Débats et recommandations sur l’assainissement d’une mine abandonnée dans le Nord canadien

La mine Giant, aux Territoires du Nord-Ouest, dans le Grand Nord canadien, a cessé ses activités en 1999. Photo prise en 2001. (Chuck Stoody/La Presse canadienne)
Le Conseil de surveillance de la mine Giant (une mine abandonnée depuis 1999 et située près de Yellowknife, la capitale des Territoires du Nord-Ouest) émet douze recommandations.

Les débouchés économiques, les compensations et excuses aux Autochtones ainsi que les dangers pour la santé ont été au cœur de la rencontre annuelle du Conseil de surveillance de la mine Giant, qui avait lieu au Northern United Place le 15 mai réunissant de 60 à 70 personnes.

La présidente du Conseil, Kathleen Racher, a d’abord présenté son rapport annuel et les douze recommandations de son organisme à l’équipe du Projet d’assainissement de la mine Giant, soulignant les lacunes dans les communications de celle-ci et le manque d’occasions socioéconomiques pour les gens du Nord. En 2016-2017, selon ce rapport, 23 % des employés et des entrepreneurs liés au Projet étaient du Nord et 4 % étaient autochtones.

Cette question de l’emploi, de la formation et des occasions d’affaires est revenue tout au long de la soirée, même après que la directrice adjointe du Projet d’assainissement de l’ancienne mine d’or, Natalie Plato, ait déclaré que son organisme reviendrait en juin prochain avec une nouvelle stratégie pour que la population nordique bénéficie davantage de la situation. Une étude du Projet ciblait déjà certaines occasions d’affaires et d’emploi. « Nous avons déjà dit à l’équipe du Projet que cette étude devait être affinée », a assuré une directrice du Conseil de surveillance, Ginger Stones.

Tirer profit de la décontamination

Le budget de décontamination de la mine Giant est d’un peu plus d’un milliard de dollars, a dit un participant de la réunion, ça pourrait créer une véritable renaissance pour Yellowknife. Un autre a déploré le fait que le contrat principal des travaux de la mine ait été attribué à une compagnie américaine (Parsons, qui a une antenne à Calgary). Il a fait le lien avec un récent rapport du Conference Board of Canada sur le rapide déclin des mines ténoises. Le président de la Northwest Territories Federation of Labour, David Bob, a manifesté son dépit que trop de contrats et d’emplois soient accordés aux gens du Sud, à l’inverse de ce qui est fait dans le cas de la route Inuvik-Tuktoyaktuk.

« C’est aussi aux individus, à l’industrie et à la Ville de Yellowknife de prendre l’initiative de communiquer pour prendre l’avantage de ces centaines de millions de dollars », a rétorqué un autre directeur du Conseil de surveillance, Kenneth Hall.

Frustrations et demandes de compensation

Lors de la rencontre annuelle du Conseil de surveillance de la mine Giant, plusieurs membres des collectivités de Dettah et Ndilo ont fait part de leur colère et de leur sentiment d’injustice face aux impacts la mine Giant. La demande des communautés autochtones pour des excuses et une compensation de la part du gouvernement fédéral évolue lentement. Le directeur général régional du Bureau de gestion des projets nordiques de l’Agence canadienne de développement du Nord, Matt Spence, discuterait présentement avec les leadeurs de la Première Nation des Dénés Yellowknives pour former deux groupes afin de discuter des effets de la mine Giant et d’éventuelles compensations.

Le Chef de Ndilo, Ernest Betsina, s’est inquiété des zones à risque hors du périmètre d’assainissement de la mine Giant. Certaines se trouvent dans sa communauté. Ses questions sur le degré de danger causé par l’arsenic sont restées sans réponses. (Denis Lord/L’Aquilon)

« La mine Giant a pris beaucoup de notre famille », s’est écriée l’Aînée de Ndilo Muriel Betsina dans un long discours extrêmement émotif. Elle a regretté le temps d’avant la mine, quand son peuple pouvait pratiquer sans crainte ses activités traditionnelles sur le territoire, se désaltérer avec de la neige sans peur d’être empoisonné.

Le chef de Ndilo, Ernest Betsina, a invité le Conseil de surveillance à tenir des réunions à Dettah et Ndilo. « Vous pourrez savoir comment on vivait avant la mine », a-t-il dit. Il s’est inquiété des zones à risque hors du périmètre d’assainissement de la mine. Ses questions sur le degré de danger causé par la poudre d’arsenic sont restées sans réponses. « Les gouvernements se passent la balle, dit-il, le fédéral dit que c’est la responsabilité du gouvernement ténois, et le gouvernement ténois dit que c’est le fédéral. »

« On demande une étude toxicocinétique depuis des années », a dit une femme, appuyant M. Betsina. Elle a par ailleurs demandé à ce qu’une partie du matériel de sensibilisation soit traduit en weledeh pour les ainés, qui autrement, ne peuvent le lire.
Le financement du Conseil, la date où le trioxyde de diarsenic sera congelé, le permis d’utilisation d’eau émis par l’Office des terres et des eaux de la vallée du Mackenzie ont également été source de questionnement.

Vers un plan d’entretien perpétuel

C’est David Livingstone, un autre directeur du Conseil de surveillance, qui s’est chargé de répondre à la demande d’un citoyen d’évaluer le travail de l’équipe du Projet d’assainissement. « Un B-, a quantifié M. Livingstone, spécialiste de l’environnement et du développement des ressources dans le Nord. Il y a des aspects qui vont bien, d’autres qui pourraient aller plus rapidement. Ce n’est pas un A, mais ce n’est certainement pas un F non plus. C’est un dossier très compliqué. »

Le député de Frame Lake Kevin O’Reilly, qui a participé à la création de l’Entente sur le Projet d’assainissement, a été un des derniers à s’exprimer. « La durée de vie du Conseil, c’est pour toujours, […] jusqu’à l’assainissement total et final de la mine, et je pense que nous sommes très très loin de ça. Il va y avoir beaucoup de travail. […]Peut-être qu’au fil des années, l’accent va évoluer de la surveillance vers la recherche [de solutions]. »

M. O’Reilly a rappelé que selon l’Entente, un plan d’entretien perpétuel devrait être finalisé en 2020, un plan qui fera en sorte que le site soit entretenu correctement à long terme, qui devra tenir compte des compétences nécessaires pour son entretien, du remplacement de pièces, de l’archivage, des communications avec les générations futures pour leur expliquer la situation, etc. « Ça s’en vient vite », a rappelé le député.

Lors de cette réunion, interprétée simultanément en weledeh, Kathleen Racher a également abordé un des mandats de son organisme, celui de la veille sur les recherches scientifiques, dans le but de trouver une autre solution que la congélation. Elle a déploré l’insuffisance de son budget annuel de 200 000 $, mais a déclaré que l’organisme pourra y ajouter ses fonds non dépensés. Le Conseil a amorcé une collaboration très prometteuse avec un regroupement de chercheurs appelé Terre-Net.

L’équipe du Projet d’assainissement de la mine Giant tiendra, le 31 mai et le 1er juin prochains, à l’hôtel Quality Inn, un atelier pour cibler les risques qui pourraient être toujours présents sur les lieux après les travaux d’assainissement.

Denis Lord, L'Aquilon

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