À Whitehorse, un rassemblement pour redonner vie aux tatouages traditionnels

Une artiste autochtone applique un tatouage traditionnel à la main sur l’avant-bras d’une participante, lors d’un rassemblement culturel à Whitehorse.
Une artiste autochtone applique un tatouage traditionnel à la main sur l’avant-bras d’une participante, lors d’un rassemblement culturel à Whitehorse. (Photo : Radio-Canada/Isabel Ruitenbeek)

Durant trois jours, au cœur du centre culturel Kwanlin Dün à Whitehorse, aiguilles et encres ont dessiné bien plus que des motifs : elles ont ravivé une mémoire, restauré une fierté et réaffirmé une culture. Le Kwanlin Traditional Tattoo Gathering, premier du genre, a réuni artistes et apprentis autochtones venus redonner vie à une pratique longtemps interdite.

Originaire de Pangnirtung, au Nunavut, Ashley Cummings vit désormais à Whitehorse. Pour elle, ce tatouage est un acte de réappropriation.

Une femme sourit pendant qu'une artiste autochtone applique, avec précision, un tatouage traditionnel sur son menton au sein d’un espace communautaire, rempli de participantes engagées dans la redécouverte de leurs pratiques ancestrales.
Holly Nordlum tatoue Ashley Cummings, qui sourit pendant que son menton est piqué à plusieurs reprises par une aiguille lors du rassemblement. Photo : Radio-Canada / Isabel Ruitenbeek

Ça fait un peu mal, mais ce n’est pas trop grave, dit-elle à propos des tatouages. Ça en vaut la peine.

Les Inuit ont failli perdre entièrement leurs tatouages, affirme Ashley Cummings, originaire de Pangnirtung au Nunavut. Aujourd’hui, des femmes extraordinaires, de véritables matriarches, les ramènent dans nos vies.

Pour Ashley Cummings et les autres participantes, cet événement incarne avant tout une volonté de se réapproprier les pratiques traditionnelles de tatouage.

C’est une manière, selon eux, de revendiquer une identité et de tisser des liens avec celles et ceux qui partagent une histoire commune. C’est aussi ainsi que le voit Holly Nordlum, artiste tatoueuse depuis plus de 10 ans.

Originaire de Kotzebue, en Alaska, et aujourd’hui installée à Anchorage, Holly Nordlum, une Inuk, affirme qu’il y a quelque chose de puissant dans le fait de tatouer la peau tout en parlant de choses difficiles.

L’essentiel, c’est de trouver de la joie dans ce qui est difficile, dit-elle. C’est vraiment ce qui façonne qui nous sommes.

Entre blessures partagées et renaissance culturelle

Pour Holly Nordlum, les choses difficiles renvoient à des traumatismes partagés : consommation de substances, violences sexuelles, toutes ces grandes blessures qui affectent les communautés autochtones depuis des générations.

Ce sont ces sujets-là, dit-elle, qui reviennent le plus souvent dans ses échanges avec ses clientes.

Elle a voyagé dans d’autres régions où existent également des traditions de tatouage, comme en Nouvelle-Zélande ou à Hawaï. Dans ces lieux aussi, dit-elle, les pratiques traditionnelles ont été contrôlées par la colonisation et les missionnaires.

Nous sommes tous des personnes racisées qui avons été colonisées et qui luttons , dit-elle.

Anne Spice, artiste tatoueuse de la Première Nation Kwanlin Dün vivant à Toronto.
Anne Spice, artiste tatoueuse de la Première Nation Kwanlin Dün vivant à Toronto, est ici en train de préparer son espace de travail pour son prochain tatouage. (Photo : Radio-Canada/Isabel Ruitenbeek)

Anne Spice, citoyenne de Kwanlin Dün et tatoueuse, explique que chaque nation possède sa propre tradition et son propre style de tatouage, mais qu’il existe des lacunes dans ces savoirs en raison des générations pendant lesquelles le tatouage a été interdit.

Pour combler ces manques, Mme Spice puise son inspiration dans d’autres formes d’art. Mais aujourd’hui, ajoute-t-elle, il y a un véritable élan pour faire renaître les pratiques de tatouage autochtones.

Ici, au Yukon, nous ne sommes qu’au début de cette résurgence, indique-t-elle.

Se marquer pour se reconstruire

Bobby Rose Koe arbore un tout nouveau tatouage de bois de caribou sur son épaule, réalisé à la main.

Je viens du caribou, dit-elle.

Mme Koe est Teetl’it Gwich’in, originaire de Fort McPherson, dans les Territoires du Nord-Ouest. Le tatouage de bois de caribou s’ajoute à plusieurs autres marques sur son corps, chacune représentant un souvenir de ce qu’elle a traversé et de son identité.

Bobby Rose Koe, originaire de Fort McPherson, dans les Territoires du Nord-Ouest.
Bobby Rose Koe affirme que le principal sujet de discussion du rassemblement portait sur la responsabilité entourant les tatouages. (Photo : Radio-Canada/Isabel Ruitenbeek)

Bobby Rose Koe affirme que le thème central de ce rassemblement était la responsabilité qui entoure le tatouage.

Les participantes ont appris l’histoire du tatouage traditionnel et ont discuté de ce qui est approprié ou non. Je trouve ça magnifique que nous apprenions tous ensemble ici, dit-elle.

Elle a déjà participé à de nombreux rassemblements et rencontres dans la salle polyvalente du Centre culturel.

Ces événements sont souvent centrés sur des discussions importantes. Mais, selon elle, le rassemblement autour du tatouage avait quelque chose de particulier.

Il y a une énergie différente aujourd’hui… Voir des gens entrer, puis ressortir transformés, marqués par leurs tatouages, c’est vraiment magnifique.

Avec les informations d’Isabel Ruitenbeek

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