La mort d’un détenu du Nord canadien atteint d’alcoolisme fœtal soulève des questions

Maxim Baril-Blouin, un homme du territoire nordique du Yukon, est mort en détention le 13 juillet au centre de détention d’Edmonton, dans la province de l’Alberta (centre du Canada). Souffrant du syndrome d’alcoolisme foetal, il a été adopté peu après sa naissance (Radio-Canada).
Une mère du Yukon (nord-ouest du Canada) critique le manque de soutien offert à son fils atteint du syndrome d’alcoolisme foetal après la mort de ce dernier au centre de détention d’Edmonton, dans le centre du Canada.

« C’est bouleversant parce que quelqu’un aurait dû s’occuper de lui, dit Sylvie Salomon. Il était tout seul, sans soins, sans supervision. Il l’a payé de sa vie. »

Maxim Baril-Blouin, 26 ans, est mort en détention le 13 juillet, après avoir plaidé coupable à l’accusation d’avoir proféré des menaces contre une employée de l’agence I Have a Chance Support Services (IHAC) de Stony Plain, près d’Edmonton. Il attendait son transfert sous escorte policière vers le Yukon, mais il n’y avait pas d’autre endroit disponible à ce moment-là pour l’héberger, selon sa mère, Sylvie Salomon.

La cause de la mort n’a pas été confirmée par le ministère de la Justice albertain, mais un document interne obtenu par CBC indique que le jeune homme est mort d’une surdose de fentanyl, une drogue 40 fois plus puissante que l’héroïne. Le même jour, six autres détenus ont également été retrouvés inconscients après la consommation de drogue, mais aucun d’entre eux n’est mort.

Une enquête sur la mort de Maxim Baril-Blouin doit être menée par le Ministère. En attendant, Sylvie Salomon affirme avoir du mal à comprendre comment l’agence qui devait veiller à sa sécurité n’a pas pu éviter qu’il se retrouve en prison.

« Un enfant comme lui ne peut pas être en prison. C’est ce qu’on a toujours revendiqué : qu’on ne peut pas mettre une personne handicapée comme lui en prison », soutient-elle.

Écoutez le reportage de Laurence Martin au Téléjournal de Radio-Canada :

 

Un parcours mouvementé

Sylvie Salomon et son conjoint ont adopté Maxim à un très jeune âge avant de découvrir, plusieurs années plus tard, qu’il souffrait du syndrome d’alcoolisme foetal, ce qui avait des répercussions importantes sur son comportement. « C’est un petit bonhomme qui déplaçait beaucoup d’air, qui avait de la difficulté à comprendre nos ententes sociales. Par exemple, si tu veux emprunter, tu dois demander, si tu veux faire quelque chose, tu dois attendre. Il ne pouvait pas faire ces choses-là. »

En 2017, il a été déclaré non criminellement responsable de plusieurs chefs d’accusation au Yukon et placé sous la garde de la Commission d’examen du Yukon. Faute d’établissements adaptés qui pouvaient assurer sa surveillance en tout temps, le jeune homme a été envoyé en Nouvelle-Écosse, puis en Ontario avant d’être confié à l’agence IHAC, de Stony Plain.

Durant les semaines précédant la mort de son fils en Alberta, Sylvie Salomon a eu beaucoup de difficultés à obtenir de l’information sur la situation de son fils et l’endroit où il se trouvait.

Elle a finalement appris que l’appartement de son fils avait été vandalisé pendant un court séjour de ce dernier à l’hôpital et qu’il a ensuite dû être hébergé dans un hôtel. Le manque d’encadrement dans ce nouvel environnement a grandement perturbé son fils, soutient-elle, et aurait pu contribuer à l’incident qui a porté l’employée d’IHAC à porter plainte contre lui.

Sa mère veut maintenant obtenir des réponses de l’agence IHAC.

« Les gens qui ont des permis pour travailler avec des enfants comme les nôtres devraient rendre des comptes. »

Sylvie Salomon

Dans un bref communiqué, l’agence affirme que ne pas pouvoir commenter cette affaire pour des raisons de protection de la vie privée, mais souligne que la police et la Couronne jouent aussi un rôle dans la décision de porter des accusations contre une personne.

Manque de ressources au Yukon

Tous les efforts nécessaires sont déployés pour garder les patients tels que Maxim au Yukon, affirme Pat Living, directrice des communications de Santé et Services sociaux du Yukon. Quand les besoins deviennent très complexes, il faut cependant envoyer les patients à l’extérieur du territoire pour assurer leur sécurité, dit-elle.

Sylvie Salomon et son mari croient par contre que leur fils aurait dû pouvoir obtenir de meilleurs soins dans le territoire. « On est deux enseignants, les enfants, on les a à coeur. Au Yukon comme ailleurs, ces enfants-là ont droit à des services. Dans notre cas, les services auraient dû rester, devraient être au Yukon », dit-elle.

Le manque de ressources dans le territoire est un enjeu de taille, selon l’avocat David McWhinnie qui a travaillé sur plusieurs cas semblables. L’accès à des soins psychiatriques et à des services qui favorisent la réinsertion sociale est essentiel, selon lui. « [Si ces cas] se retrouvent dans un hôpital, qui nécessairement sera loin de leur domicile, leurs amis, leur famille, il devient difficile dans le processus de réintégration de les renouer avec leur communauté de façon à ce qu’ils puissent y retourner une fois qu’ils sont en meilleur état pour quitter l’hôpital », affirme-t-il.

Avec des informations de Josée St-Onge et Axel Tardieu

Gabrielle Michaud Sauvageau et Claudiane Samson, Radio-Canada

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