Dans le froid intense de l’Arctique, le Canada prépare sa défense

Poser son hélicoptère sur un lac gelé du Grand Nord canadien demande au capitaine Jonathan Vokey une concentration maximale.
« Et manoeuvrer dans le froid, c’est dur pour le corps, mais cela peut aussi être difficile pour l’aéronef », ajoute-t-il.
Ce capitaine de l’Aviation royale canadienne, qui participe à un exercice visant à préparer les troupes canadiennes à agir dans l’extrême nord du pays, n’est pourtant pas un novice. Mais piloter dans l’hiver arctique pour la première fois n’a rien de simple.
Ailleurs, grâce aux arbres, on a une idée de la hauteur, de la distance à laquelle on est du sol, mais quand il n’y a pas d’arbres ni de végétation, c’est impossible. Donc, c’est un défi, raconte Jonathan Vokey.
Ici, chaque déplacement doit être longuement préparé : l’Arctique est devenu un enjeu militaire, économique et géostratégique, donc une zone qui attire. Et même avec le réchauffement climatique, évoluer dans cet environnement reste un défi.

Ce déploiement, appelé opération Nanook, ce qui signifie ours polaire
en inuktitut, et que l’ a pu suivre à la fin du mois de février, permet donc à l’Armée canadienne de tester les équipements, mais aussi la résistance humaine dans des conditions extrêmes.
Toundra inhospitalière
C’est le premier déploiement dans la zone pour Cassidy Lambert, caporale réserviste d’infanterie qui a été formée pour affronter des conditions extrêmes.
La toundra arctique est probablement l’environnement le plus imprévisible que nous ayons, indique la jeune soldate originaire de Terre-Neuve, dans l’est du pays.Il faut tout le temps être prudentet se poser les bonnes questions avant tout mouvement.S’agit-il de terre ou de glace recouverte de neige? Quelle est l’épaisseur réelle de cette glace?

L’augmentation de l’accessibilité liée aux changements climatiques, le renforcement de la présence russe et la nouvelle idée expansionniste du président américain Donald Trump, qui convoite notamment le Groenland, placent cette région autrefois délaissée plus haut dans les priorités militaires.
L’Arctique, vous savez, c’est une partie du Canada et de la défense nord-américaine, explique le colonel Darren Turner, à la tête de l’opération Nanook.
Or, il est plus facile aujourd’hui que jamais d’accéder au Nord. Et je dirais que cela va changer encore plus radicalement au cours des 10 à 20 prochaines années.
« Difficile à détecter »
Sur le terrain, les troupes doivent aussi tester les équipements de plongée sous la glace ou les drones. Parmi les exercices, il faut repérer des ennemis cachés dans ce paysage plat et blanc.
Les signatures thermiques sont beaucoup plus difficiles à lire, car tout est très froid, note un matelot de première classe, dont l’identité est gardée secrète, tandis qu’il pilote un drone.
La neige est un très bon isolant, et nous avons constaté que, si on se couvre de neige, il est assez difficile d’être détecté par l’imagerie infrarouge.
Peu après ces manœuvres, le nouveau premier ministre canadien, Mark Carney, a expliqué, à la mi-mars depuis Iqaluit, que la sécurisation du Canada était une priorité stratégique absolue
pour le pays, qui doit en faire davantage
.
Lors de la première présidence de Trump, les États-Unis ont explicitement défié la souveraineté du Canada sur le passage du Nord-Ouest, faisant valoir que cette voie maritime constituait un détroit international, qui doit donc rester ouvert à tout navire, sans restriction.
Mark Carney a redit en mars que le passage faisait partie des eaux souveraines
canadiennes.
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