Première mondiale du film Tia et Piujuq, d’une réalisatrice inuk du Nunavut, dans le nord du Canada
Après son tournage sous les latitudes nordiques, le long métrage Tia et Piujuq, réalisé par la chanteuse de gorge inuk Lucy Tulugarjuk, sera diffusé dimanche pour sa première projection mondiale au 36e Carrousel international du film de Rimouski, dans le Bas-Saint-Laurent. Le long métrage relate l’amitié entre une jeune Inuk et une réfugiée syrienne.
Tia et Piujuq met en vedette la fille de la réalisatrice, Nuvvija Tulugarjuk, ainsi que la jeune Tia Bshara, une réfugiée syrienne qui a élu domicile au Canada en février 2017 et dont la famille a été parrainée par la Ville de Rimouski.
En 2016, à la suite de l’annonce du premier ministre Justin Trudeau d’accueillir plusieurs milliers de réfugiés syriens au pays, Lucy Tulugarjuk ainsi que les scénaristes Marie-Hélène Cousineau et Samuel Cohn-Cousineau ont eu l’idée de mettre en scène une jeune réfugiée syrienne. « Je voulais comprendre ce que représente le fait de déménager au Canada du point de vue d’un enfant », explique la réalisatrice Lucy Tulugarjuk.
« [Les parents de Tia] étaient étonnés [de ma proposition], mais ils ont soutenu leur fille dans sa décision », se souvient la réalisatrice.
Le long métrage raconte l’histoire de l’amitié naissante entre Tia, une fillette de 10 ans qui vient de déménager à Montréal, et Piujuq, une jeune Inuk de son âge. Ensemble, elles découvrent un univers fictif inspiré de la mythologie inuit.
Le tournage a été réalisé à Montréal ainsi sur l’île nordique d’Igloolik, au Nunavut, où a grandi la réalisatrice.
Cinéma autochtone
Certains membres de la distribution évoqueront peut-être des souvenirs familiers aux amateurs de cinéma autochtone. L’actrice Madeline Ivalu ainsi que la réalisatrice Lucy Tulugarjuk figuraient toutes deux au nombre des actrices d’Atanarjuat, la légende de l’homme rapide (2001), le premier film à avoir été écrit, réalisé et joué entièrement en inuktitut, la langue des Inuit.
Née à Churchill, au Manitoba, la chanteuse de gorge de profession a eu le coup de foudre pour le cinéma après son audition pour le film. « C’est à ce moment que j’ai découvert que je voulais jouer et travailler dans l’industrie du cinéma », se remémore Lucy Tulugarjuk.
Réalisé par Zacharias Kunuk, le long métrage avait remporté la Caméra d’or au Festival de Cannes ainsi que plusieurs prix Génie, qui étaient remis jusqu’en 2013 par l’Académie canadienne de cinéma et de la télévision.
Soutien canadien
Tia et Piujuq a été produit par les compagnies de production inuit Arnait Video Productions et Sivumu Northern Productions.
Le film a par ailleurs obtenu le soutien financier des Fonds des médias du Canada, de la Nunavut Film Development Corporation, de Téléfilm Canada, du Nunavut Independent Television Network et du programme de crédit d’impôt du Canada.
« Nous avons dû décaler d’un an le tournage parce que nous manquions d’argent pour le réaliser, mais cela a permis à Nuvvija de rattraper l’écart d’âge qu’il lui manquait pour pouvoir jouer [le personnage de] Piujuq », mentionne-t-elle.
Pour la jeune Nuvvija, qui était à l’origine trop jeune pour interpréter le rôle de Piujuq, il n’a pas toujours été simple de jouer dans un film réalisé par sa mère. « J’ai essayé d’être le plus professionnelle possible avec elle, raconte la réalisatrice. Je voulais lui montrer que je la traitais équitablement comme tous les autres membres de la distribution. »
Préserver sa langue
Après la projection d’ouverture au festival de films de Rimouski, Lucy Tulugarjuk espère que son long métrage sera reconnu ailleurs au pays ainsi qu’à l’international. « Il y a toujours eu des films en anglais et en français au Canada, mais ce sera une question de temps avant que les Inuit rattrapent le temps perdu et produisent des films en inuktitut », soutient-elle.
Tia et Piujuq sera projeté le 30 septembre comme film d’ouverture du 36e Carrousel international du film de Rimouski qui se spécialise en cinéma jeunesse.