Le Canada a failli perdre toutes responsabilités au sein de la mission de l’ONU de 2018 au Soudan du Sud parce qu’il n’avait pas assez de femmes en uniforme.
Selon les informations de CBC News, en 2018, l’ONU a été dissuadée d’enlever au Canada la chance de participer activement à une importante mission de Casques bleus au Soudan en raison d’une présence trop faible appréhendée de femmes militaires canadiennes dans cette mission.
Selon les documents obtenus par CBC News, les responsables canadiens ont assuré à l’organisation mondiale qu’un meilleur système de rotation serait mis en place par le ministère de la Défense nationale qui permettrait d’affecter à la mission soudanaise le nombre suffisant de femmes pour répondre aux directives de l’organisme mondial.
Les directives de l’ONU stipulent que, pour les missions d’observation comme celle au Soudan du Sud, 15 % des postes d’officiers d’état-major et d’observateurs militaires de chaque pays doivent être occupés par des femmes. (Les opérations déployées, comme la mission récemment achevée au Mali, ont des paramètres moins exigeants.)
Une note interne au ministère de la Défense du Canada
Une note interne d’un fonctionnaire au ministre de la Défense Harjit Sajjan datée du 29 octobre 2018 affirme que « le Canada n’a pas atteint l’objectif fixé au cours du dernier trimestre, et en conséquence, fin septembre, l’ONU a fait savoir que la position de la CAF dans la MINUS (Mission des Nations unies au Soudan du Sud) allait être réaffectée à un autre pays. L’ONU a depuis indiqué qu’elle ne réallouerait pas la position, étant donné les mesures que la CAF met en place pour rectifier la situation ».
« Les premiers rapports ont montré depuis plus d’un an que nous n’avons pas toujours atteint l’objectif de 15 %. Par exemple, nous étions à 8,7 % en octobre 2017, 15,8 % en mai 2018 et 4,8 % en août », indique le document, obtenu par CBC News grâce à la Loi sur l’accès à l’information.
Une situation embarrassante
Un fonctionnaire de la Défense ayant connaissance du dossier déclare que le Canada n’était pas le seul pays à avoir reçu un avertissement de l’ONU à l’automne 2018.
Si l’ONU avait mis à exécution sa menace, l’optique politique au Canada et à l’extérieur de nos frontières aurait cependant pu être négative pour le gouvernement libéral de Justin Trudeau qui se fait champion de l’égalité homme-femme au pays et dans le monde.
Depuis 2018, le gouvernement canadien a fait du recrutement d’un plus grand nombre de femmes pour les opérations de maintien de la paix une priorité politique. Cela a d’ailleurs été mentionné de manière évidente lors de la récente tournée du premier ministre Trudeau en Afrique, où il a tenté de susciter un soutien à la candidature du Canada pour un siège au Conseil de sécurité.
C’est en juin prochain que deux sièges seront attribués par un vote de l’Assemblée générale de l’ONU. Les pays en lice pour un siège au conseil auront besoin des deux tiers des voix au scrutin secret, soit plus de 128 voix. Or, l’Afrique est l’un des blocs les plus influents avec 54 membres votants.
Une catégorie de militaires qui risque d’être surexploitée?
Stefanie von Hlatky, professeur associé d’études politiques à l’Université Queen’s, estime que les femmes qui servent dans les Forces armées canadiennes pourraient faire face à une pression unique, étant donné leur nombre limité.
« Si les Forces armées canadiennes doivent constamment atteindre cet objectif et qu’elles n’ont tout simplement pas les effectifs nécessaires pour atteindre systématiquement l’objectif de 15 % d’une rotation à l’autre, les femmes pourraient être davantage poussées à se déployer plus souvent et cela pourrait avoir un impact sur la trajectoire de carrière des femmes », dit Mme Von Hlatky.
RCI avec les informations de CBC News
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