(Craig Chivers/CBC)

Trop de sucre ajouté dans l’alimentation de la forte majorité des tout-petits

Une nouvelle étude américaine révèle que l’industrie alimentaire nous rend accroc au sucre dès notre naissance en raison de l’omniprésence du sucre ajouté dans la nourriture des nourrissons.

Selon l’enquête américaine, plus de 50 % des nourrissons et presque tous les tout-petits dépassent l’apport quotidien en sucre recommandé tant aux États-Unis qu’au Canada.

Kirsten Herrick – USNC

Selon la chercheuse principale Kirsten Herrick, de l’Institut national du cancer des États-Unis à Bethesda dans l’état du Marykand, la surconsommation de sucre, sous forme de sucre ajouté, commencé en très bas âge et elle a augmenté très rapidement au cours des récentes années.

L’équipe de Herrick a analysé les données alimentaires touchant 1 211 jeunes enfants et constaté que les nourrissons consommaient ainsi environ une cuillerée à thé de sucres ajoutés par jour ; les tout-petits en consommaient pour leur part environ six cuillerées à thé par jour!

L’étude publiée dans le Journal of the Academy of Nutrition and Dietetics révèle que près de 61 % des nourrissons (6 à 11 mois d’âge) et 98 % (12 à 23 mois d’âge) consommaient quotidiennement des sucres ajoutés. Ces sucres ajoutés se trouvaient principalement dans les yogourts aromatisés et les boissons aux fruits.

Les purées pour bébés sont sous la loupe au Canada. Photo : IStock

Nourritures pour bébés et sur le pouce « bourrées » de sucre au Canada

Des chercheurs canadiens qui avaient eux-mêmes examiné, en 2017, la proportion de sucre ajouté contenu dans différents produits alimentaires emballés et vendus au Canada s’attendaient à retrouver celui-ci en grande quantité dans les friandises. Ils avaient pourtant été surpris par son omniprésence dans la nourriture pour bébés, dans les barres tendres et dans les boissons.

Les chercheurs se sont penchés sur la présence de 30 types de sucre ajouté en se basant sur l’étiquetage des produits en vente, en mars 2015, dans les plus grandes chaînes d’épiceries canadiennes.

David Hammond (Université de Waterloo)

David Hammond, professeur à l’école de santé publique de l’Université de Waterloo, en Ontario, qui a travaillé sur cette recherche, soulignait que les trois quarts des boissons comportent aujourd’hui des sucres ajoutés, de même que des produits que les gens associent souvent à un choix santé, comme les barres tendres.

Environ la moitié des produits destinés aux bébés examinés par les experts contenaient du sucre ajouté, avait révélé M. Hammond. En fait, les deux tiers des produits dont la liste d’ingrédients a été passée en revue – plus de 40 000 au total – contenaient au moins une forme de sucre ajouté.

« Les gens font la différence entre une bouteille de jus d’orange et une bouteille de Coca-Cola [croyant que la première] est bien meilleur en matière de sucres contenus, indiquait David Hammond en exemple. Eh bien, si vous regardez notre analyse, cela vous dit, tout comme d’autres sources, que les jus contiennent en fait autant de sucre que les boissons gazeuses. »

Pas de surprise quant à la découverte d’une omniprésence du sucre

Jess Haines – Université de Guelph

Jess Haines, professeur agrégé de nutrition appliquée à l’Université de Guelph en Ontario, n’est pas surpris par les résultats de la plus récente enquête américaine.

« Les enfants mangent comme nous le faisons. Et les adultes, tant aux États-Unis qu’au Canada, mangent beaucoup de sucre », dit-elle.

Selon Mme Haines, sa propre université est parvenue à des conclusions similaires dans le cadre d’une étude à long terme sur la santé des familles de Guelph, où les chercheurs ont examiné diverses habitudes des enfants âgés de 18 mois à cinq ans.

En ce qui concerne l’alimentation, on a constaté que 54 % d’entre eux dépassaient les six cuillères à café de sucre par jour recommandé.

M. Haines affirme que tout ce sucre ajouté peut avoir des effets à long terme sur la santé, à commencer par les caries.

« On voit aussi que lorsque les enfants ont un apport en sucre plus élevé qui se maintient tout au long de leur vie, on peut voir un risque accru de maladies cardiovasculaires, le diabète de type 2 plus tard dans la vie. »

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Photo : Radio-Canada

La présence insidieuse du sucre serait liée à un complot datant de plus de 50 ans

Une publicité d’un passé encore récent. (archives)

Ce n’est pas la première fois que l’industrie alimentaire et Coca-Cola particulièrement est montrée du doigt. On a prouvé il y a quelques années, par exemple, que Coca-Cola était derrière l’organisme Global Energy Balance Network, une fondation dirigée par un réputé chercheur américain qui niait l’impact des boissons sucrées sur la santé.

Par ailleurs, en 2016, on apprenait que l’industrie du sucre en Amérique du Nord avait essayé de cacher les effets de ses produits sur la santé en payant des scientifiques pour mettre en doute les résultats de certaines recherches, un peu comme l’a fait l’industrie américaine du tabac. C’est ce que révélait des documents internes qui ont fait l’objet d’une publication dans l’American Medical Association’s Journal of Internal Medicine.

Ces documents montrent qu’au milieu des années 1960, en payant des scientifiques reconnus, l’industrie sucrière en Amérique du Nord a tenté de minimiser la nocivité du sucre, notamment en ce qui concerne son lien avec les maladies cardiovasculaires.

Cette industrie utilisait la même stratégie que les entreprises de tabac. Elle a embauché des professionnels de la santé et financé des recherches scientifiques qui faisaient porter le blâme de l’obésité sur la sédentarité, entre autres.

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En parvenant à cacher les effets du sucre sur la santé, notamment en accusant le gras, l’industrie du sucre a influencé les politiques de santé publique. Crédit photo : iStock

Pour terminer, la bonne nouvelle

Une analyse de Statistique Canada concernant plus de 45 000 Canadiens, âgés de 2 ans et plus, révélait récemment que les Canadiens consomment un peu moins de sucre, notamment moins de boissons sucrées, ce qui inclut les jus de fruits comportant moins de 100 % de jus.

Selon notre agence nationale de la statistique, le total de sucre consommé a diminué pour tous les groupes d’âge de 2004 à 2015.

La consommation quotidienne moyenne de sucres totaux en 2015 était ainsi de 101 grammes, comparativement à 104 grammes en 2004 chez les enfants de 2 à 8 ans, puis de 115 grammes, comparativement à 128 grammes, chez les enfants de 9 à 18 ans, et de 85 grammes, comparativement à 93 grammes, chez les adultes canadiens. Cent grammes de sucre correspondent à environ 24 cuillères à thé, soit près de 4 grammes de sucre par cuillères à thé.

Les boissons sucrées constituent toujours cependant la principale source de consommation de sucres chez les Canadiens. Ils représentent 22 % des sucres totaux chez les jeunes enfants, 30 % chez les enfants plus âgés et 24 % chez les adultes.

RCI avec les informations de Marcy Cuttler et de Lauren Pelly de CBC news et la contribution d’Annie Desrochers, Catherine Lefebvre, Philippe Leblanc, et Michel Désautels de Radio-Canada

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Catégories : Économie, Santé, Société
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