Ottawa s’entend avec l’Australie pour un système radar en Arctique

Un texte de Louis Blouin
Alors que la souveraineté canadienne est au cœur des tensions avec les États-Unis, Mark Carney profite d’un passage à Iqaluit pour annoncer la mise au point d’un nouveau système radar et une présence renforcée des Forces canadiennes en Arctique.
Le premier ministre canadien annonce un partenariat avec l’Australie pour établir un système radar transhorizon
qui permet de suivre la courbe de la Terre. Cette technologie sophistiquée permet notamment de détecter les missiles hypersoniques.
Selon nos informations, le gouvernement espère qu’il sera opérationnel dès 2029. L’investissement de 6 milliards de dollars provient d’une enveloppe déjà annoncée pour moderniser les infrastructures de surveillance canadiennes dans le nord.
La sécurité de l’Arctique est une priorité stratégique de notre gouvernement
, a assuré M. Carney lors d’un point de presse aux côtés de Bill Blair, ministre de la Défense nationale, de Jennie Carignan, chef d’état-major de la Défense, et de P.J. Akeeagok, premier ministre du Nunavut.
«Nous ne pouvons pas compter sur d’autres pays pour nous défendre, nous sommes maîtres chez nous», a dit Mark Carney, premier ministre du Canada.

Le gouvernement fédéral privilégie ainsi une technologie australienne plutôt qu’américaine, à un moment de tensions grandissantes avec Washington. Le choix pourrait-il être mal reçu à la Maison-Blanche?
Je ne sais pas si ce sera récupéré politiquement, a expliqué un responsable du gouvernement sous le couvert de l’anonymat parce qu’il n’est pas autorisé à parler publiquement.
Il assure toutefois que le commandement militaire du NORAD, en partie américain, approuve ce choix. Ils seront heureux avec ça. Ils connaissent la technologie
, explique ce responsable.
Le système radar « transhorizon » permet notamment de détecter les missiles hypersoniques et de suivre la courbe de la Terre.
Les infrastructures du système australien sont aussi moins imposantes que celles associées à la technologie américaine. Le système est composé de deux séries de piliers installés sur une distance de 1,3 km environ.
Ces infrastructures seront déployées sur deux sites en Ontario : l’un à Peterborough et l’autre près de la base militaire de Borden.
Impossible de savoir pour l’instant quelles seront les retombées économiques de cet investissement au Canada.
Mark Carney a discuté de cette annonce avec le premier ministre australien, Anthony Albanese, au téléphone mardi.
Cet engagement vise à répondre aux critiques en provenance des États-Unis, qui se sont accélérées sous la présidence de Joe Biden, pour que le Canada comble les failles dans sa défense du Grand Nord.
Le président Donald Trump a de nombreuses fois dénoncé les sous-investissements militaires du Canada.
Avec le réchauffement climatique, cette région riche en ressources naturelles suscite la convoitise de la Chine et de la Russie, notamment.
Selon Stéphane Roussel, professeur titulaire à l’École nationale d’administration publique, l’Arctique est devenu un enjeu de sécurité nationale qui préoccupe beaucoup les Canadiens
depuis que la Russie a mené son invasion de l’Ukraine en 2022.

De nouvelles opérations militaires
Ottawa annonce aussi une allocation de 420 millions de dollars supplémentaires, provenant de fonds existants, destinée aux Forces canadiennes afin d’assurer une présence plus soutenue en Arctique. Trois missions d’entraînement et de surveillance devraient ainsi s’ajouter à celles qui existent déjà.
Cette tranche d’argent supplémentaire représente toutefois une goutte d’eau dans le fossé qui sépare le Canada de la cible de l’OTAN d’un budget de défense qui équivaut à 2 % de son PIB. En 2024, le Canada en était à 1,37 %. Le nouveau premier ministre du Canada a promis d’atteindre la cible de 2 % d’ici 2030.
Lors de son passage à Iqaluit, Mark Carney a rencontré son homologue du Nunavut. Il s’est engagé à investir 253 millions de dollars pour des infrastructures dans les communautés autochtones du Nord.
Cet argent doit servir à moderniser quatre centrales électriques du Nunavut (94 millions de dollars), à construire et rénover des logements (140 millions de dollars) et à achever la première phase de la centrale hydroélectrique de la Nunavut Nukkiksautiit Corporation (20 millions de dollars) afin de réduire la dépendance au diesel comme source d’électricité.
Avec des informations de Valérie Gamache
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