Des membres des Premières Nations canadiennes dénoncent à tour de rôle le racisme systémique au sein des établissements d’administration de la justice et des forces de police du pays. Ils demandent également l’ouverture d’enquêtes avec la participation d’Autochtones pour que la lumière soit faite sur leur réalité.
Depuis le début de 2020, plusieurs membres de Premières Nations sont décédés lors d’interventions policières. Les deux morts les plus récentes, celles de Chantel Moore et Rodney Levi, ont eu lieu peu après les grandes manifestations contre le racisme systémique dans les villes canadiennes les plus populeuses.
Au Nouveau-Brunswick
Mercredi, les six chefs des nations wolastoqey et micmaque de cette province ont rencontré par vidéoconférence le premier ministre provincial Blaine Higgs et plusieurs ministres de son cabinet.
Les chefs ont fait part de leurs préoccupations concernant les préjugés systémiques et le racisme à l’égard des populations autochtones dans les systèmes de police et de justice. Ils disent avoir réitéré leur appel pour une enquête indépendante sur ces problèmes. Elle serait dirigée par des Autochtones et les délais seraient courts « pour garantir une action rapide ».
Les chefs autochtones ont demandé au premier ministre Higgs de nommer une commission d’enquête dans les plus brefs délais et de s’engager à en mettre en œuvre les recommandations.
Il faut passer à l’action dès maintenant. Nous avons été très déçus de la réponse du premier ministre Higgs. Bien que son ministre des Affaires autochtones ait reconnu l’existence des préjugés et du racisme, le premier ministre Higgs n’est pas prêt à le reconnaître.
Et même si son ministre estime qu’une enquête devrait être ouverte, le premier ministre Higgs refuse de donner son appui. Nous espérons que l’Assemblée législative adoptera la motion 69 demandant une enquête et que cela amènera le premier ministre Higgs à enfin céder, à écouter les voix autochtones et non autochtones et à lancer cette enquête.Chefs des communautés Matawaskiye, Neqotkuk, Wotstak, Pilick, Sitansisk et Welamoktok
Au Nunavik
La Société Makivik, un organisme de défense des droits des Inuit, a demandé mercredi au gouvernement du Québec de réformer « complètement » l’administration de la justice dans le territoire arctique du Nunavik.
La réforme demandée devrait comprendre, selon cet organisme, les services de protection de la jeunesse, les services aux jeunes contrevenants et le service de police du Nunavik, soit le corps de police régional Kativik.
Les rapports successifs qui ont été produits à ce sujet recommandent une telle réforme et de multiples études soulignent les lacunes du système de justice et des services policiers. Ce sont les Inuit qui souffrent de cette discrimination, et ce, à tous les niveaux, y compris l’éducation, les soins de santé et l’administration des communautés.
Les services de la protection de la jeunesse ont été mis en place pour protéger les enfants inuit, mais, au lieu de cela, ils détruisent des familles et violent les droits des enfants et des parents. Le gouvernement du Québec s’est contenté de croiser les bras et de laisser faire. »Charlie Watt, président de la Société Makivik
L’organisme dit qu’il suivra attentivement le groupe d’action nouvellement mis en place par le premier ministre québécois François Legault pour lutter contre le racisme systémique dans la province, notamment auprès des peuples autochtones.
Représentation autochtone
En effet, le bureau des enquêtes indépendantes (BEI), qui examine les cas où des civils sont gravement blessés ou tués lors d’opérations policières, dont ceux de Chantel Moore et de Rodney Levi, n’a pas de représentation autochtone dans son unité.
Sylvie Boutin, porte-parole de l’organisation, a déclaré que le BEI travaille au recrutement d’enquêteurs inuit et des Premières Nations pour une plus grande représentation.
« Lors du prochain appel de candidatures, le BEI s’assurera que la publication de cette offre d’emploi sera largement diffusée dans les communautés du Québec », a-t-elle déclaré dans un courriel à CBC News.
L’année dernière, le rapport complémentaire du Québec sur l’enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées a demandé à la province d’imposer la nomination de représentants autochtones dans toutes les institutions responsables de la formation des policiers et du contrôle du travail policier, y compris au BEI.
Pour sa part, Naiomi Metallic, professeure adjointe et titulaire de la chaire du chancelier en droit et politique autochtones à l’Université Dalhousie en Nouvelle-Écosse, a dit que surveiller le travail de la police est important, mais s’inquiète du manque de représentation des indigènes et a demandé si l’agence fait du bon travail et est réceptive aux peuples indigènes.
Elle a aussi dit qu’au Canada, il y a « une longue histoire » de la façon dont les forces de police ont essentiellement été un outil de colonisation.
Mercredi, le premier ministre canadien, Justin Trudeau, a reconnu que les systèmes existants au pays n’ont pas permis de répondre de manière adéquate aux préoccupations concernant le comportement de la police, y compris de la police montée.
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RCI avec CBC News, Société Makivik, la nation Wolastoqey au Nouveau-Brunswick, la Presse canadienne.
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