Le président Vladimir Poutine a annoncé mardi que la Russie devenait le premier pays à approuver l’utilisation d’un vaccin contre la COVID-19, après moins de deux mois de tests préliminaires sur les humains et sans qu’un essai plus vaste sur des milliers de patients soit terminé.
Il annonçait du même coup qu’un conglomérat commercial russe, Sistema, envisageait de mettre le vaccin en production de masse d’ici la fin de l’année. Des accords internationaux ont été conclus pour produire 500 millions de doses par an.
Ces avancées saluées par le dirigeant russe comme étant une nouvelle preuve des prouesses scientifiques de son pays suscitent de sérieuses inquiétudes chez les experts scientifiques internationaux et l’incrédulité notamment au Canada.
Seulement 10 % environ des essais cliniques sont généralement couronnés de succès, et la vitesse avec laquelle la Russie a agi fait craindre que Moscou fasse passer le prestige national avant la sécurité.
Un vaccin éclair peu testé
L’Association des organisations d’essais cliniques (ACTO), basée à Moscou, un organisme commercial représentant les principaux fabricants de médicaments en Russie, a demandé cette semaine au ministère de la Santé russe de reporter l’approbation du vaccin.
L’association a déclaré au journaliste indépendant Dan Ashby qu’elle estime que le vaccin a été testé jusqu’à présent sur seulement 76 personnes.
S’exprimant lors d’une réunion gouvernementale à la télévision d’État, M. Poutine a balayé les craintes. Il a déclaré que le vaccin, développé par l’Institut Gamaleya de Moscou, était sûr et qu’il avait même été administré à l’une de ses filles.

« Je sais que le vaccin fonctionne assez efficacement, qu’il forme une forte immunité et, je le répète, il a passé tous les contrôles nécessaires », a déclaré M. Poutine en conférence de presse mardi. (Alexei Druzhinin/AFPSource:AFP)
Réactions canadiennes
L’administratrice en chef de la santé publique au pays affirme que le Canada ne fera pas de compromis dans le processus d’évaluation et d’approbation d’un éventuel vaccin contre la COVID-19.
La Dre Theresa Tam se dit prudemment optimiste de mettre au point un vaccin dans des délais relativement rapides, mais elle affirme que la sécurité ne sera pas compromise pour y parvenir. Elle dit faire pleinement confiance au processus d’approbation de Santé Canada.
Son adjoint, le Dr Howard Njoo, souligne que le produit russe est passé de la découverte à l’approbation exceptionnellement rapidement et qu’il n’y a pas vraiment d’informations disponibles sur la sécurité ou l’efficacité du vaccin russe ou sur le nombre de personnes ayant participé aux tests.

L’administratrice en chef de la santé publique du Canada, la Dre Theresa Tam, promet que la sécurité de la population ne sera jamais compromise pour accélérer la mise en marché d’un vaccin. (Justin Tang/La Presse canadienne)
Le Dr Njoo trouve « un peu surprenant » que le produit russe soit passé aussi rapidement de la phase découverte à la phase approbation.
« On sait que pour les essais (cliniques) de phase 3, ça prend des dizaines de milliers de personnes, a-t-il rappelé mardi. Il faut analyser les résultats après beaucoup de mois, avec beaucoup de personnes vaccinées. »
En cela il rejoint la critique exprimée par l’Organisation mondiale de la santé qui dit ne pas avoir reçu suffisamment d’informations sur le vaccin russe pour l’évaluer.
Au 31 juillet, l’Organisation mondiale de la santé a répertorié deux essais de phase 1 – de petits tests de sécurité préliminaires avec des volontaires sains – pour le vaccin. Chacun de ces essais sur 38 volontaires devait être achevé le 15 août, et aucun résultat n’a été publié.
LISEZ LA SUITE : COVID-19 : des vaccins qui suscitent craintes et espoirs chez les Canadiens
RCI avec CBC News et La Presse canadienne
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