L’Arctique continuerait à se réchauffer 3,5 fois plus vite que le reste du monde

Plusieurs années de chaleur sans précédent nous attendent, ce qui poussera la Terre vers des extrêmes encore plus caniculaires, inconfortables et mortels, selon les prévisions de deux des plus grandes agences météorologiques mondiales.
Il y a 80 % de chances que le monde batte un nouveau record annuel de température au cours des cinq prochaines années, et il est encore plus probable que le monde dépasse à nouveau le seuil international de température fixé il y a 10 ans, selon les prévisions quinquennales publiées mercredi par l’Organisation météorologique mondiale et le Bureau météorologique britannique.
«Une augmentation des températures moyennes mondiales peut sembler abstraite, mais dans la vie réelle, cela se traduit par un risque accru de phénomènes météorologiques extrêmes : ouragans plus violents, précipitations plus fortes, sécheresses», a rappelé Natalie Mahowald, climatologue à l’Université Cornell, qui n’a pas participé aux calculs, mais les a jugés pertinents.
« Une augmentation des températures moyennes mondiales se traduit donc par davantage de pertes humaines », a-t-elle ajouté.
À chaque dixième de degré de réchauffement mondial dû au changement climatique causé par l’homme, «nous connaîtrons des événements plus fréquents et plus extrêmes (en particulier des vagues de chaleur, mais aussi des sécheresses, des inondations, des incendies et des ouragans/typhons amplifiés par l’homme)», a prévenu par courriel Johan Rockstrom, directeur de l’Institut de recherche sur l’impact climatique de Potsdam en Allemagne. Il n’a pas participé à cette étude.
Et pour la première fois, il existe une chance, certes faible, qu’avant la fin de la décennie, la température annuelle mondiale dépasse l’objectif de l’Accord de Paris sur le climat, qui vise à limiter le réchauffement à 1,5 °C, et atteigne un niveau plus alarmant de 2 °C depuis le milieu du XIXe siècle, ont déclaré les deux agences.
Il y a 86 % de chances que l’une des cinq prochaines années dépasse 1,5 degré et 70 % de chances que les cinq années dans leur ensemble dépassent en moyenne ce seuil mondial, ont-elles calculé.
Ces projections sont issues de plus de 200 prévisions utilisant des simulations informatiques réalisées par 10 centres scientifiques mondiaux.
Il y a 10 ans, les mêmes équipes avaient estimé qu’il y avait une probabilité similaire, soit environ 1 %, que l’une des années à venir dépasse ce seuil critique de 1,5 degré, et c’est ce qui s’est produit l’année dernière.
Cette année, un réchauffement de 2 °C par rapport à l’ère préindustrielle entre en ligne de compte de la même manière, ce que le responsable des prévisions à long terme au Met Office britannique, Adam Scaife, et le scientifique Leon Hermanson ont qualifié de «choquant».
«Ce n’est pas quelque chose que quiconque souhaite voir, mais c’est ce que la science nous dit», a déclaré M. Hermanson. Le réchauffement de 2 degrés est le seuil secondaire, celui considéré comme moins susceptible d’être dépassé, fixé par l’Accord de Paris en 2015.
Techniquement, même si 2024 a été 1,5 °C plus chaude que l’époque préindustrielle, le seuil de l’Accord de Paris sur le climat porte sur une période de 20 ans et n’a donc pas été dépassé. En tenant compte des 10 dernières années et en établissant des prévisions pour les 10 prochaines, le monde est probablement aujourd’hui environ 1,4 °C plus chaud qu’au milieu du XIXe siècle, selon les estimations de Chris Hewitt, directeur des services climatiques de l’Organisation météorologique mondiale.
«Les cinq prochaines années devraient être en moyenne plus de 1,5 °C plus chaudes que les niveaux préindustriels, ce qui exposera plus de personnes que jamais à des vagues de chaleur extrêmes, entraînant plus de décès et de graves répercussions sur la santé, à moins que les populations ne soient mieux protégées contre les effets de la chaleur. Nous pouvons également nous attendre à des incendies de forêt plus violents, car l’atmosphère plus chaude assèche le paysage», a indiqué Richard Betts, responsable de la recherche sur les impacts climatiques au Met Office britannique et professeur à l’Université d’Exeter.
La glace de l’Arctique, une région qui continuera à se réchauffer 3,5 fois plus vite que le reste du monde, fondra et le niveau des mers montera plus rapidement, a souligné M. Hewitt.
Selon les scientifiques, les températures mondiales ont tendance à fluctuer comme un ascenseur, les cycles météorologiques temporaires et naturels El Niño agissant comme des sauts vers le haut ou vers le bas sur cet ascenseur. Mais ces derniers temps, après chaque saut provoqué par El Niño, qui accentue le réchauffement de la planète, celle-ci ne redescend pas beaucoup, voire pas du tout.
«Les températures record deviennent immédiatement la nouvelle norme», a dit Rob Jackson, climatologue à l’Université de Stanford.
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