Moment d’espoir et d’anxiété pour beaucoup d’immigrants qui veulent faire venir leurs parents ou leurs grands-parents au Canada dans le cadre du programme canadien de regroupement familial, car s’ouvre aujourd’hui à midi (heure de Toronto et de Montréal) le portail en ligne du ministère canadien de l’Immigration.
Ce portail les guide vers un formulaire qui leur permettra de participer à une loterie où ils pourront faire leur demande de parrainage. Ils n’ont que trois semaines pour le faire et il y aura, on l’anticipe, beaucoup d’appelés, mais très peu d’élus dans le contexte d’une pandémie qui vient grever les ressources du ministère.
Environ 10 000 places convoitées seront attribuées au hasard par le biais de cette loterie. Les 10 000 candidats chanceux devront alors faire une demande officielle d’immigration. Ils n’auront que 60 jours pour le faire.
Cliquez ici pour parrainer vos parents et grands-parents – Gouvernement du Canada
Grace Sorenson fait partie des dizaines de milliers d’immigrants au Canada qui encore cette année espèrent parrainer des parents ou des grands-parents pour qu’ils viennent vivre au Canada de façon permanente. Elle est l’enfant unique d’une mère veuve qui a maintenant 87 ans et qui n’a plus aucune famille aux Philippines.
À l’autre bout du monde, en Ukraine, une autre octogénaire espère que la chance lui sourira. Son fils, Alex Konstantinovski, tente sans succès depuis des années de la parrainer.
Selon lui, le processus d’immigration canadien est généralement complet et équitable, mais ce n’est pas le cas du programme de parrainage des parents et grands-parents, qui mise sur une loterie et donc seulement le hasard pour trancher.

Alex Konstantinovski espère parrainer sa mère Svitlana Konstantinovska, qui vit actuellement en Ukraine. (Soumis par Alex Konstantinovski)
Un système de sélection arbitraire et insensible?
Certains ont suggéré que le gouvernement canadien tienne compte dans son processus de sélection de la durée du séjour du demandeur au Canada, de ses moyens financiers et des circonstances de compassion lorsqu’il donne la priorité aux demandes de regroupement familial.
D’autres ont suggéré un modèle pondéré qui donnerait à chaque candidat une plus grande chance de réussite pour chaque année suivante où il postule. Ce système augmenterait donc les chances d’un individu à la loterie en fonction du nombre d’années pendant lesquelles il a exprimé son intérêt pour le parrainage familial.
Lee-Anne Stuart est d’accord. Elle est au Canada depuis huit ans et a hâte de faire venir ses parents d’Afrique du Sud. Après s’être portée candidate chaque année depuis 2016, elle dit qu’elle perd espoir. « Il y a des gens (qui) à leur première tentative sont capables de parrainer leurs parents, puis d’autres personnes essaient depuis 10 ans. Je pense que ce n’est pas juste », dit-elle.
Stuart a déclaré que si elle avait su qu’il n’y avait aucune chance que ses parents puissent la rejoindre, elle n’aurait peut-être pas choisi d’immigrer au Canada.
« Je veux être avec ma famille, et l’idée de ne pas les avoir ici à terme est très difficile à gérer pour moi personnellement », a-t-elle déclaré. « J’ai même envisagé d’y retourner parce que je ne peux pas vivre sans les avoir avec moi ».
Chose certaine, le recours à une loterie est largement désapprouvé non seulement en raison de ses résultats aléatoires mais aussi en raison des blessures causées par les dérapages des années précédentes.

Le ministre de l’Immigration Mendicino a déclaré que la loterie de l’année prochaine offrirait 30 000 places. Créateur : Ryan Remiorz | Crédits : The Canadian Press
De mauvaises expériences
En présentant les modalités de fonctionnement de la loterie cette année, le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, Marco Mendicino, disait estimer que la loterie éviterait cette année les lacunes du passé. « Nous avons donc voulu créer des conditions égales pour tous autant que possible », a dit le ministre Mendicino.
En janvier 2017, le gouvernement Trudeau a mis en place un premier système de tirage au sort pour réunir les familles immigrantes avec leurs parents. Plus de 95 000 personnes au pays ont alors rempli les formulaires en ligne. Ce passage à la loterie a suscité la colère, comme en ont fait foi une foule de courriels et de lettres adressées en 2017 au ministère et au premier ministre Trudeau.
Après avoir supprimé ce système des loteries, le gouvernement libéral est donc passé l’an dernier à un système de candidature en ligne selon le principe du « premier arrivé, premier servi ». Cette méthode a elle aussi rendu des dizaines de milliers de personnes frustrées et furieuses parce qu’elles ne pouvaient pas accéder au formulaire en ligne ou le remplir assez rapidement, notamment en raison de connexions Internet trop lentes par rapport à d’autres.
Le ministre Mendicino expliquait au début du mois que le gouvernement allait continuer à chercher des moyens d’améliorer le système de candidature. « Je ne vais pas fermer la porte à une réévaluation du processus d’admission après cette année », a-t-il ajouté. « Nous pensons que c’est la façon la plus équitable d’administrer l’admission et d’inviter des manifestations d’intérêt », a-t-il déclaré à CBC News.
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RCI avec CBC News et La Presse canadienne
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