Inuite retrouvée pendue à Montréal : l’enquête piétine

Siasi Tullaugak a été retrouvée morte à Montréal en août 20917. (Facebook)
En août 2017, elle a été retrouvée pendue à un balcon d’un immeuble du centre-ville de Montréal. Plus d’un an plus tard, l’enquête policière sur la mort de la jeune Inuite Siasi Tullaugak est toujours active, mais des intervenants communautaires affirment que rien ne bouge.

Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) a d’abord conclu à un suicide. La femme de 27 ans, retrouvée suspendue à un balcon d’à peine quelques mètres de haut près du métro Atwater, n’était toutefois pas suicidaire et n’a laissé aucune note à ses proches. Des organismes communautaires qui connaissaient l’itinérante et travailleuse du sexe ont dénoncé une enquête « bâclée », un système qui échoue encore une fois à protéger les femmes autochtones vulnérables.

Dans la foulée d’un battage médiatique et de la découverte « de nouvelles informations », l’enquête a été rouverte. Quatorze mois plus tard, l’enquête sur la mort de la jeune femme originaire du Nunavik, la région inuite du Nord du Québec, est toujours « en cours », selon le SPVM.

Contactée par Radio-Canada, la police de Montréal affirme ne pas commenter publiquement les enquêtes actives, mais appelle la population à communiquer avec Info-Crime Montréal au 514 393-1133 ou en ligne si elle détient une quelconque information.

« Il n’y a rien qui se passe »

Du côté des personnes qui ont connu de près ou de loin la jeune femme, le son de cloche est néanmoins différent.

« Il n’y a pas d’enquête, personne n’est venu, ils ne nous ont pas contactés, nous ou nos clients. Il n’y a rien qui se passe. [Les policiers] sont venus deux mois après sa mort avec des photos parce que nous mettions de la pression et qu’il y avait des articles dans la presse. C’est la dernière fois que je les ai vus », soutient John Tessier, intervenant de rue au foyer Open Door que fréquentait Siasi, près du square Cabot.

« C’est ce que [les policiers] font : ils disent que l’enquête est en cours pour qu’ils n’aient pas à répondre à des questions », ajoute-t-il.

Une amie de Siasi, l’une des dernières à l’avoir vue vivante, affirme à Radio-Canada ne pas avoir été contactée non plus par les policiers.

À quelques rues à l’est du foyer Open Door, au refuge Chez Doris – que fréquentait également Siasi –, personne n’a de nouvelles des enquêteurs depuis des mois. « Notre maison porte le nom de Doris Halfkenny, et son meurtre n’a jamais été résolu. Et elle aussi était itinérante. Les mêmes problèmes persistent pour les femmes vulnérables », souligne la directrice du refuge Marina Boulos-Winton, qui refuse toutefois de faire de la « généralisation ».

Les intervenants en itinérance soutiennent que la police a parlé de suspects, notamment d’un homme originaire d’Asie du Sud-Est à qui Siasi a téléphoné à plusieurs reprises le soir de sa mort. Un autre homme a également été aperçu avec Siasi quelques instants avant sa mort. Il est aujourd’hui en prison pour avoir violé et drogué une mineure le printemps dernier.

« J’ai entendu dire que la victime était une touriste, donc c’est sûr qu’il y a eu plus d’efforts pour l’arrêter », affirme Marina Boulos-Winton.

John Tessier croit que la police aurait été plus réactive si Siasi Tullaugak n’avait pas été une femme autochtone dans la rue. « Si la victime avait été la fille d’une avocate de Westmount [NDLR : un quartier aisé de Montréal], ici, sur le boulevard Dorchester, il y aurait une enquête sérieuse. Ils iraient regarder les caméras de surveillance, ils découvriraient quelque chose », dit-il.

Laurence Niosi, Radio-Canada

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