentrée scolaire.

C’est triste de penser que, sans ce soutien, nous pourrions retomber dans la mauvaise passe, déplore l’enseignant de l’école Mildred Hall qui a souhaité rester anonyme. Nous aimons nos élèves et nous sommes profondément attachés à leur bien-être et à leur réussite.

Avec les informations de Sidney Cohen

Radio-Canada

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