Promouvoir l’inuktitut à l’aide de l’intelligence artificielle

Les cofondateurs de l’entreprise AingAI Indigenous Language Labs, Kirt Ejesiak (à gauche) et Livete Ataguyuk (à droite), souhaitent utiliser l’intelligence artificielle pour favoriser l’apprentissage de l’inuktitut. (CBC / Samuel Wat)

Les créateurs d’une nouvelle application prévoient utiliser l’intelligence artificielle pour rendre l’apprentissage de l’inuktitut plus accessible.

L’entreprise AingA.I. Indigenous Language Labs, établie à Iqaluit, collecte des textes et des milliers d’heures d’enregistrement audio en dialecte du Baffin du Sud pour développer son outil de traduction.

Kirt Ejesiak, le directeur général, souligne qu’il y a peu d’Inuit qui travaillent dans le domaine de l’intelligence artificielle (IA).

« L’avenir de l’IA en inuktitut sera entre les mains des Inuit, développé par eux pour leur bénéfice mutuel », affirme-t-il. « Elle ne sera pas réservée à la Silicon Valley ou à d’autres entreprises multinationales. »

Kirt Ejesiak projette de lancer sa technologie d’ici six mois et de la proposer sous forme de plugiciel pour d’autres applications ou sites web, comme YouTube.

Il envisage également d’intégrer d’autres dialectes de l’inuktitut à l’avenir. Toutefois, il souligne que l’objectif de son application n’est pas de remplacer les interprètes et les traducteurs humains, mais plutôt de favoriser l’apprentissage de l’inuktitut à son propre rythme.

Une souveraineté intellectuelle

Le travail de Kirt Ejesiak met en lumière le débat sur la souveraineté des données.

« Ce que je demanderais, c’est que les responsables et les gouvernements investissent dans la protection des droits de propriété intellectuelle des peuples autochtones et qu’ils adoptent des politiques qui favorisent l’innovation et le développement des entreprises inuit. »

La concurrence s’intensifie dans le domaine de la technologie linguistique. En octobre dernier, Google a ajouté l’inuktitut à ses fonctionnalités de traduction. De plus, le gouvernement du Nunavut entretient, depuis des années, un partenariat avec Microsoft Canada afin d’offrir des traductions et des synthèses vocales dans la langue.

Muhammad Abdul-Mageed est un spécialiste de l’apprentissage automatique des langues à l’Université de la Colombie-Britannique. Il partage les préoccupations de Kirt Ejesiak concernant la propriété intellectuelle et suggère qu’il y ait une sensibilisation et une formation sur ces technologies dirigées par la communauté auxquelles elles sont censées s’adresser.

« Donner son consentement sans avoir toutes les informations nécessaires, ce n’est pas suffisant. Il faut se demander comment cette technologie sera utilisée non seulement maintenant, mais aussi à l’avenir. »

Évaluer les avantages et les risques

La revitalisation de langues autochtones grâce à la technologie n’est pas une idée récente. Depuis une décennie, le Conseil national de recherches du Canada travaille en collaboration avec des organisations autochtones à cette fin.

Le produit développé par AingA.I. est actuellement à l’étape des tests, mais en voici un exemple.
(Fournie par AingA.I. Indigenous Languages Labs)

Evan Laye, conseiller en relations autochtones au sein du conseil, comprend les craintes des communautés à l’égard de l’IA et des risques qu’elle présente. Mais, étant Métis de la rivière Rouge, il perçoit également un grand potentiel.

« Je discute souvent avec les membres de ma famille sur le fait d’apprendre le michif et l’utilisation [de ces technologies] dans la vie quotidienne », explique-t-il. « Cela a été rendu possible grâce aux innovations en traitement automatique des langues. »

Pour sa part, M. Abdul-Mageed craint que l’avènement de technologies d’intelligence artificielle ne creuse des écarts entre différentes communautés.

« Si une chose est conçue spécifiquement pour une communauté plutôt que pour une autre, on prive ainsi certains groupes sociaux des avantages éducatifs, sanitaires et autres », estime-t-il.

Finalement, il soutient que les communautés doivent évaluer si les bénéfices de l’utilisation de ces technologies l’emportent sur les éventuels dangers.

Avec les informations de Samuel Wat

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