La France appelée à revoir sa stratégie polaire

Un drapeau flotte sur une étendue de glace.
Un drapeau français flotte sur la banquise aux Territoires du Nord-Ouest lors de l’opération militaire Nanook-Nunalivut des Forces armées canadiennes en février 2022 à laquelle des représentants de l’Armée française ont participé. Photo : Radio-Canada / KARLI ZSCHOGNER

La France doit se positionner comme « une grande puissance polaire » et intégrer « beaucoup plus la question géopolitique et de défense » en Arctique et Antarctique face au « retour des tensions et des menaces » dans ces régions, indique un rapport publié mercredi.

Dans ces zones stratégiques riches en ressources naturelles, où s’ouvrent de nouvelles routes commerciales en raison du changement climatique, la « stratégie polaire française » dessinée il y a trois ans souffre d’un décalage avec les transformations géopolitiques survenues depuis 2022 et l’invasion de l’Ukraine par la Russie, souligne l’envoyé spécial du président Emmanuel Macron pour les Pôles et l’Océan, Olivier Poivre d’Arvor, dans ce document.

La montée des tensions internationales dans l’Arctique, la militarisation de certaines zones et la fragmentation de la coopération scientifique internationale remettent en question l’approche initialement fondée sur le multilatéralisme et la science ouverte, écrit-il.

Plus généralement, la compétition stratégique entre Russie, Chine et États-Unis conduit à une course pour le contrôle des ressources polaires, en premier lieu les minerais critiques et les ressources énergétiques.

Dans ce contexte, la nouvelle stratégie française pour la période 2026-2040 « doit intégrer de manière beaucoup plus centrale la question géopolitique et de défense », en particulier dans l’Arctique, où sept des huit États riverains [sont] désormais membres de l’OTAN [Organisation du traité de l’Atlantique Nord].

La France doit viser à devenir une grande puissance polaire au service de la paix, de la science et de la protection des écosystèmes de la cryosphère [espaces glacés], ajoute-t-il.

Dans le domaine militaire, M. Poivre d’Arvor propose notamment de « renforcer [les] partenariats de défense avec les États membres de l’OTAN présents en Arctique », notamment par l’intermédiaire de la « participation régulière à des exercices conjoints en conditions polaires » et du « partage de renseignement, d’analyses et de retours d’expérience sur les dynamiques arctiques ».

Côté scientifique, le rapport suggère d’investir 100 millions d’euros (environ 162 millions de dollars canadiens) sur 10 ans pour « renouveler les infrastructures scientifiques », et notamment se doter de « deux nouveaux navires de recherche polaire ».

Si le rapport est largement consacré à l’Arctique, il alerte sur les nouveaux enjeux dans l’autre pôle.

L’Antarctique, certes préservé par un traité très ambitieux et privilégiant la paix, la coopération scientifique, et l’absence d’activités extractives, c’est-à-dire l’exact contraire de ce qui se passe aujourd’hui en Arctique, pourrait devenir dans la décennie à venir la prochaine perspective stratégique de trois des grandes puissances que sont les États-Unis, la Chine et la Russie, prévient le document.

Un navire de la Marine canadienne est sur l'eau, sur une côte escarpée et glacée en Antarctique. On voit des gens sur le pont du navire.
Le NCSM Margaret Brooke de la Marine royale canadienne en mars 2025 dans la baie de l’Amirauté, dans l’archipel des îles Shetland du Sud, en Antarctique Photo : CBC / Jill English

Ces trois pays détiennent à eux seuls un tiers de l’ensemble des bases permanentes de recherches en Antarctique et semblent se projeter dans une révision du Protocole de Madrid relatif à la protection de l’environnement antarctique, quand cela deviendra possible en 2048, avec une approche où l’exploitation des ressources considérables du Continent blanc prendra clairement le dessus sur leur protection, souligne-t-il.

La France, elle, « réaffirme sa position claire que ni le Traité sur l’Antarctique ni son protocole relatif à la protection de l’environnement [Protocole de Madrid] n’ont de date d’expiration ».

Puissance historiquement présente aux pôles, la France a installé sa première base de recherche scientifique en 1963 dans l’archipel arctique du Svalbard [en Norvège]. Elle dispose également de deux stations de recherche permanentes en Antarctique.

À lire aussi :

Vous avez remarqué une erreur ou une faute ? Cliquez ici !

Laisser un commentaire

Note: En nous soumettant vos commentaires, vous reconnaissez que Radio Canada International a le droit de les reproduire et de les diffuser, en tout ou en partie et de quelque manière que ce soit. Veuillez noter que Radio-Canada ne cautionne pas les opinions exprimées. Vos commentaires seront modérés, et publiés s’ils respectent la nétiquette.
Nétiquette »

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *