Rassi Nashalik, le premier visage de la télévision du Grand Nord canadien
Rassi Nashalik a été le premier visage de la télévision en inuktitut, dans le Grand Nord. Pendant 18 ans, son poste de chef d’antenne du Téléjournal CBC Igaalaq lui a permis d’informer les familles inuites, de Yellowknife à Iqaluit. Maintenant qu’elle est retraitée, le sort de sa communauté reste une priorité.
Dans sa maison de Yellowknife, Rassi Nashalik allume son qulliq. Cette lampe traditionnelle a longtemps été utilisée par les femmes inuites pour fournir de la chaleur et de la lumière dans leurs demeures. Aujourd’hui, Rassi Nashalik continue d’entretenir sa flamme, par respect pour ses ancêtres : des femmes fortes, les gardiennes des familles dans son Nunavut natal.
L’ENFANCE AU NUNAVUT
Rassi Nashalik a passé son enfance dans un camp éloigné à proximité de Pangnirtung, au Nunavut.
Pendant les 10 premières années de sa vie, elle a vécu dans des qarmaqs, des maisons de tourbe, chauffée par le qulliq de sa mère et nourrie par la chasse de son père.
« Je me sens très chanceuse d’avoir été élevée traditionnellement », dit-elle, une lueur dans les yeux.
L’ÉCOLE RÉSIDENTIELLE
Quand elle avait 10 ans, sa soeur et elle ont été envoyées dans des pensionnats : elle a passé trois ans à Pangnirtung et trois autres années à Churchill, au Manitoba.
Elle admet toutefois garder de bons souvenirs du temps qu’elle a passé avec les autres enfants, chez le jeune couple inuit qui l’hébergeait.
« Nous ne parlions jamais anglais à la maison avec les autres enfants; c’était toujours en inuktitut », raconte Rassi Nashalik, qui s’estime chanceuse de ne pas avoir perdu sa langue maternelle.
C’est d’ailleurs son bon inuktitut, qui, plus tard, lui a permis de trouver un travail d’interprète pour le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest.
CBC IGALAAQ
En 1995, Rassi Nashaliq a entendu dire que CBC North recherchait un chef d’antenne pour lire les nouvelles en inuktitut à la télévision. Après un peu d’hésitation, elle a décidé de postuler. Elle a obtenu le poste sans problème.
« Au départ, ce n’était qu’un travail et un nouveau défi pour moi, ce n’était pas vraiment une grande chose », affirme l’ancienne lectrice de nouvelles. « Je ne pensais pas aux gens qui me regardaient, jusqu’au jour où je suis allée à Inuvik et que tout le monde dans la rue venait me rencontrer parce qu’ils me connaissaient. »
Elle dit rapidement avoir remarqué l’importance de la télévision en inuktitut auprès des communautés.
« Igalaaq passait deux fois par jour, une fois en direct de Yellowknife, en fin d’après midi, puis plus tard, en rediffusion en fin de soirée. Cependant, beaucoup de téléspectateurs nous écoutaient les deux fois… deux fois! », s’exclame-t-elle.
Son métier lui a permis de couvrir les plus grands événements dans les communautés au nord du 60e parallèle, comme les premières élections au Nunavut, en 1999. Ses moments les plus mémorables sont toutefois ceux qui avaient une relation avec la culture et les traditions de ses ancêtres.
« La chose la plus agréable que j’ai faite, c’est une entrevue avec une aînée qui allumait son qulliq dans un igloo », raconte la retraitée. « J’ai pu simplement lui parler de son enfance et de la façon dont elle avait grandi. »
THE ARCTIC INDIGENOUS WELLNESS FOUNDATION
Après 18 ans à l’antenne de CBC Igalaaq, Rassi Nashalik a pris sa retraite en 2014, mais son travail auprès de la communauté n’a pas pris fin pour autant. L’ancienne chef d’antenne fait maintenant partie d’une association qui tente de contrer la détresse psychologique des Autochtones dans les Territoires du Nord-Ouest avec des pratiques traditionnelles.
« Nous avons beaucoup d’Inuits, de Dénés et de Métis dans la rue qui demandent de l’argent sans savoir où aller », explique-t-elle. « Nous devons régler ce problème et je me dois d’y participer. »
The Arctic Indigenous Wellness Foundation tente ainsi de mettre sur pied un centre de santé et de bien-être adapté à la culture autochtone à Yellowknife, un centre qui sera indépendant du système de santé du gouvernement.
« Nous voulons le faire avec notre langue, notre culture et notre nourriture, pour que nos patients n’aient pas peur de venir nous voir pour suivre les traitements de désintoxication », dit-elle. « Ça va prendre du temps, mais c’est nous qui devons le faire avec l’aide de nos aînés. »
Les trois femmes viennent d’ailleurs de remporter le premier prix du programme Inspiration Arctique, à Ottawa.