Le premier ministre quitte la salle de réunion où il y a eu des concertations avec le Comité de crise au sujet de du blocage ferroviaire, sur la colline parlementaire d’Ottawa. Tout de suite après, il s’est adressé aux médias, vendredi 21 février 2020. Crédit : La Presse canadienne/Fred Chartrand

Crise ferroviaire : « Les barricades doivent être levées et la loi doit prévaloir »- Trudeau

Le premier ministre du Canada demande aux manifestants de libérer les voies ferrées bloquées depuis 16 jours, en appui à l’opposition des chefs héréditaires Wet’suwet’en à un projet de pipeline sur leur territoire, en Colombie-Britannique. Il a certes changé de ton, mais n’engage pas pour autant la force pour disperser les manifestants comme l’aurait souhaité le premier ministre du Québec François Legault.

Au terme d’une matinée de concertation avec les membres du comité de crise, le premier ministre Justin Trudeau s’est adressé aux médias.

Il a résumé toutes les démarches entreprises au cours des derniers jours pour tenter de dénouer la crise de manière pacifique.

Il y a eu beaucoup de patience, d’appels à la négociation pour tenter de dénouer la situation, pourtant ces multiples tentatives n’ont pas connu d’échos favorables auprès des chefs héréditaires et de ceux qui appuient leur revendication au pays.

Au regard des enjeux économiques et sociaux qui sont reliés à cette crise, le premier ministre du Canada a soutenu qu’il est temps que les barricades soient levées. M. Trudeau a dit vouloir en même temps garder la main tendue aux communautés concernées afin qu’une solution « paisible et rapide» soit trouvée.

À la question de savoir si le premier ministre est prêt à faire appel à la Gendarmerie royale du Canada (GRC) pour résoudre cette crise, Justin Trudeau a réitéré ses messages en faveur d’une approche concertée et négociée avec les communautés, avant d’insister sur le fait que les barricades doivent cesser, en raison des souffrances infligées aux Canadiens et à l’économie.

« À titre de gouvernement fédéral, nous avons épuisé toutes les avenues pour en arriver à un dialogue actif et solide. La GRC a offert de retirer ses troupes de la région concernée, pourtant les communautés ne semblent pas bouger […] Pas question de faire appel à l’armée. On n’utilise pas l’armée contre les civils canadiens […] La situation est délicate et l’histoire nous enseigne que cela peut être très difficile si on recourt rapidement à la force […] J’ai confiance qu’à l’intérieur des communautés autochtones, et que compte tenu de tout ce que nous avons démontré comme volonté de dénouer la crise par le dialogue, des réflexions vont être menées pour que nous puissions continuer sur la voie de la réconciliation, pour pouvoir passer au travers ensemble. J’ai bon espoir que les chefs autochtones, dans les heures qui viennent,  dans la journée qui vient, prennent des mesures pour que ces barrages soient démantelés », a affirmé Justin Trudeau.

Cette crise peut aussi avoir une incidence négative sur la réconciliation en cours avec les communautés autochtones. « C’est pour cette raison que je pense que les chefs des communautés devraient suivre l’appel en faveur d’une résolution pacifique de cette crise », a -t-il souligné.

Des policiers de Longueuil s’adressent à des manifestants masqués qui ont érigé un barrage à Saint-Lambert, au Québec, vendredi 21 février 2020. Ces manifestants soutiennent la résistance des chefs héréditaires wet’suwet’en au passage d’un gazoduc sur leur terre ancestrale. Crédit : La Presse canadienne/Paul Chiasson

« Vous dites assez c’est assez, vous renvoyez la balle aux policiers et aux communautés autochtones, quelle est votre responsabilité dans la solution à cette crise ?»

À cette question d’un journaliste, le premier ministre mentionne qu’il s’est engagé dans le dialogue et dans l’ouverture à chaque étape tout en appelant au calme.

Il rappelle qu’à Belleville, en Ontario, comme à Saint-Lambert, au Québec, c’est la police locale qui est chargée en principe de trouver des solutions au blocage, mais que le gouvernement fédéral est intervenu, compte tenu de l’enjeu national.

C’est ainsi qu’il mentionne que tout a été fait pour arriver à une entente. Il a dit espéré qu’au sein des communautés autochtones, les gens prennent conscience du fait que « le bon vouloir des gouvernements provinciaux et fédéral est là », mais que cela ne peut continuer si la résistance demeure.

« Des biens essentiels à notre économie et à notre pays ne peuvent pas être distribués. Les Canadiens ont fait preuve de patience, notre gouvernement a fait preuve de patience […] Nous avons parlé avec les transporteurs pour voir les répercussions économiques et voir quelles pourraient être les mesures de contournement […] Cela fait deux semaines et cela ne peut plus continuer », a-t-il répété.

Sur place à Saint-Lambert, au Québec, où la police a servi l’injonction aux manifestants afin qu’ils libèrent les lieux, ces derniers restent mobilisés. Les policiers ont érigé un périmètre de sécurité, ce qui augure peut-être d’une possible intervention dans les prochaines heures.

Du côté de Tyendinaga, en Ontario, où les chefs héréditaires se trouvent en mission de remerciement auprès des Mohawks qui soutiennent leur cause, l’un d’eux Franc Alec a pris la parole pour dénoncer l’occupation illégale de leur terre qui, selon ses propos, « n’a jamais été cédée ».  Il a affirmé que dès que la GRC quittera leur territoire comme proposé lors de la rencontre du 15 février avec le représentant fédéral, les chefs héréditaires pourront s’asseoir pour négocier avec les responsables fédéraux.

« Les chefs héréditaires ont évoqué une voie pacifique pour qu’une discussion de nation à nation avec d’une part, le gouvernement fédéral, et le gouvernement de la Colombie britannique soit possible […] Il faut que la GRC arrête de patrouiller notre territoire […] On ne peut pas avoir une occupation illégale de notre territoire et s’attendre à engager un dialogue. Nous engagerons un dialogue une fois que nos demandes seront accueillies », a relevé le chef héréditaire Franc Alec, lors du point de presse vendredi.

Les chefs héréditaires ont manifesté le souhait de voir les avis d’éviction servis dans leur communauté, en vue de la construction du projet de gazoduc Coastal Gaslink, être retirés.

Le chef sortant du principal parti de l’opposition au fédéral Andrew Scheer a une fois de plus critiqué le manque de leadership du premier ministre dans la gestion de cette crise. M. Scheer a mentionné qu’un changement de ton sans action contraignante ne saurait porter de fruits.  C’est ainsi qu’il a conclu qu’en ne permettant aucune intervention des forces de l’ordre, Justin Trudeau « laisse croire aux manifestants qu’ils peuvent agir en toute impunité ».

Catégories : Autochtones, Économie, Politique
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