Les enjeux criants auxquels font face les infirmières du Nord canadien mis en lumière
Violence vécue dans l’exercice de leurs fonctions, surcharge de travail, épuisement, manque de ressources : un sondage mené l’hiver dernier auprès des infirmières du Nunavut fait ressortir les défis majeurs que vivent ces travailleuses et travailleurs, au moment où les pénuries de personnel donnent des maux de tête aux autorités de la santé.
Au moins 328 infirmières du Nunavut ont répondu l’hiver dernier au sondage mené pour le compte de l’Association des infirmières et infirmiers autorisés des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut. On retrouve dans l’échantillon des infirmières autorisées, des infirmières praticiennes, des infirmières auxiliaires et des infirmières psychiatriques.
Et 66,5 % des infirmières et infirmiers interrogés ont déclaré avoir subi personnellement de la violence en milieu de travail et 80,5 % ont dit avoir été témoin d’incidents de violence dans leur propre milieu de travail. Ces résultats reflètent ce que vivent d’autres travailleurs de la santé au pays, particulièrement depuis la pandémie de COVID-19, qui a exacerbé plusieurs problèmes déjà présents.
Néanmoins, 59,3 % sont satisfaits, très satisfaits ou assez satisfaits de l’ensemble de leurs conditions de travail. Environ les deux tiers ont exprimé de la satisfaction à l’égard du degré de responsabilité accordé dans leur travail, du soutien reçu de la part des autres collègues et de la qualité des soins qu’ils prodiguent en général.
De plus, « faire l’expérience d’un mode de vie nordique, travailler dans de petites collectivités éloignées, et avoir un effet sur des communautés attirent les infirmières et infirmiers au Nunavut », note-t-on dans les résultats de l’enquête.
Le sondage montre d’ailleurs que la majorité des infirmières du Nunavut résident de façon temporaire dans le territoire. Les deux tiers déclarent comme domicile permanent l’Ontario, la Colombie-Britannique, l’Alberta, la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve-et-Labrador. Les employés de l’Hôpital général Qikiqtani d’Iqaluit constituent une exception. Là-bas, les infirmières nomment en majorité le Nunavut comme résidence principale.
Une charge de travail élevée
Près de 63 % des infirmières interrogées ont déclaré que les niveaux de dotation étaient insuffisants pour répondre aux besoins des patients, et ont exprimé leurs préoccupations concernant les effets nuisibles sur les soins aux malades, le personnel, les programmes et les services.
Le ratio personnel-patient est problématique pour environ un tiers des répondants.
Plus des deux tiers des infirmières qui ont répondu au sondage pensent que leur emploi actuel mène à l’épuisement professionnel, et 87,3 % disent en avoir ressenti les symptômes au cours de la dernière année.
Un grand nombre songent à démissionner
L’enquête révèle qu’au cours des 10 prochaines années, près de la moitié du personnel infirmier du Nunavut compte prendre sa retraite, et près de 30 % entendent le faire au cours des cinq prochaines années.
De plus, au cours des deux dernières années, plus des deux tiers du personnel interrogé ont songé à démissionner.
Il faut souligner que ce sont les deux années qui correspondent à la pandémie de COVID-19, qui a mis à mal le réseau de la santé partout au pays, y compris dans les territoires où les ressources sont rares et utilisées au maximum.
Celles qui comptent démissionner disent se sentir surmenées, passent trop de temps à faire de la paperasse et ne passent pas assez de temps avec les patients, à leur avis.
À l’extérieur du travail, le manque de logements adéquats demeure un enjeu pour le personnel soignant du Nunavut.
Pistes d’amélioration
Outre une augmentation des effectifs, plus de formation continue et des orientations claires données aux employés, permettre aux infirmières d’exercer pleinement leur champ de pratique et explorer des moyens d’améliorer les relations de travail contribuerait à augmenter la satisfaction des infirmières du Nunavut, selon les répondants.
Le dévoilement des résultats de ce sondage intervient alors que le Nunavut et d’autres régions du Nord canadien connaissent une importante pénurie de personnel soignant qui entraîne des ruptures de services.
Les résultats de cette enquête doivent servir au ministère de la Santé du Nunavut à mieux planifier les effectifs et à renforcer sa stratégie de recrutement, notamment.
La marge d’erreur est de +/- 2 %, 19 fois sur 20.