La serre la plus nordique du Québec construite à Salluit

Des gens sont assis dans la serre lors de l'ouverture.
La serre a été officiellement présentée aux membres de la communauté le 1er octobre dernier. (Photo : Sam Chauvette)

La communauté inuit de Salluit, dans le Nord-du-Québec, dispose maintenant d’une serre communautaire, qui permettra à plusieurs familles de réduire le coût de leurs paniers d’épicerie en plus de fournir des légumes aux organismes locaux.

La toundra près de Salluit n’est pas du tout propice pour entretenir un potager. Les nuits de gels en plein mois de juillet sont fréquentes et peuvent anéantir des espoirs de récoltes.

Mais voilà qu’avec cette toute nouvelle serre communautaire, les résidents pourront tirer parti des longues journées d’ensoleillement durant l’été.

Cette semaine, il faisait 7 degrés dehors, et 25 degrés à l’intérieur de la serre avec le chauffage au solaire passif!, indique l’instigateur de l’organisme à but non lucratif « Société Amaat », Stephen Grasser, un résident de longue date de Salluit.

Un homme à chemise à carreaux dans la serre.
Stephen Grasser est le membre fondateur de l’organisme à but non lucratif «Société Amaat», qui gère la serre. (Photo : Sam Chauvette)

Un projet complexe

Construire cette serre aura été un parcours parsemé d’embûches. D’abord, la pandémie a ralenti la recherche de financement et a fait exploser le prix des matériaux.

Les instigateurs du projet ont aussi été touchés par le manque d’entreprises pouvant installer une serre dans un village aussi éloigné.

Ce sont finalement des étudiants locaux, du programme de formation professionnelle en construction, qui ont coulé le béton et installé la structure nécessaire.

À cause du pergélisol, la serre devait être déposée sur une couche épaisse de gravier. La fondation devait aussi être en ciment renforcé. C’était impossible de trouver un entrepreneur en mesure de faire les travaux ici, explique Stephen Grasser, aujourd’hui fier de voir la serre en fonction.

La communauté inuit de Salluit, au Nunavik.
Salluit est un des village les plus au nord de la province, entourée de toundra rocheuse et de collines. (Photo d’archives) Photo : Radio-Canada / Matisse Harvey

Pour organiser les récoltes, ce dernier a fait appel à l’agronome Sam Chauvette du Centre d’innovation sociale en agriculture au Cégep de Victoriaville.

C’est notamment lui qui a préparé la terre nécessaire aux jardins, qui a dû être transportée par navire jusqu’à Salluit.

On a fait un mélange de terreau avec mes collègues du cégep. On a développé une recette de terre à jardin, avec du compostage. Ça donne un terreau exceptionnel. Mais il y a un coût élevé, c’est certain, avec le transport, explique l’agronome.

Ce dernier compte poursuivre son implication dans les prochaines années.

Il compte par exemple préparer les commandes de semences pour les résidents qui souhaiteront y planter des légumes la saison prochaine qui s’étendra de la mi-mai à la fin octobre.

On a parlé avec les gens sur ce qu’ils voulaient pour l’année prochaine. On tombe quand même dans les classiques. Les patates, oignons, carottes, tomates, concombres, poivrons et même de l’ail, ajoute Sam Chauvette.

S’attaquer au prix du panier d’épicerie

La serre a été divisée en deux sections. La première approvisionnera en légumes les différents organismes de la communauté. L’autre moitié permettra à 13 familles de profiter d’une parcelle de jardin.

Ce nombre limité d’espaces ne permettra pas de résoudre tous les enjeux liés à l’insécurité alimentaire au village, mais les instigateurs du projet espèrent faire une différence pour le plus de familles possible.

C’est une goutte dans l’océan pour lutter contre l’insécurité alimentaire. On pourrait avoir quatre ou cinq autres serres au village avant d’avoir un gros impact. Mais je crois qu’il faut y aller étape par étape. Nous devons prouver la faisabilité du concept, indique Stephen Gresser.

Il espère que la serre deviendra un modèle, reproductible dans les autres communautés.

Avec l’accroissement de la population, il y a beaucoup de pression sur la nourriture traditionnelle comme les poissons et les caribous. Nous devons développer d’autres options locales plutôt que de dépendre des importations du sud, souligne Stephen Gresser.

En attendant, des ateliers scolaires sont en préparation, avec l’école de Salluit, pour initier les jeunes aux joies du jardinage et peut-être, semer les graines d’une plus grande autonomie alimentaire au Nunavik.

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Félix Lebel, Radio-Canada

Journaliste à Sept-Îles

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